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Le lac Deschênes, le Far West du Bas-Canada

Le lac Deschênes, le Far West du Bas-Canada

Par Lynne Rodier et Sophie Tremblay

Aylmer a toujours entretenu son propre mystère. Est-elle une ville anglophone ou une ville francophone? Est-elle catholique ou protestante? Est-elle Ontarienne ou Québécoise? Derrière ses allures de village, cette communauté s’est développée de façon autonome et avant-gardiste. À la lumière de l’étude de ses archives et de son patrimoine, nous découvrons un monde où les innovations, les jeux de coulisse politiques et le monde des affaires ont une place de choix. C’est donc avec plaisir que nous jouerons les Columbos pour vous dans le cadre de cette chronique afin de vous révéler les dessous de cette intrigante.

Abordons une ressource essentielle pour les habitants d’Aylmer, soit le lac Deschênes. Ce vaste réservoir naturel d’environ 30 kilomètres sur la rivière des Outaouais joue un rôle important dans le développement de la ville. Ses abords regorgent de richesses qui restent méconnues pendant plusieurs siècles. Que ce soit pour sa proximité des eaux calmes s’élargissant sur trois kilomètres sur la rivière des Outaouais, la richesse de ses sols et de sa forêt, son climat tempéré ou sa facilité d’accès au gibier et aux eaux poissonneuses, ce joyau tarde à se tailler une place dans le patrimoine québécois. Le lac a d’ailleurs changé de nom à plusieurs reprises avant de se nommer Deschênes pour une raison qui demeure obscure. Est-ce dû aux magnifiques arbres qui le bordaient ou au patronyme d’un inconnu qui s’est illustré dans le domaine des pelleteries? Pour le moment, rien ne nous incite à trancher en faveur de l’une ou l’autre de ces options.

Par ailleurs, au XIXe siècle, cette imposante étendue d’eau demeure un point charnière sur la grande route du commerce qu’est la rivière des Outaouais. Menant les voyageurs et les colons, le lac Deschênes s’étend entre deux obstacles naturels qui imposent un débarquement et un portage pour tous. Ce temps d’arrêt ouvre la porte au développement économique de l’endroit. Donc, marchands de fourrure, commerçants de bois et Amérindiens y flairent la bonne affaire.

Un des neveux de Philemon Wright, Charles Symmes, saura d’ailleurs tirer profit de l’endroit dès 1822. Sur les lieux du débarcadère utilisé par les voyageurs, il bâtit des installations modernes et pratiques qu’il nomme Symmes Landing (L’abord-à-Symmes). Cet endroit, le plus à l’ouest du Bas-Canada, servira de point de départ pour les rues d’Aylmer où pousseront les échoppes, les hôtels et les entrepôts qui seront témoin de nombreuses tractions qui forgeront la ville d’Aylmer et l’histoire du Canada tout entier.

Brasser les affaires et l’âge d’or d’Aylmer, Canada-Est, 1840-1870

Brasser les affaires et l’âge d’or d’Aylmer, Canada-Est, 1840-1870

Brasser les affaires en région de colonisation

Quand il s’agit de brasser les affaires en Outaouais au 19e siècle, nous découvrons des personnalités fortes, énergétiques et persévérantes. Ce troisième article de la série les Bâtisseurs de l’Outaouais se penche sur le monde des affaires de Robert Conroy d’Aylmer. Dès son arrivée dans la région de l’Outaouais au début des années 1830, la vapeur fournit l’énergie nécessaire aux premières manufactures ne pouvant pas compter sur les forces hydrauliques des eaux calmes du lac Deschênes dans cette section de la rivière des Outaouais. Dès 1840 autour du réseau des trois portages des Chaudières, c’est dans le domaine du transport que la vapeur sert bien les marchands d’Aylmer malgré les difficultés que lui posent les obstacles naturels de la rivière des Outaouais. Cette jeune municipalité est le dernier village à l’ouest de Montréal. D’ailleurs, les voyageurs, les travailleurs forestiers et les colons se rendent à Aylmer pour atteindre les pays d’En-haut grâce au réseau de transport mis en place par l’élite marchande du canton de Hull au Canada-Est. Robert Conroy sait d’abord s’illustrer en tant que marchand et hôtelier dans cette communauté riveraine ayant regard vers l’Ouest des Canadas.

Bateaux à vapeur à la chute des Chaudières
George Munro Grant, Picturesque Canada; The Country as it Was and Is, Toronto, Belden Brothers, 1882, volume 1, p. 157.

La navigation et la vapeur Dans la région, les premiers bateaux à vapeur permettent le passage d’un nombre croissant d’immigrants et de marchandise voyageant en amont ou en aval de la chute des Chaudières dans le canton de Hull. Les succès d’Aylmer, le premier village du canton, reposent sur les moyens d’accéder à la partie supérieure de la rivière des Outaouais. Ainsi, l’élite d’Aylmer contribuent financièrement à l’essor du réseau routier et des voies d’accès à la rivière des Outaouais. Elle veille à développer des moyens de communication efficace afin d’inscrire la jeune communauté sur l’échiquier d’influence économique et politique de la région de l’Outaouais. Le débarcadère de L’abord-à-Symmes à Aylmer devient ainsi un lieu fort achalandé agissant à titre de point de liaison maritime et routier entre le Canada-Est, le Canada-Ouest et le Territoire du Nord-Ouest.

Religieux en train de méditer, BACc013569k,
Religieux en train de méditer, un vapeur sur l’Outaouais supérieur,
BACc013569k,

Robert Conroy, Esquire Il est intéressant de voir aux ambitions et aux aspirations d’une famille marchande du Canada-Est à travers un homme qui sait brasser les affaires en Outaouais. L’histoire du monde des affaires de Robert Conroy nous mène vers celle d’Aylmer. Déjà à la fin des années 1830, Robert Conroy a des champs d’intérêt commerciaux diversifiés à titre de marchand, de magasinier et d’hôtelier. Il connaît de près la problématique du transbordement et du transport au Canada grâce à ses contacts étroits avec les exploitants forestiers et les pionniers de la région. En s’installant à Aylmer, Robert Conroy collabore au développement des voies de communication et de transport. Il est parmi l’élite marchande de la région de l’Outaouais d’où son titre sur l’ensemble des documents légaux s’inscrit : Esquire.

Robert Conroy, BAnQ - 07H_P137S4D11P21
Robert Conroy,
BAnQ – 07H_P137S4D11P21

L’hôtellerie et les auberges Conroy

En 1834, Robert Conroy érige son premier hôtel, l’Aylmer, à proximité des bâtiments construits en 1822 par les Wright pour Charles Symmes sur la rue Principale[1]. Charles Symmes est d’ailleurs considéré de plein droit le fondateur du village d’Aylmer [2]. En 1836, Robert Conroy tient aussi l’auberge de pierre (auberge Symmes), menant au quai de L’abord-à-Symmes (Symmes Landing), jusqu’à la fin du projet de construction de son propre hôtel, le British. Quelques années plus tard, Conroy se porte acquéreur de ces installations qui comprennent l’auberge, le quai d’embarquement et le magasin-entrepôt et qui sont mieux connu sous le nom Symmes Landing[3]. Les hôtels et les services de transport soutiennent cette jeune communauté regardant rêveusement vers l’Ouest. «Symmes Landing prend vite figure de port de mer, alors qu’il n’était guère question de Bytown, encore moins de Hull[4]. » En collaborant ainsi avec les bâtisseurs de l’Outaouais, Robert Conroy s’engagent dans des démarches et des actions conduisant vers l’âge d’or d’Aylmer entre 1830 et 1870.

Aylmer, Upper Canada. ca. 1841, Bartlett, W. H. (William Henry), 1809-1854. QUE. : Aylmer ca. 1841. No. MIKAN 2840127
Aylmer, Upper Canada.
ca. 1841,
Bartlett, W. H. (William Henry), 1809-1854.
QUE. : Aylmer ca. 1841.
No. MIKAN 2840127

L’hôtellerie et le transport sur le lac Deschênes L’ensemble des hôtels sert de point de relais pour les voyageurs et les travailleurs en transit entre les chutes des Chaudières et le lac Deschênes. Un service de diligences assure la liaison routière de Hull et de Bytown par le chemin d’Aylmer jusqu’aux auberges Conroy sur la rive nord-ouest du lac Deschênes. Les passagers sont encouragés à passer leur nuit à Aylmer. Frais et dispos, les voyageurs s’embarquent au quai de L’abord-à-Symmes pour se rendre vers le nord-ouest des Canadas. Les services de bateau à vapeur assurent la navette entre Aylmer (comté d’Ottawa, Canada-Est) et la partie ouest au bas du Saults-des-Chats[5. D’ailleurs, le chemin Hull-Aylmer est la première route à jouir d’un service permanent de transport en Outaouais et ce, fonctionnel, en partie, douze mois par année[6].

Extrait de la gravure de Stent et Laver de 1877-Pont de l'Union (pont des Chaudières), En bas à gauche de l'image, il est possible de voir la route macadamisée : chemin d'Aylmer.
Extrait de la gravure de Stent et Laver de 1877-Pont de l’Union (pont des Chaudières),
En bas à gauche de l’image, il est possible de voir la route macadamisée : chemin d’Aylmer.

Hôtel British :

Symbole d’innovation en architecture

Sketch of the British Hotel in Aylmer, Quebec 71, rue Principale Built by Robert Conroy in 1834 Drawing Source: National Capital Commission Heritage, page 37
Sketch of the British Hotel in Aylmer, Quebec
71, rue Principale Gatineau
Construit par Robert Conroy en 1834
Source : Patrimoine de la Commission de la capitale nationale du Canada,
page 37

C’est à la même période, entre 1834 et 1838, que Robert Conroy entreprend la construction de son fameux hôtel British[7]. L’architecture de l’hôtel British est réfléchie. Les murs de plus d’un mètre d’épaisseur protègent efficacement contre le froid hivernal. Selon Richard Bégin : « On rapporte qu’aucun autre hôtel ne pouvait s’y comparer au Canada, à l’époque; Bytown (Ottawa) n’avait alors qu’une simple cabane en bois rond comme hôtel, près du pont des Sapeurs.[8] »  Au 19e siècle, l’hôtel compte plusieurs bâtiments, dont l’auberge originale, l’ancienne résidence des Conroy et l’écurie à l’arrière. Sur place, le voyageur bénéficie des services de location de chevaux et de voitures.

Haut lieu d’activités d’Aylmer

Servant autant pour les soirées mondaines, d’église, d’école, de salle d’assemblée au premier conseil municipal et temporairement, de Cour supérieure du district d’Ottawa, le luxueux hôtel British attire l’élite de passage dans la région. D’ailleurs, le prince de Galle est venu assister à un bal à l’occasion de son passage à Aylmer en 1860[9]. Selon les rumeurs, l’assassin de Thomas D’Arcy McGee s’est brièvement présenté aux funérailles de Robert Conroy, décédé le 8 avril 1868, le lendemain du meurtre[10]. Le premier ministre du Canada, John A. McDonald, est semble-t-il[11], aussi familier avec ce fameux hôtel d’Aylmer et enfin, toujours selon les rumeurs, Louis Cyr figure sur la liste des invités de passage en 1898[12]. Les seuls registres ayant survécu jusqu’à aujourd’hui nous révèlent qu’en 1895, il se tient une réunion entre Mackenzie Bowell (premier ministre du Canada), Sir Charles Tupper (son successeur quelques mois plus tard), Adolphe Caron (ministre des postes) et Julius G. Lay du consul général des États-Unis au Canada. Ces hommes séjournent au British pendant la même période où se discute la question des problèmes scolaires des écoles francophones du Manitoba[13]. Enfin, toujours selon Richard Bégin : « C’est aussi derrière ces murs de pierre que furent probablement conçu les projets d’un canal de la baie Georgienne, un projet qui fut la source de débats parlementaires pendant plus de 50 ans et qui aurait peut-être assuré l’avenir d’Aylmer.[14] » Ce projet était parmi les plans initiaux de liaison sur la rivière des Outaouais entre Montréal afin d’atteindre par la rivière Matawa et le lac Nippissing, la baie Georgienne et le lac Huron qui auraient transformé de façon inégale le développement économique des régions concernées dont faisait partie la région de l’Outaouais.

Cote : P154, S1, D1, p20 ; Fonds de la famille Conroy ; Photographie - hôtel British dans : Souvenirs Folder containing 16 photographic Views of Aylmer
Cote : P154, S1, D1, p20 ;
Fonds de la famille Conroy ;
Photographie – hôtel British
dans : Souvenirs Folder containing 16 photographic Views of Aylmer

Lumberer :

Marchand, négociant, politicien

À Aylmer, Robert Conroy et John Egan sont séduits par l’essor des activités de transbordement sur le lac Deschênes. Entre 1840 et 1850, Robert Conroy ne détient toujours aucune limite forestière[15], malgré le fait qu’il soit un négociant de bois et un marchand (lumberer[16]) ayant rapporté de nombreux radeaux de bois sur la rivière des Outaouais. Les lumberers jouent un rôle très actif dans leur communauté et plusieurs sont des politiciens à l’exemple de John Egan (maire d’Aylmer, député à l’Assemblée nationale) et Robert Conroy (échevin et maire d’Aylmer). À Aylmer, les habitants obtiennent la permission de constituer un village indépendant du reste du canton avec leur propre conseil élu en 1847[17]. Diane Aldred ajoute : « Grâce à leur persévérance et à leurs décisions éclairées, la ville (Aylmer) prospère et se développe à un rythme accéléré durant les années 1850 et 1860[18]. »

Glissoir sur la rivière des Outaouais, rapides des Chats. 1840 Bainbrigge, Philip John, 1817-1881. Bibliothèque et Archives Canada, Acc. No. 1983-47-8 Copyright: Expired Mikan no. 2833524
Glissoir sur la rivière des Outaouais, rapides des Chats. 1840
Bainbrigge, Philip John, 1817-1881.
Bibliothèque et Archives Canada, Acc. No. 1983-47-8 Copyright: Expired
Mikan no. 2833524

  Le transport de bois sur la rivière des Outaouais

Timber Slide at Les Chats.sm
Timber Slide at ‘Les Chats’ (Upper Canada)

John Egan a de grandes concessions forestières dans les comtés de Renfrew (rivière Madawaska et région de Chalk River au Canada- Ouest[19]) et du Pontiac (Canada-Est)[20]. Grâce aux vastes limites forestières de la famille McConnell et de John Egan ainsi que ses liens avec les marchands locaux, Robert Conroy se démarque dans l’acheminement des ressources forestières dans la région de l’Outaouais. Cette association donne au commerce du bois un caractère systématique d’une entreprise[21]. Ces hommes fondent des entreprises, des villages, voire même l’ambition d’un pays[22]. Ils ont une influence considérable sur la main d’œuvre et la colonisation en Outaouais. Il reste alors à acheminer le bois au bas de la chute des Chaudières. Ainsi, les grands radeaux de bois poursuivent leur route vers le sud et les États-Unis par le canal Rideau ou par la rivière des Outaouais vers Montréal pour ensuite rejoindre le fleuve vers Québec où attendent les marchands britanniques afin d’exporter les grosses pièces de bois équarri vers la Grande-Bretagne.

Gros radeau sur le fleuve Saint-Laurent. 1838. Aquarelle avec touches d'encre noire et raclage sur crayon sur papier vélin.  Bainbrigge, Philip John, 1817-1881. BAC- MIKAN no. 2896090.
Gros radeau sur le fleuve Saint-Laurent.
1838.
Aquarelle avec touches d’encre noire et raclage sur crayon sur papier vélin.
Bainbrigge, Philip John, 1817-1881.
BAC- MIKAN no. 2896090.

Transport du bois sur le lac Deschênes

Avant Egan : « Le commerce du bois sur la rivière des Outaouais n’était rien de plus qu’une aventure insensée[23]. » Les lumberers sont de l’élite de la région de l’Outaouais. Les titres de noblesse souvent associés à ces rois et aux barons des forêts démontrent de l’autorité que ces hommes exercent sur l’économie régionale. Les lumberers détiennent généralement de larges limites forestières, souvent des terres de la Couronne, et gèrent une main-d’œuvre abondante. John Egan innove en creusant des canaux pour faire passer les ressources et en installant des scieries pour que le bois soit coupé sur place. Egan cherche aussi à retenir la main d’œuvre près de ces concessions forestières. Alors, il encourage l’ouverture au peuplement sur les deux rives de la rivière des Outaouais. Les grands lumberers voient à la production, à la transformation, au transport et au financement de l’industrie du bois. Ils assument alors tous les risques dans le domaine de la foresterie. D’ailleurs, Gaffield ajoute : «Étant donné la forte stratification des groupes économiques dans la région, quelques membres se révèlent plus en mesure que d’autres de se protéger : certains font face à la faillite, d’autres à la misère[25]. »

The Timber Raft. ca. 1868 Hopkins, Frances Ann, 1838-1918. BAC no Mikan - 2838095
The Timber Raft. ca. 1868
Hopkins, Frances Ann, 1838-1918.
BAC no Mikan – 2838095

Difficultés du transport fluvial au 19e siècle

Les chutes au Chat sur l’Outaouais. 1821. John Elliott Woolford (1778-1866). Musée des beaux-arts du Canada, 42324.80.
Les chutes au Chat sur l’Outaouais. 1821.
John Elliott Woolford (1778-1866).
Musée des beaux-arts du Canada, 42324.80.

La stabilité dans le transport est un facteur d’influence où les risques déterminent le succès ou la perte de l’élite marchande, car il peut s’écouler de 6 à 24 mois avant que le bois sorti de la forêt fasse son entrée sur le marché d’exportation. Les prix du bois peuvent fluctuer énormément en peu de temps. Il importe ainsi pour le lumberer de profiter du marché quand les prix sont profitables. À ces débuts, Robert Conroy investit d’avantage dans l’établissement de quais d’embarquement plutôt que les limites forestières. Il détient entre autres, des installations permettant le transport entre le Saults-des-Chats et les rapides Deschênes.

Conroy's Chute at Chats Falls. Topley Series SC  Credit: William James Topley/Library and Archives Canada/PA-009336 Restrictions on use: Nil Copyright: Expired MIKAN no 3319056
Conroy’s Chute at Chats Falls.
Topley Series SC
Credit: William James Topley/Library and Archives Canada/PA-009336
Restrictions on use: Nil
Copyright: Expired
MIKAN no 3319056

Robert Conroy exerce une influence certaine sur l’ensemble de l’activité fluviale sur le lac Deschênes. Il est installé dans la région de Bonnechère (dont le lac et la rivière sont un affluent de la rivière des Outaouais, Canada-Ouest). Ces installations comprennent un quai d’embarquement et un magasin-entrepôt. De ces installations, le bois s’achemine par un réseau de glissoirs au bas des chutes au Chat atteignant ainsi la partie la plus à l’ouest du lac Deschênes. Au retour, les services de navigation à vapeur assurent le transport de la main d’œuvre, des colons et de la marchandise nécessaire au développement de la vallée de l’Outaouais au 19e siècle.

Chats Falls timber slide, Fitzroy Harbour Ont. Repairing the slide Circa : 5 July 1899 Library and Archives Canada / PA--058031 Restrictions on use: Nil Copyright: Expired MIKAN no 3372374
Chats Falls timber slide, Fitzroy Harbour Ont. Repairing the slide
Circa : 5 July 1899
Library and Archives Canada / PA–058031
MIKAN no 3372374

Le quai d’embarquement d’Aylmer Aylmer.MF.smDéjà en 1836, Charles Symmes invite Robert Conroy à gérer ses installations au quai de débarquement installé au bout du chemin d’Aylmer à L’abord-à-Symmes (Turnpike End)[29]. La famille Conroy vient qu’à acquérir ces installations. C’est aussi à Aylmer que Robert Conroy s’affaire à recruter la main-d’œuvre nécessaire à l’exploitation forestière sur l’Outaouais supérieur. Une publicité parue dans le journal, The Citizen de 1851, annonce : « The following gentlemen, resident in the neighbourhood will furnish on application all needful advice and information ; and they have undertaken to give the fullest direction to Emigrants, whether their subject be labour or Settlement[30]. » Robert Conroy, Esquire, fait partie de la liste de ces recruteurs. D’ailleurs dès les années 1850, Robert Conroy est un acteur important dans le recrutement de la main-d’œuvre et dans l’établissement des colons en Outaouais[26]. L’industrie forestière attire plus de 25 000 à 30 000 hommes à cause de l’accroissement de la demande pour les ressources forestières de la région de l’Outaouais[27]. Conroy n’hésite pas à utiliser son influence pour contrôler la main-d’œuvre comme en fait foi cette notice publiée dans l’Aylmer Times, le 22 août 1856: Ran Away – Public Notice is hereby given, that Francis Hilaire, Joseph Perrin, Noah Fortier and M. A. Fortier have absconded from my employment, while the term for which they were engaged, is yet inexpired. Any person HIRING or EMPLOYING THESE MEN will be prosecuted by the Subscriber. -Robert Conroy[28]. La descente vers la chute des Chaudières

Frances Anne Hopkin, Descente des rapides, Québec (Québec ),  Collection Hopkin, Bibliothèque et Archives du Canada, 1879
Frances Anne Hopkin, Descente des rapides, Québec (Québec ), Collection Hopkin, Bibliothèque et Archives du Canada, 1879

À l’extrémité nord-est du lac Deschênes aux rapides, il y a un à trois magasins ainsi qu’un entrepôt pour le commerce des fourrures et un poste de traite toujours en activité en 1883[31]. Après 1860, l’acheminement du bois se poursuit sur la rive sud de l’Outaouais dans le canton de Nepean[32]. Conroy a là-aussi un quai d’embarquement donnant alors un accès à la ligne de chemin de fer du Canadien Pacifique. D’ailleurs, le passage des radeaux de bois sur l’ancien site des trois portages de la rivière des Outaouais exigeait à démanteler les nombreux radeaux des trains de bois et à faciliter ainsi les opérations risquées à partir des rapides Deschênes[33]. Il peut s’écouler jusqu’à deux semaines pour en venir à bout de cette opération dans la première partie du 19e siècle.

Les chutes Chaudière. ca 1836-1842. Aquarelle avec raclage sur crayon sur papier vélin. Bainbrigge, Philip John, 1817-1881. BAC- MIKAN no. 2896083.
Les chutes Chaudière.
ca 1836-1842.
Aquarelle avec raclage sur crayon sur papier vélin.
Bainbrigge, Philip John, 1817-1881.
BAC- MIKAN no. 2896083.

Descente des chutes au Chat

Glissoir à Les Chats, à Bytown, au Haut-Canada. 1842 Bartlett, W. H. (William Henry), 1809-1854. BAC - Mikan no. 2934410.
Glissoir à Les Chats, à Bytown, au Haut-Canada. 1842
Bartlett, W. H. (William Henry), 1809-1854.
BAC – Mikan no. 2934410.

L’expérience dans le transport du bois n’est pas étrangère à Robert Conroy. Déjà en 1820, les frères McConnell, dont son beau-père, William McConnell, acheminent de grands radeaux de bois vers les rapides Deschênes de partance du lac Témiscamingue[34]. Les risques sont nombreux. Les hivers où il y a peu ou trop de neige rendent difficile le travail sur les chantiers. Avec peu de neige vient un faible débit des rivières compromettant la drave à cause des nombreux embouteillages sur les affluents de la rivière des Outaouais. Cette situation empêche les scieries de fonctionner à leur pleine capacité au printemps compromettant ainsi l’ensemble de la haute saison de sciage. Au contraire, lorsque le débit de la rivière des Outaouais est trop fort, on risque de voir se démanteler de façon spontanée les radeaux de bois. La forte crue des eaux risque aussi de submerger les scieries les arrêtant complètement de fonctionner tant qu’elles sont submergées[35].

Les chutes des Chaudières.  ca 1836-1842. Aquarelle avec raclage sur crayon sur papier vélin. Bainbrigge, Philip John, 1817-1881. BAC- MIKAN no. 2896084.
Les chutes des Chaudières.
ca 1836-1842.
Aquarelle avec raclage sur crayon sur papier vélin.
Bainbrigge, Philip John, 1817-1881.
BAC- MIKAN no. 2896084.

L’ouverture de l’Ottawa Valley L’Ottawa Valley est cette vaste vallée du bassin fluvial de la section supérieure de la rivière des Outaouais située entre le lac Témiscamingue et les rapides Deschênes. C’est dans la vallée de la rivière Madawaska qu’Egan installe ses premières scieries à proximité de ses limites forestières. Il contribue directement à l’essor économique du comté de Renfrew (Canada-Ouest) fondant même le village Eganville. Il fait de même sur la rive nord de la rivière des Outaouais dans le comté du Pontiac (Canada-Est). Les lieux d’établissement assurent ainsi la stabilité de la force ouvrière de l’Ottawa Valley sur les deux rives de la rivière des Outaouais. Le service des bateaux-vapeur est assuré depuis Aylmer jusqu’à l’extrémité ouest du lac Deschênes (Frizroy Harbour, Canada-Ouest et Quyon, Canada-Est) par la Upper Ottawa Steamboat Company, dont Robert Conroy est actionnaire[36] ou la Compagnie Union Forwarding, dont Egan est propriétaire. La descente du bois d’Egan passe par un réseau de glissoirs pour atteindre les quais de transbordement de Robert Conroy et, ensuite, le lac Deschênes, cette partie élargie de la rivière des Outaouais. Ainsi, à leur retour, les bateaux à vapeur s’affairent à remorquer les radeaux de bois assemblés en amont du lac Deschênes. Le bois s’achemine de façon plus régulière avec l’usage des bateaux-remorques qui font la navette entre les rapides des Chats et Aylmer ou jusqu’aux rapides Deschênes à l’extrémité est du lac. Sur la rive nord des rapides Deschênes, une mystérieuse scierie y est installée depuis le début des années 1830[38]. À cet endroit, il se trouve aussi les terres des frères McConnell et le poste de traite Day-McGillivray[39]. À partir des rapides Deschênes, il peut s’écouler deux semaines pour en venir à bout des opérations nécessaires pour faire passer les radeaux de bois par le réseau des trois portages à partir des rapides Deschênes afin d’atteindre le bas de la chute des Chaudières à Hull (Gatineau) et Bytown (Ottawa).

Entrée du canal Rideau, Bytown, vers 1838. Aquarelle sur crayon sur papier vélin. Bainbrigge, Philip John, 1817-1881. BAC -MIKAN no. 2896304.
Entrée du canal Rideau, Bytown, vers 1838.
Aquarelle sur crayon sur papier vélin.
Bainbrigge, Philip John, 1817-1881.
BAC -MIKAN no. 2896304.

Contrôle du transport sur le lac Deschênes

Les activités de transbordement sont nécessaires sur la rivière des Outaouais, car les risques et les dangers associés au transport y sont nombreux à cause des chutes et des rapides. Par exemple, le lac Deschênes est un grand élargissement de la rivière des Outaouais et il s’étire sur environ 30 kilomètres, en amont de la chute des Chaudières. Ce bassin fluvial naturel est situé entre deux grandes descentes de la rivière des Outaouais. Aux rapides et aux chutes des Chats, la descente est de 12 mètres avant d’atteindre les eaux calmes du lac Deschênes. En aval, le voyageur atteint le réseau des trois portages de la chute des Chaudières. Ce réseau de route et de sentiers permet de contourner la descente de 18 mètres sur cette section de la rivière des Outaouais. Le poste de traite aux rapides Deschênes est un lieu d’arrêt obligatoire pour tous les voyageurs qui ne s’arrêtent pas à Aylmer. L’ajout d’un réseau routier permanent est nécessaire pour assurer l’accès aux lieux de transbordement 12 mois par année. Le chemin d’Aylmer, par exemple, permet de contourner les obstacles naturels sur une distance de 13 kilomètres arrivant ainsi à contourner la descente des rapides et l’immense cataracte des Chaudières marquant à elle seule un dénivellement de plus de 10 mètres de hauteur [40].

Chutes Chaudière. Juillet 1838. Aquarelle avec raclage sur crayon sur papier vélin. Bainbrigge, Philip John, 1817-1881. BAC- MIKAN no. 2896137.
Chutes Chaudière.
Juillet 1838.
Bainbrigge, Philip John, 1817-1881.
BAC- MIKAN no. 2896137.

En assurant les activités de transport sur le lac Deschênes, la famille Conroy se démarque dans l’activité fluviale et le développement du transport en Outaouais. Ses efforts dans le développement du réseau de communication et de ses activités de transbordement assurent la prospérité de ce lumberer du comté de l’Ottawa du Canada-Est. Conroy et ses associations d’affaires arrivent à intégrer les activités de transbordement sur le lac Deschênes à un réseau de transport complexe exigeant un grand nombre d’infrastructures afin d’assurer une activité fluviale efficace, surtout dans le domaine du bois équarri et de sciage sur la rivière des Outaouais jusqu’au début de la première guerre au 20e siècle. Bien que Robert Conroy n’obtienne que le titre de baron du bois, il va de soi qu’il est le roi du transport des ressources et de la main d’oeuvre du domaine de la forêt sur les eaux calmes du lac Deschênes.

[Conroy Lumber Mills] Bibliothèque et Archives Canada, a013224-v6, MIKAN  # 3371910
[Conroy Lumber Mills]
Bibliothèque et Archives Canada, a013224-v6,
MIKAN # 3371910

Témoins de la prospérité de la famille Conroy

Lakeview HousePar ailleurs, le patrimoine immobilier de la famille Conroy démontre de son influence à Aylmer.  Cette famille réside d’abord dans la grande maison à ossature de bois au 78 rue Principale qui fut construite par Philemon Wright pour son neveu, Charles Symmes en 1822. Les Conroy y résident entre 1834 et 1841. Les biens fonciers des Conroy témoignent de leur prospérité. Elle dirige quatre hôtels dans le village dont l’auberge de pierre Symmes et le luxueux hôtel, le British, où la famille y réside jusqu’en 1845[41]. La famille aménage ensuite sa première résidence de pierre au 72 Principale, maintenant appelée la maison Conroy-Driscoll. En 1855, elle s’installe dans une des résidences de pierre des plus prestigieuses,  Lakeview, au cœur du village d’Aylmer, à une distance de marche de leurs hôtels et de L’abord-à-Symmes. « Lakeview témoigne de la prospérité de Conroy » selon Diane Aldred. Située au 61, rue Principale, cette maison de pierres polies est entourée de deux acres de terrain et elle a alors une vue splendide sur le lac Deschênes. « Vers 1860, Robert Conroy achète l’ancienne maison de Moses Holt pour la louer ensuite à différents locataires jusqu’en 1885[42]Lumberers-png Les rapides et le lac Deschênes On commence tout juste à comprendre que les rapides et le lac Deschênes jouent un rôle important dans les activités de transbordement et le transport fluvial au 19e siècle. La famille Conroy détient un vaste inventaire foncier le long du chemin d’Aylmer menant aussi à leur homestead riverain de L’abord-à-Symmes et leurs luxueux hôtels de ce premier village du canton de Hull sur les rives du lac Deschênes. Il demeure que l’essor aux rapides Deschênes ne fait toujours pas partie des préoccupations de Robert Conroy. Il ne met pas en place les premières industries de cet ancien poste de traite aux rapides Deschênes. C’est à son épouse, Mary McConnell, que reviennent les titres de cette propriété. En fait, William McConnell, le père de Mary, semble détenir les titres du lot 15-a aux rapides Deschênes. Il transfère ses droits à sa fille, Mary McConnell, pour la somme symbolique de cinq shillings, le lot riverain de 100 acres ayant appartenu à son oncle, James[43], avec la permission de son époux et la collaboration de son père, William[44], de son cousin Richard[45], de Charles Symmes et de Murdoch McGillivray[46]. Ainsi, en 1857, Mary McConnell, l’épouse de Robert Conroy, se porte acquéreur du lot 15-a, rang 1, de son oncle James, donnant accès à la scierie et aux routes principales du canton de Hull. C’est sur cette propriété que la famille Conroy y modernise les scieries et le moulin à farine. À son tour, Robert Conroy acquiert le lot 15-b, rang 1, où se trouve cette ancienne scierie et le poste de traite aux rapides Deschênes en 1860.

Bibliothèque et Archives Canada : C-002772 Crédit : BAC, No. Acc. 1989-401-4
Groupe de voyageurs autour d’un camp de feu ca. 1870
Source : Bibliothèque et Archives Canada C-002772
Crédit : Bibliothèque et Archives Canada Acc. No. 1989-401-4

Conclusion de la partie 3 de 4

L’histoire de la famille Conroy à Deschênes laisse entrevoir une autre histoire au moment que s’achève l’âge d’or d’Aylmer. Elle se penche sur le vécu d’une femme d’affaires prenant possession d’une terre au 19e siècle avec la permission de son époux[47]. Mary McConnell doit en temps que veuve assurer l’établissement de la majorité de ses enfants qui sont encore d’âge mineur[48]. « Jusqu’à présent, à Québec comme ailleurs, elles (les femmes) n’ont cessé d’occuper une place importante, mais très souvent discrète, dans la création et la direction d’entreprises de toutes sortes[49]. » Mary McConnell ne se distingue pas des autres femmes d’affaires nées au Bas-Canada. « Outre le soin des enfants, elles jouent un rôle de premier plan dans le maintien des relations familiales et sociales et prennent en charge la conduite des affaires de leur mari[50]. » C’est au décès de son époux, en 1868, que la veuve, Mrs Robert Conroy[51], voit directement au développement des premières industries aux rapides Deschênes. Desrochers ajoute : « Le fait que plusieurs épouses ont été en mesure de prendre la relève au décès de leur mari montre à quel point elles étaient intégrées à la gestion des affaires durant leur mariage[52]. » Ainsi, on attribue habituellement à Robert Conroy ou à ses fils l’essor des premières industries à Deschênes et il se sous-estime alors le rôle de Mary McConnell dans l’essor des industries et d’une ferme prospère faisant partie de l’inventaire de la famille Conroy au moment même que l’âge d’or d’Aylmer amorce son déclin.

[Conroy Lumber Mills] BAC-MIKAN 3371909
[Conroy Lumber Mills]
BAC-MIKAN 3371909
[1] Begin, De l’auberge Conroy à l’hôtel British, p. 24. [2] Gary Blair, Villes et villages de la région de la Capitale nationale, La Commission de la Capitale nationale, Ottawa, 1975, p. 56. [3] Manon Leroux, L’autre Outaouais, p. 113. [4] Louis Taché, Nord de l’Outaouais, p. 204. [5] Ibid. p. 3. [6] Ville d’Aylmer, Symmes Landing, p. 17. [7] Il n’est pas possible pour l’instant de déterminer avec exactitude la date des débuts des travaux de construction de l’hôtel British. [8] Richard Bégin, De l’auberge Conroy à l’hôtel British, p. 26. [9] Richard Bégin, De l’auberge Conroy à l’hôtel British, p. 39 ; Diane Aldred, Aylmer, Québec, son héritage, p.15. [10]Ibid. p.41. [11]Ibid. p. 44. [12] Ibid. p.46-47. [13] Ibid. p. 44. [14] Ibid. p. 44. [15] Reid, The Upper Ottawa Valley to 1855, p. lxvi. [16] Parish register for Saint James’s Church, Hull, Lower Canada, covering the years 1831-1853, Parish Register 429, p. 129. Dans ce registre, on a rayé les mots tavern keeper pour les remplacer par lumberer. Le mot lumberer est utilisé dans ce cas-ci car, il n’y a pas de traduction dans la langue française qui met en évidence le statut élitiste de ces grands marchands et négociants de bois. [17] Diane Aldred, Aylmer Québec, son héritage, p. 13 [18]Ibid., p. 15. [19] Reid, Upper Ottawa Valley, p. 168. [20] David Lee, The Lumber Kings & Shantymen, p. 27 ; Richard M. Reid, Upper Ottawa Valley, p. 168. [21] Richard M. Reid, Egan John. [22] À l’époque, Aylmer a l’ambition de devenir la capitale du Canada. Le premier village indépendant Elle obtient la Cour supérieure du comté d’Ottawa et d’autres services publics. Pourvu d’un dossier bien étoffé, Aylmer qui est alors une communauté effervescente. Les hommes de lois, les arpenteurs établissent une élite des plus influentes sur le plan politique. Il ne faut pas oublié qu’à l’époque, qu’Aylmer est dans le comté de l’Outaouais. Le premier député élu fut Charles Dewey Day, qui aussi, sur la rive nord de la rivière des Outaouais dans le comté de l’Ottawa, ce comté bas-canadien. Leur influence sur le plan politique.   Malgré que Bytown est alors moins développé que le village d’Aylmer, attirant moins l’élite marchande, a deux lignes de chemin de fer qui lient cette communauté à la région au sud du Canada-Ouest et à Montréal. [23] Ibid. [24] D’ailleurs, ce sont les forêts de l’Outaouais qui ont servi à ériger une bonne partie des bâtiments des villes de Buffalo et de Chicago au 19e siècle. [25] Chad Gaffield, L’histoire de l’Outaouais, p. 137. [26] Tiré du Ottawa Citizen du 6 septembre 1851 dans Richard M. Reid , Upper Ottawa Valley, p. 168. [27] Tirées du Ottawa Citizen, c. 68, « An Appeal to Emigrants, September 1851 » dans Reid, Upper Ottawa Valley, p. 167. [28] Richard M. Reid, Upper Ottawa Valley, p.172. [29] Jean-Louis Lapointe, Les grands moments d’Aylmer, p. 26. [30] Tiré du Journal Ottawa Citizen du 6 septembre 1851 dans Richard M. Reid , Upper Ottawa Valley, p. 168. [31] BAnQ, P 154, D6, Inventaire après décès de Robert Conroy, 1879 ; BAnQ, P154, D7, Transfert des propriétés de l’inventaire Mary McConnell à Robert H. et W. J. Conroy, 27 septembre 1880, Lib. B, Vol. 24, Part. 780, No 665 ; BAnQ, P154, D7, Deed of sale, Maria Jane Conroy, John Nelson, Mary Conroy, John S. Dennis jr., James Conroy, Eleanor Conroy, Alfred Driscoll and Ida H. L. Conroy to Robert Hugues Conroy & W. J. Conroy, registered in the County of Ottawa, Vol. 9, A, 7th day of May 1887. [32] BAnQ, P 154, D6, Inventaire après décès de Robert Conroy, 1879. [33] David Lee, Lumberer Kings and Shantymen, p. 22. [34] Ibid. p 26-27. [35] Ibid. p. [36] BAnQ, P 154, D6, Inventaire après décès de Robert Conroy, 1879. [37] Richard Bégin, « Le chemin et le port d’Aylmer : la voie de l’Outaouais supérieur », Histoire Québec, vol. 11, no 1, 2005, p. 3. [38] Selon le témoignage de la pétition opposant James McConnell à Charles Dewey Day (voir article : La famille McConnell-Conroy, catégorie : Bâtisseurs de l’Outaouais) [39] Le chemin Vanier qui autrefois était nommé le chemin Deschênes jusqu’en 1856. [40] David Lee, Logging and Lumbering in the Ottawa Valley : Lumber Kings & Shantymen, p. 13-14 [41] La famille Conroy[41] y vit avec six de leurs dix enfants qui sont alors âgés entre 2 et 13 ans (James, Elenor, Maria, Robert Hugues, Charlotte Anne, William Jackson, et à ce s’ajoute, Ida Louise, Hannah, Mary, Edward Thomson) dans : Leroux, L’autre Outaouais, p. 109 ; La forte natalité caractérise l’ensemble des familles bas-canadiennes, toutes origines confondues, dont les enfants de la classe plus aisée garantissent la perpétuation du nom et de leur fortune, dans : Baillargeon, Brève histoire des femmes du Québec, p. 42. [42] Diane Aldred, Aylmer Québec, son héritage, p.94 [43] BAnQ,  P 154, D7, Transfert des propriétés de l’inventaire Mary McConnell à Robert H. et W. J. Conroy, 27 septembre 1880, Lib. B, Vol. 24, Part. 780, No 665. [44] BAnQ, P 154, S3, D1 / 1, Déposition de l’Affidavit de Murdoch McGillivray faite par Charles Symmes, à Aylmer, 1er juin 1857. [45] Richard McConnell est le fils de l’associé James McConnell. Sa fille, Emily, épouse James Conroy, le fils de Mary et Robert Conroy en 1864. Voir – Parish register for Saint James’s Church, Hull, Quebec, covering the years 1868-1886, Parish Register 447, page 12. BAnQ, P154, D7, Deed of sale, Maria Jane Conroy, John Nelson, Mary Conroy, John S. Dennis jr., James Conroy, Eleanor Conroy, Alfred Driscoll and Ida H. L. Conroy to Robert Hugues Conroy & W. J. Conroy, registered in the County of Ottawa, Vol. 9, A, 7th day of May 1887. C’est dans cet acte de vente qu’Emily McConnell fait reconnaître son droit douaire sur le lot 15-a. Le mot « DOWER » y est clairement énoncé. Cet acte de vente démontre aussi le pouvoir légal des femmes de la famille Conroy à transiger leur bien foncier. Elles ont autant d’autorité dans les transactions immobilières que leurs époux. Aussi, cet acte demeure vague quant aux titres fonciers des Conroy. [46] BAnQ, P154, D1 D1 / 1, Déposition de l’Affidavit de Murdoch McGillivray faite par Charles Symmes, à Aylmer, 1 juin 1857. [47] BAnQ, P154, S3, D1/1, Fonds de la famille Conroy, Acte passé devant R. A. Young, notaire. À Aylmer, le 30 mai 1857, no. 1436 de son greffe, Centre d’archives de l’Outaouais, Gatineau (Québec). [48] Cinq des neuf enfants sont d’âge mineur au décès de leur père Robert Conroy en 1868 : Robert Hugues, Charlotte Ann, William Jackson, Mary et Ida Hannah Louisa. [49] Ibid. [50] Denyse Baillargeon, Brève histoire des femmes au Québec, Boréal, Montréal (Québec), 2012, p. 50. [51] Mary McConnell, veuve de Robert Conroy d’Aylmer. [52] Lucie Desrochers, « Elles ont brassé des affaires », Cap-aux-diamants, la revue d’histoire du Québec, no 95, 2008, p. 16.

La famille McConnell-Conroy

La famille McConnell-Conroy

Mary McConnell, pionnière du canton de Hull (1816-1887)

Les chutes de la Chaudière et le pont sur la rivière Outaouais, Bytown (Ottawa)- Bibliothèque et Archives Canada, c00050, MIKAN 2895118
Les chutes de la Chaudière et le pont sur la rivière Outaouais, Bytown (Ottawa)-
Bibliothèque et Archives Canada, c00050,
MIKAN 2895118

Mary McConnell naît en 1816 sur la ferme familiale de son père, William, situé sur le rang 1 du canton de Hull. Elle grandit dans les environs des chutes Chaudières à proximité du réseau des sentiers des trois portages. Elle est d’ailleurs de la première génération de McConnell à naître dans le canton de Hull au Bas-Canada. Elle épouse Robert Conroy en 1837. Il est inusité de commencer une histoire de famille par l’histoire de la mère. D’ailleurs, Chad Gaffield remarque : « Et même si, dans les documents officiels, le crédit en est généralement attribué au chef de famille, il ne faut pas oublier que la réussite, dans le domaine de la terre et de la forêt, doit être attribuée à la famille tout entière[1]. »

À la lecture des documents légaux du fonds d’archives de la famille Conroy à la BAnQ de Gatineau, nous remarquons rapidement que Mary McConnell joue un rôle pilier dans l’essor des industries à Deschênes. Elle ne se distingue pas des autres femmes d’affaires nées au Bas-Canada. « Outre le soin des enfants, elle joue un rôle de premier plan dans le maintien des relations familiales et sociales et prend en charge, comme les autres, de la conduite des affaires de son mari[2]. » Malheureusement, il reste peu de traces qui prouvent de l’implication de Mary McConnell dans les affaires de la famille Conroy.

Traces du patrimoine de la famille McConnell

Le chemin McConnell et quelques bâtiments historiques le long du chemin d’Aylmer font toujours partie des traces du patrimoine de cette famille pionnière. La maison McConnell, rappelle la croissance d’une zone agricole stable dans le canton de Hull. La famille McConnell est considérée parmi les personnes qui ont contribué à l’essor du canton de Hull. Le bâtiment historique ci-dessous construit vers 1850, est la maison de William H. McConnell, le frère de Mary. Il est un exemple typique des maisons de ferme construites par les descendants des premiers pionniers[3]. Il y a aussi sur le chemin d’Aylmer la maison James McConnell (oncle), et celle de son fils, Richard (cousin de Mary), qui est aussi étroitement associé en affaires à la famille Conroy.

 

Patrimoine de la famille McConnell

Ferme McConnell, Aylmer, Gatineau  MRC : Gatineau  Reférence : 000070  Cote archives : V006/0006  Source : Section gestion des documents et des archives de la Ville de Gatineau  No fiche : 5066 Cette maison de ferme fut construite par William H McConnell fils au cours des années 1850. (Coup de coeur, 2006; Aldred, 1994, p. 146.)
Ferme McConnell,
Aylmer, Gatineau
Reférence : 000070
Cote archives : V006/0006
Source : Section gestion des documents et des archives de la Ville de Gatineau
No fiche : 5066

 

Le cimetière Bellevue (cimetière de l’Ouest ou cimetière Conroy) fait partie de l’inventaire immobilier de la famille Conroy de 1872 à 1902. Cette partie du cimetière est directement en face de la maison McConnell sur le côté sud du chemin d’Aylmer[4]. Le cimetière a maintenant besoin de soin pour lui redonner son air d’antan. Plusieurs pierres tombales sont brisées ou ont besoin d’être remises à niveau.

 

Cimetière Bellevue, chemin d'Aylmer. 2014, Collection Lisa Mibach
Cimetière Bellevue, chemin d’Aylmer.
2014,
Collection Lisa Mibach

 

Brasser les affaires à l’ouverture de la région : la famille McConnell

Le père de Mary, William McConnell, est du groupe d’associés au chef du canton de Hull, Philemon Wright. Il y développe une grande ferme qui est fondamentale aux pionniers qui doivent assurer leur autonomie alimentaire en région de colonisation. Les surplus sont transformés en farine, en pain, en produit laitier ou en animaux de boucherie. Ces biens sont acheminés vers les chantiers forestiers, les postes de traite et les nouveaux lieux de colonisation de la région de l’Outaouais.

Hull, Bas-Canada Vue sur la rivière des Outaouais à la chute des Chaudières.En arrière plan, on aperçoit les fermes riveraines le long du chemin d'Aylmer. (1830) Source : Archives of Ontario, C 10006. Thomas Burrowes fonds. Hull, on the Chaudière Falls [1830].
Hull, Bas-Canada
Vue sur la rivière des Outaouais à la chute des Chaudières.En arrière plan, on aperçoit les fermes riveraines le long du chemin d’Aylmer.
(1830)
Source : Archives of Ontario, C 10006. Thomas Burrowes fonds. Hull, on the Chaudière Falls [1830].

Le rang 1 du canton de Hull

Mary McConnell grandit sur le rang 1 parmi les territoires les plus connus des trappeurs, des voyageurs, des missionnaires, des marchands et des explorateurs naviguant sur la rivière des Outaouais depuis plusieurs siècles. Ces terres sont ponctuées de lieux de portage imposant de nombreux efforts physiques des voyageurs. Il est aussi le seul rang qui a directement accès aux ressources hydrauliques en dehors de la sphère d’influence de Philemon Wright dans le canton de Hull. Les trois frères McConnell (James, William et George) détiennent plusieurs lots sur les rangs 1 et 2, d’ailleurs, le chemin McConnell est tracé à la limite nord du rang 2.

Établissement du canton de Hull
BAnQ, Plan of part of the Township of Hull situated on the northerly side of the Ottawa River in the Province of Lower Canada. Theodore Davis – 1802 – Fonds Ministère des Terres et Forêts; Cote: E21,S555,SS1,SSS1,PH.17A.

 

À la frontière entre la fourrure et le bois

Les McConnell ont le privilège d’avoir accès à la rivière des Outaouais par le lac Deschênes et à deux routes hautement fréquentées (ch. Aylmer et ch. Vanier) en plus du sentier (ch. Rivermead) menant à la tête des rapides Deschênes où se trouve une scierie et des moulins appartenant à un mystérieux Ithamar Day, marchand indépendant de fourrures de l’ancienne compagnie : Compagnie du Nord-Ouest (CNO). D’ailleurs, le verso du 0,05$, le castor, est la marque de commerce de la CNO.

Blason de la Compagnie du Nord-Ouest Montréal, Compagnie fondée en 1783
Blason de la Compagnie du Nord-Ouest,
Montréal,
Compagnie fondée en 1783.

Exploitants des ressources forestières

James et William McConnell ont aussi un magasin-entrepôt sur le lot 14 près des rapides Deschênes où, en 1832, l’arpenteur général du Bas-Canada, Joseph Bouchette, qualifie les lieux comme un des 2 endroits idéaux, l’autre étant Aylmer, pour y installer le premier village du canton de Hull[5]. Ce magasin répond surtout aux besoins des résidents et des voyageurs en transit sur les sentiers entre les trois lieux de portage dans les environs de la chute des Chaudières. D’autant plus, le magasin-entrepôt de James et de son frère, William McConnell profite de l’achalandage sur le lot voisin où il y a une scierie et le poste de traite McGillivray & Day aux rapides Deschênes. Le magasin-entrepôt aux rapides Deschênes et les concessions forestières atteignant le lac Témiscaminque sont à proximité des postes de traite de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH). Cette situation rappelle des rivalités entre les marchands indépendants de l’ancienne CNO de Montréal et de sa rivale britannique, CBH, en plus, que l’exploitation forestière ne se limite pas qu’au bois en Outaouais. D’ailleurs, c’est le gouverneur de la Compagnie de la Baie d’Hudson, George Simpson,  qui affirme : « Every lumber Contractor and Labourer is a Trader.[6]».

Bibliothèque et Archives Canada : C-002772 Crédit : BAC, No. Acc. 1989-401-4
Groupe de voyageurs autour d’un camp de feu ca. 1870
Source : Bibliothèque et Archives Canada C-002772
Crédit : Bibliothèque et Archives Canada Acc. No. 1989-401-4

 

Le bois et la fourrure

Il y a tout pour croire que la fourrure maintient davantage son importance devant la production agricole et l’industrie du bois pour la famille McConnell. William, père de Mary, et son oncle, James McConnell, succèdent à Ithamar Day qui quitte définitivement la région en 1831[7]. Day cède ses droits sur la partie ouest de lot 15, rang 1, à son fils, Charles Dewey Day. Ce dernier devient un des juges les plus marquants de l’histoire canadienne ayant entre autres, participé à la rédaction du Code civil du Bas-Canada et transformé l’instruction publique au Canada. Enfin, les marchands de fourrure laissent peu de traces des transactions menant à de bonnes affaires. Il est alors difficile de suivre leur passage dans la région.

Commission ayant pour mandat de codifier les lois du Bas-Canada (vers 1865). De gauche à droite : Joseph Ubald Beaudry, Charles Dewey Day, René-Édouard Caron, Augustin-Norbert Morin et Thomas McCord. Musée McCord  MP-0000.1815.2
Commission ayant pour mandat de codifier les lois du Bas-Canada (vers 1865). De gauche à droite : Joseph Ubald Beaudry, Charles Dewey Day, René-Édouard Caron, Augustin-Norbert Morin et Thomas McCord.
Musée McCord
MP-0000.1815.2

 

Mary McConnell et les rapides Deschênes

Il demeure que Mary McConnell a vu de près le développement de la fourrure en Outaouais au début du 19e siècle, y étant exposée, directement ou indirectement, depuis sa tendre enfance. Sa proximité avec l’exploitation de la fourrure en Outaouais se confirme aussi par le fait que Mary McConnell ait conservé la pétition opposant son oncle James à Ithamar Day dans ses archives. La pétition mène à la lettre patente donnant les droits de propriété des rapides Deschênes à son oncle, James, et à Charles Dewey Day. Mary McConnell conserve les originaux des deux lettres patentes qui partagent en deux le lot 15, rang 1, canton de Hull aux rapides Deschênes, dont la copie originale de Charles Dewey Day, signée par le gouverneur général en chef, comte de Gosford, est conservée parmi les documents légaux de la famille Conroy. La copie brouillon de la lettre patente de son oncle James McConnell est signée par un l’arpenteur général attitré à la colonisation dans la région de l’Ottawa.

 

Rapides des Chats, près d'Ottawa. ca. 1838-1841. Aquarelle avec raclage sur crayon sur papier vélin. Bainbrigge, Philip John, 1817-1881. BAC- MIKAN no. 2896108.
Rapides des Chats, près d’Ottawa.
ca. 1838-1841.
Bainbrigge, Philip John, 1817-1881.
BAC- MIKAN no. 2896108.

Robert Conroy : L’époux de Mary McConnell

Le jeune irlandais énergétique, Robert Conroy, en compagnie des frères, Edward et Murdoch, McGillivray, tous trois des marchands de Montréal, arrivent à Bytown au début des années 1830[8]. Ces trois hommes célibataires sont aussi de l’ancienne CNO, fusionnée à la Compagnie de la Baie d’Hudson depuis 1821. Edward McGillivray, le premier maire de Bytown, et son frère, Murdoch, sont magasiniers sur la rive nord du lac Deschênes, non loin des rapides (lot 15-b ou lot 16). Murdoch McGillivray opère les entreprises Day & McGillivray qui comprend le poste de traite de Deschênes. Ce dernier est établi dans le canton de Nepean sur la rive sud des rapides Deschênes.

View from Wellington Street, Upper Bytown ca. 1845.  Thomas Burrowes, Painting of a view from Wellington Street, Upper Bytown, ca. 1845. Thomas Burrowes fonds.  Archives of Ontario, C 1-0-0-0-10.
View from Wellington Street, Upper Bytown
ca. 1845.
Thomas Burrowes,
Painting of a view from Wellington Street, Upper Bytown, ca. 1845.
Thomas Burrowes fonds.
Archives of Ontario, C 1-0-0-0-10.

 

Le bois et le canot de traite

Quant à Robert Conroy, il s’établit à Aylmer à la même époque que John Egan avec qui, Conroy se lance dans le commerce du bois. Ainsi, Robert Conroy est en lien étroit avec des marchands profitant de l’essor des ressources forestières en Outaouais. De plus, on sous-estime souvent le rôle de la fourrure dans l’essor économique de l’Outaouais durant la première partie du 19e siècle. Le canot de traite prend pourtant de son importance et le premier groupe de pionniers préfère toujours ce mode de transport pour se rendre à Montréal[9]. C’est dans ce contexte que Robert Conroy vient à épouser Mary McConnell en 1837.

Canots de la Compagnie de la Baie d'Hudson aux rapides des Chats.  1838. Aquarelle avec raclage et touches d'encre noire sur crayon sur papier vélin. Bainbrigge, Philip John, 1817-1881. BAC- MIKAN no. 2895632
Canots de la Compagnie de la Baie d’Hudson aux rapides des Chats.
1838.
Bainbrigge, Philip John, 1817-1881.
BAC- MIKAN no. 2895632

 

 Les pelleteries à l’arrivée de Robert Conroy en Outaouais

Il faut admettre que James McConnell quitte définitivement le domaine des pelleteries, lors du décès accidentel (noyade : rivière des Outaouais) de son fils aîné, aussi appelé James, en 1847. Quant à William McConnell, père, et Robert Conroy, ils entretiennent toujours des liens avec Murdoch McGillivray comme le révèle indirectement McGillivray dans son témoignage de la pétition opposant Charles Dewey Day à James McConnell. Cette pétition s’échelonne s’étire de 1831 à 1857, et se conclut six ans après le décès de James McConnell, père, au moment où Mary McConnell prend possession dans un contexte litigieux la partie est du lot 15 aux rapides Deschênes.

Les débuts de Robert Conroy à Aylmer coïncident aussi à l’essor de la navigation à vapeur sur l’Outaouais. Pour citer Richard Bégin : «Le service de bateaux va littéralement lancer le développement d’Aylmer[10]. » Dans le Nord de l’Outaouais, Louis Taché nous apprend que la jeune communauté riveraine d’Aylmer prend rapidement l’allure d’un port de mer déjà occupée par la Compagnie de la Baie d’Hudson qui fait des bords du lac Deschênes le point de départ de tout l’approvisionnement de ses postes de l’Outaouais[11]. La noce de Mary McConnell et de Robert Conroy associe alors une famille pionnière bien établie à une deuxième vague d’immigration britannique dont plusieurs pionniers sont de l’élite marchande de Montréal.

Robert Conroy, Bibliothèque et Archives nationales du Québec Cote : P137,S4,D11,P21 P137 Fonds Famille Foran S4 Catherine Francis Kearney-Foran Centre : Gatineau Titre, Dates, Quantité Robert Conroy / Ellisson & Co., Quebec . - 1863 - 1 photographie(s) : épreuve "carte de visite", sépia ; 6 x 10 cm Autres formats Numérique. TermeCONROY, ROBERT, 1811-1868
Robert Conroy (1811-1868),
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Cote : P137,S4,D11,P21
Fonds Famille Foran
Centre : Gatineau
– 1863

 

Associations d’affaires de la famille McConnell-Conroy

Nul ne peut douter que l’histoire de la famille Conroy nous permette de comprendre que les bâtisseurs ne travaillent jamais seuls. Cette collaboration entre les pionniers est le pivot fondamental de leur réussite dans le domaine de la colonisation et de l’essor économique de la région sur les deux rives de l’Outaouais. D’ailleurs, Robert Conroy s’associe à des marchands bien connus dès son arrivée dans la région. Loin d’être étranger au commerce des fourrures par son association aux frères McGillivray et les frères McConnell, ce jeune entrepreneur ambitieux ne tarde pas à se joindre en affaires au neveu de Philémon Wright, Charles Symmes, dans des entreprises de transport et de commerce à L’abord-à-Symmes où se trouve une auberge en pierre (Auberge Symmes), un quai de débarquement et un magasin-entrepôt. La vapeur sert bien ces commerçants. D’ailleurs, Charles Symmes est considéré de plein droit comme le fondateur du village d’Aylmer.

 

L'auberge Symmes. Gravure par W. H. Bartlett, 1842.  (Source - collection privée)
L’auberge Symmes. Gravure par W. H. Bartlett, 1842.
(Source – collection privée)

 

Le monde politique

La famille Conroy est aussi étroitement associée à celle de John Egan qui lui est le premier maire d’Aylmer et plus tard, député à l’Assemblée nationale. À partir de 1843, Robert Conroy est échevin sur le conseil municipal et plus tard, maire, d’Aylmer. Quant à Mary McConnell, elle saura capter l’attention de journalistes de l’époque par sa voix que l’on acclame lors de soirées mondaines à l’hôtel British[12].

John Egan, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, P137,S4,D11,P4. Fonds de la famille Foran
John Egan,
Bibliothèque et Archives nationales du Québec,
P137,S4,D11,P4.
Fonds de la famille Foran

 

Essor des entreprises locales

Dès 1839, Robert Conroy se joint à l’élite locale en investissant dans la construction d’un moulin à farine fonctionnant à la vapeur, le Aylmer Bakery[13]. Il déteint aussi des actions dans la Upper Ottawa Steamboat Company qui sert à « Faire essentiellement la navette entre Aylmer et Fitzroy Harbour, sur l’autre rive, et pour servir à des travaux de remorquage[14]. » Une autre entreprise regroupant un groupe d’actionnaires d’Aylmer dont fait partie la famille Conroy est The Bytown & Aylmer Union Turnpike Company qui voit à la reconstruction du chemin d’Aylmer alors relégué aux routes boueuses difficilement carrossables. Cette route est macadamisée[15] et elle relie les auberges Conroy d’Aylmer au pont de l’Union (pont des Chaudières) à Bytown (Ottawa)[16]. Les actionnaires profitent des tarifs des postes de péage pour rentabiliser leur investissement. À l’échelle régionale, Robert Conroy se joint à des hommes d’affaires de la région et de la communauté francophone de Montréal dans l’entreprise du chemin de fer : Montreal & Bytown Railway. Cette ligne de chemin de fer prévoit relier Montréal à Bytown par la rive nord. La malchance et les difficultés financières de cette compagnie à charte conduisent à l’abandon la compagnie à charte responsable de sa construction à la fin des années 1850, n’ayant mis en service que le tronçon entre Grenville et Carillon en 1854.

Pont de l'Union (pont des Chaudières), En bas à gauche de l'image, il est possible de voir la route macadamisée : chemin d'Aylmer.
Pont de l’Union (pont des Chaudières),
En bas à gauche de l’image, il est possible de voir la route macadamisée : chemin d’Aylmer.

 

Patrimoine de la famille Conroy

Ainsi, l’importance du patrimoine de la famille Conroy démontre de la situation économique privilégiée d’une des familles fondatrices du secteur Aylmer à Gatineau. En suivant les traces de leur patrimoine, il est permis de faire un retour sur les moyens que prend la famille Conroy pour brasser les affaires en région de colonisation au 19e siècle. Il se trace alors  une histoire de famille à travers les traces de leur patrimoine. Ainsi, dans le cadre du prochain article de la série Bâtisseurs de l’Outaouais, est de voir aux traces du patrimoine qui nous amènent vers des récits peu connus de l’histoire de Gatineau, de l’Outaouais, du Québec et voir même, du Canada.

 

Scenes on the Ottawa. Lumbering. Views of Aylmer, P.Q. vol.XVIII, no. 10. 152-153
Scenes on the Ottawa. Lumbering. Views of Aylmer, P.Q.
Canadian Illustrated News , vol.XVIII, no. 10. 152-153
La résidence de la famille Conroy, Lakeview, est situé en bas de l’image à gauche.

 

 


 

Notes et références

[1] Chad Gaffield, L’histoire de l’Outaouais, p. 136.

[2] Denyse Baillargeon, Brève histoire des femmes au Québec, Boréal, Montréal (Québec), 2012, p. 50.

[3] Lieux patrimoniaux du Canada, Maison McConnell, Commission de la capitale nationale (CCN). http://www.historicplaces.ca/fr/rep-reg/place-lieu.aspx?id=11396

[4] Diane Aldred, Chemin d’Aylmer, p. 144-145.

[5] Bouchette, Dictionnaire topographique de la province du Bas-Canada.

[6] Michael Newton, « Some notes on Bytown and the fur trade », The Historical Society of Ottawa, Bytown Pamphlet series. No 5, 1991.

[7] The McConnell brothers on the Aylmer Road were a threat to the HBC fur trade with their large lumbering operations which by 1836 had reached the foot of Temiscaming Lake, This family posed a further danger, for the McConnells had always traded furs on the side and when settled in Opinika Lake, just below Lake Temiscamingue, both Cameron and (governor) Simpson were convinced that their new venture was merely a cover for their designs on the Fort’s trade. Not surprisingly, the McConnells succeeded Ithamar Day as owners of lot 15 range 1 Hull Township – The Deschênes Rapids Post – when Day quit the trade in the 1830s. Dans : Michael Newton, « Some notes on Bytown and the fur trade », The Historical Society of Ottawa, Bytown Pamphlet series, No 5, 1991, p. 9.

[8] « We shall endeavour to mention some of the old stock of British extraction, that were among the first pioneers of old Norwester Cork, and Mr. Conroy, of old Bytown, these two came here in 1826. E. (Edward) McGillivray and his brother (Murdoch) came in 1835. » Dans : Andrew Wilson, « A history of old Bytown and Vicinity, now the City of Ottawa. » Daily News, 1876.

[9] « The early settlers had to canoe it to Montreal for their goods. Honeywell is said to have gone and returned alone more than once. This must have taken all a man’s ability to get a canoe up the Rapids with the lightest load, while he waded in the edge of the stream, and kept his frail bark from being broken on the rocks. We can fancy the Moores, Honeywells, McConnells, etc., going in pairs or companies with ease and success, but we pity the man who would do the thing now. » Dans : Gourlay, History of The Ottawa Valley (1896), p. 200.

[10] Richard Bégin, « Le chemin et le port d’Aylmer : la voie de l’Outaouais supérieur », Histoire Québec, vol. 11, no 1, 2005, p. 6.

[11] Louis Taché, Nord de l’Outaouais, p. 203.

[12] Voir : Anson Gard.

[13] Bégin, De l’Auberge Conroy à l’hôtel British, p. 25.

[14] Richard Bégin, « Le chemin et le port d’Aylmer : la voie de l’Outaouais supérieur », Histoire Québec, vol. 11, no 1, 2005, p. 3.

[15] « Les procédés de macadamisage consistaient à poser une fine couche de pierre concassée sur la route afin de former une surface de gravier bien tassé permettant de garder l’assiette de la route sèche et solide en tout temps. » Dans Aldred, Le chemin d’Aylmer, p. 33.

[16] Aldred, Le chemin d’Aylmer, p. 31 ; Ville d’Aylmer, Symmes, p. 15.

L’influence de Robert Conroy en Outaouais

L’influence de Robert Conroy en Outaouais

L’arrivée de Robert Conroy en Outaouais

Dès son arrivée à Aylmer durant les années 1830, Robert Conroy se tisse des liens avec les hommes d’affaires et les propriétaires terriens de l’ouest du canton de Hull. En 1837, Robert Conroy qui est né en 1811 à Magherafell, Comté de Derry, Irlande[1] épouse Mary McConnell. Cette noce associe Robert Conroy à une famille pionnière bien établie dans le canton de Hull. Il n’y a que des hypothèses pour expliquer la venue de Robert Conroy, cependant Gourley affirme que son lieu d’origine est son « calf ground[2] » où l’économie repose surtout sur l’agriculture et les grandes propriétés terriennes réservées principalement à l’élite protestante.

Au cours des années 1830, il s’établit dans la petite communauté riveraine à l’ouest du lac Deschênes sur le lot 21 du rang 2 de Charles Symmes, le neveu de Philémon Wright. Dès son arrivée à Aylmer, Robert Conroy se tisse des liens avec les hommes d’affaires et les propriétaires à l’ouest du 2e rang du canton de Hull. « En louant un hôtel de Charles Symmes [fondateur d’Aylmer] et en épousant une McConnell, Robert Conroy fut dès le début en contact étroit avec l’élite locale naissante[3] ».

À son arrivée dans le canton de Hull, Robert Conroy est témoin du déclin du commerce de la fourrure au profit de l’industrie du bois[4]. Il prend à sa charge l’hôtel de Charles Symmes et l’aménage avec son épouse Mary McConnell. Robert Conroy se place alors en position avantageuse pour entretenir des liens privilégiés contribuant ainsi à l’essor économique et politique de l’Outaouais. En plus de s’associer aux grands propriétaires fonciers et marchands de la famille McConnell, Robert Conroy établit des relations durables avec Charles Symmes et John Egan dans diverses entreprises de développement local allant de la voirie, au transport et au développement manufacturiers.

Au cours des années 1840, il devient évident que la famille Conroy est au centre des activités des aspirants bâtisseurs de l’ouest canadien veillant autant à l’essor de leur communauté qu’à établir un réseau de communication efficace favorisant leur localité dans la Province du Canada. « D’un autre point de vue cependant, les modes d’immigration, de colonisation et d’activité économique donnent lieu à des positions et des priorités distinctes qui, à leur tour, sont aussi bien source de conflit que de coopération[5] ». Les communautés sur les deux rives de la rivière des Outaouais rivalisent hardiment leur position stratégique, économique et politique dans la province coloniale[6]. Les bâtisseurs d’Aylmer se joignent alors en un réseau local et interfamilial pour établir des relations commerciales et politiques avec les marchands et les politiciens de la région de l’Ottawa (Outaouais), de Montréal et de la Grande-Bretagne.

Les débuts d’Aylmer au Symmes Landing

Robert Conroy gère avec Charles Symmes diverses entreprises de la communauté naissante. Une première route est construite en 1820. Elle relie déjà les installations de Philemon Wright au débarcadère naturel paisible du lac Deschênes sur la rivière des Outaouais en amont des trois portages des chutes Chaudières. Les Entreprises Philemon Wright et fils y ont installé la ferme Chaudière sur les rives du lac Deschênes. Les Wright ne priorisent pas le développement de cette grande ferme de l’ouest se concentrant davantage sur leurs installations aux chutes des Chaudières. Au décès de Philemon Wright fils en 1821, Charles Symmes, neveu du fondateur du canton de Hull, se voit confier le développement de la ferme Chaudière.

L’état de la route entre les chutes et la ferme Chaudière laisse à désirer éloignant ainsi Charles Symmes de la sphère d’influence de son oncle Philemon Wright. Ce dernier lui vend le lot 21 sur le 2e rang du canton de Hull menant directement au bout de ce chemin qui conduit vers l’ouest au lac Deschênes. Charles Symmes ne tarde pas à mettre en valeur son lot où affluent de plus en plus les voyageurs et la main d’oeuvre en transit sur l’Outaouais s’embarquant sur les nouveaux bateaux à vapeur au débarcadère qu’on appelle le Symmes Landing («L’Abord-à-Symmes »)[7]. L’acquéreur repaie les sommes exigées pour l’acquitter de sa dette, il obtient la quittance sur son hypothèque de son oncle.

Au cours de la visite de Joseph Bouchette, l’arpenteur général du Bas-Canada dans le canton de Hull en 1825, les environs de l’Abord-à-Symmes retient davantage son attention. Il suggère le site pour l’établissement du premier village du canton de Hull surclassant les propriétés de Philémon de Wright et fils aux chutes des Chaudières et au nord-est du canton de Hull.

Il demeure que Charles Symmes n’est pas seul dans ses entreprises au lac Deschênes à l’ouest du canton de Hull. Il s’associe à des partenaires faisant déjà affaires sur les rives du lac Deschênes. «Bien que Charles Symmes peut être à bon droit considéré comme le fondateur de la ville d’Aylmer, il n’en est pas moins acquis que la Compagnie de la Baie d’Hudson faisait alors des bords du lac Deschênes le point de départ de tout l’approvisionnement de ses postes de l’Outaouais[8] ». Symmes joue alors un rôle important dans le transport de la marchandise vers les postes de traite et les chantiers de l’industrie forestière naissante. Il faut aussi admettre que l’Abord-à-Symmes croît en un lieu de commerce et de transport imposant se maintenant à l’extérieur de la sphère d’influence des Wright dans le canton de Hull.

En 1831, ce futur village obtient le premier bureau d’enregistrement foncier qui est une victoire élargissant son influence et son rôle administratif de la communauté dans le comté d’Ottawa. C’est ainsi que l’on commence à nommer cette localité voisinant la ferme Chaudière des Wright en l’honneur du nouveau gouverneur du Bas-Canada, lord Matthew Whitworth-Aylmer[9]. C’est pendant cette époque qu’arrive Robert Conroy dans la région. Et encore une fois en 1832, la croissance d’Aylmer est remarquée par l’arpenteur Joseph Bouchette qui décrit ainsi le développement de cette communauté:

« A road from Chaudiere Lake, cutting at right angles the Britannia Road, leads into the back settlements, where, of course, no good roads can at present be expected: on this road few settlements are to be seen beyond the 4th and 5th ranges, from which to the 3rd range the farms progressively increase and towards the Chaudiere Lake the road passes apparently through an old-settled country [10] ». 

Symmes ne tarde pas à mettre en valeur sa propriété riveraine et à tracer les premières rues de son établissement. « Travailleur et ambitieux, il comprend l’importance de cet emplacement, à l’endroit où les voyageurs s’embarquent pour naviguer plus à l’ouest sur la « grande route » qu’est la rivière des Outaouais[11] ». Symmes s’associe à Robert Conroy et ils offrent alors des services variés aux voyageurs en transit allant de services de transport, de la vente au détail et à l’hébergement.

« Le peuplement des deux rives de l’Outaouais a fait multiplier le nombre d’embarcations qui empruntaient ce cours d’eau, et le débarcadère est devenu un point obligé pour ceux qui s’aventuraient en amont de la Chaudière[12] ». Ainsi, Aylmer se trouve à l’épicentre du transport entre l’est et l’ouest de la Province du Canada. L’augmentation du transport de la marchandise et du flux migratoire combinée aux succès des entrepreneurs d’Aylmer contribue à attirer des artisans, des journaliers et surtout, d’autres jeunes hommes ambitieux ayant un réseau d’influence avec les marchands du Bas-Canada. « Symmes Landing prit vite figure de port de mer, alors qu’il n’était guère question de Bytown, encore moins de Hull[13] ».

L’établissement de Robert Conroy à Aylmer

L’arrivée de Robert Conroy dans la région coïncide alors avec l’introduction de la vapeur sur la rivière des Outaouais. « Les bateaux à vapeur sillonnent de plus en plus les cours d’eau, commençant d’abord par les routes du lac Deschênes en 1833 et celles du lac des Chats en 1836[14] ». Robert Conroy ne tarde pas à investir dans la Upper Ottawa Steamboat Company[15]. Les premiers bateaux à vapeur permettent le passage d’un nombre croissant d’immigrants et de marchandise approvisionnant les postes de traite de la Baie d’Hudson et les chantiers forestiers en amont des Chaudières. « Ce service de bateaux à vapeur va littéralement lancer le développement d’Aylmer[16] ».

« Le service des vapeurs donna un grand coup d’épaule à l’essor commercial d’Aylmer dans les années 1830 ». L’essor économique repose sur la volonté de son élite à se maintenir au centre du réseau de communication entre l’arrière-pays et l’Est canadien sur la rivière des Outaouais. À l’époque, Aylmer est d’ailleurs un lieu de transit majeur entre l’est et le Nord-ouest américain, et ce, jusqu’à l’introduction du chemin de fer au milieu du 19e siècle. Les commerces et les premières manufactures voient aux besoins des migrants en transit vers l’ouest. Les services de transport se sont multipliés avec la croissance de la population et la permanence de l’établissement le long du chemin d’Aylmer. « La vocation d’Aylmer comme lieu de transbordement de marchandises accéléra son développement. La route d’Aylmer, lien entre Aylmer et Hull, devient l’axe le long duquel s’établirent les premiers colons[17] ».

La vapeur transforme cette communauté en modifiant les services de transport ou en fournissant l’énergie nécessaire aux premières manufactures, car Aylmer ne peut compter sur les forces hydrauliques des eaux calmes du lac Deschênes.  La vapeur contribue ainsi à la croissance des premières manufactures à Aylmer. En 1839, Robert Conroy se joint à John Egan, Charles Symmes et Harvey Parker en investissant dans la construction d’un moulin à farine fonctionnant à la vapeur, le Aylmer Bakery[18]. Les moulins à vapeur locaux fournissent les marchandises nécessaires aux travailleurs sur les chantiers et aux immigrants arrivant de Montréal s’établissant sur les terres du bassin des rivières Rideau et des Outaouais. Les premières scieries se prévalent aussi de cette énergie à Aylmer. « Si la ville d’Aylmer fut à son origine le pied-à-terre des travailleurs de la forêt, elle n’en eut pas moins ses propres scieries dont l’importance n’était alors certes pas discutable[19] ». En 1841, Aylmer compte alors 500 habitants, quatre magasins généraux, autant d’hôtels, deux boulangeries, une tannerie, une école, une église et un journal[20].

Les Auberges Conroy à Aylmer

Robert Conroy s’établit au premier auberge d’Aylmer déjà construit par les Wright pour Charles Symmes en 1822[21]. En 1834, Conroy acquiert son premier homestead[22] comprenant l’auberge d’Aylmer (Symmes), le quai de débarquement et le magasin au débarcadère du lac Deschênes[23]. Robert Conroy exploite ainsi cette confortable auberge de pierre riveraine[24] et il entreprend, la même année, la construction de son propre hôtel, la fameuse Hôtel British [25]. L’Auberge Symmes et l’hôtel British sont toujours des plus anciens bâtiments marquant le début du développement à Aylmer. À elle seule, l’hôtel British compte plusieurs bâtiments, dont l’auberge originale, l’ancienne résidence des Conroy et l’écurie en arrière. En fait, l’ensemble du bâtiment est le plus ancien hôtel canadien exploité à l’ouest de Montréal. Sur place, le voyageur bénéficie des services de location de chevaux et de voitures. À l’hôtel, il s’offre un service de diligences «confortables» opéré par Moses Holt reliant dès 1840 les auberges Conroy à Aylmer au débarcadère de Hull[26].

Alors, en plus d’être partenaire et un actionnaire dans l’établissement des manufactures et des services de transport à Aylmer, les affaires hôtelières placent la famille Conroy au cœur des activités sur l’Outaouais. En tant que Tavern Keeper[27], Robert Conroy élargit son réseau d’influence. L’hôtel British est un haut lieu d’activités dans le village d’Aylmer, servant tantôt de lieu d’affaires, d’église, d’école, de salle d’assemblée au premier conseil municipal et de Cour supérieure du district de l’Ottawa pendant son projet de construction. La famille Conroy vient qu’à cumuler un ensemble imposant de biens immobiliers en Outaouais au 19e siècle[28].

À partir de 1851, le couple Conroy loue leurs opérations hôtelières. La famille Conroy maintient toujours ses intérêts dans leurs hôtels[29] qui demeurent dans leur inventaire immobilier jusqu’en 1902. Les hôtels Conroy sont un endroit de rencontre autant pour les pourparlers économiques qu’un lieu d’actions politiques dans la vallée de l’Outaouais au 19e siècle. Cette situation assure ainsi à la famille Conroy un avenir politique et un rôle économique d’importance dans la région.

L’influence de Robert Conroy dans l’industrie du bois

Au départ Robert Conroy ne détient aucune limite forestière malgré qu’il soit un des grands négociants ramenant de vastes radeaux de bois de l’ouest vers Montréal au cours des années 1840 et 1850[30]. Robert Conroy se hisse graduellement une place en tant que négociant et marchand du bois dès 1842[31]. Il tire profit de concessions dans la vallée de la Madawaska vers 1840 et de la région de Chalk River en 1850 sur la rive sud de la rivière des Outaouais[32]. Il établit un quai d’embarquement à la pointe de Bonnechère, une région développée par son partenaire John Egan. Cette époque coïncide avec le moment où la famille Conroy se concentre davantage sur leurs activités de bois et de transport en Outaouais[33].

À Aylmer, l’importance du bois se perçoit dans les premiers plans illustrant l’évolution de la communauté à sa fondation où « l’utilisation des terrains dans le triangle formé par Front, Eardley et Charles, bien qu’une bonne partie demeure inhabitée à cause de l’empilage de bois qui occupe d’importantes superficies[34] ». Ce triangle est derrière la rue Principale qui mène au débarcadère Symmes. La rue Principale est réservée aux commerces et aux grandes demeures prestigieuses de l’élite sur le chemin Britannia (Aylmer) qui descend du troisième rang vers l’ouest à la limite des premier et deuxième rangs du canton de Hull.

Le chemin Britannia se concentre alors en un lieu de résidence de l’élite de l’Outaouais. «La majorité d’entre eux s’est fait remarquer par son énergie et sa place enviable et a laissé de superbes résidences de pierre qui constituent un caractère spécial et significatif de l’histoire économique de l’endroit[35] ». En 1855, la famille Conroy aménage une des résidences de pierre des plus prestigieuses à Lakeview au coeur du village à une distance de marche de leurs hôtels sur la rue Principale à Aylmer. « Lakeview témoigne de la prospérité de Conroy[36] ».

La famille Conroy obtient leur deuxième homestead sur le lot 15-a, rang 1 dans le canton de Hull en 1857. Ce homestead devient leur lieu de développement industriel et d’innovation technologique mieux connu sous le nom de Deschenes Mills. Robert Conroy acquiert ensuite du Shérif Louis M. Coutlée le lot 15-b sur lequel il y a une ferme et une scierie aux rapides de Deschênes en 1866[37]. Il y a aussi une fabrique de lainage vraisemblablement un moulin à foulon construit par Ithamar Day. Robert Conroy y fait construire un moulin à farine et son épouse Mary y développe une grande ferme dans les traditions de la famille McConnell dans le canton de Hull. L’influence de Robert Conroy dans l’industrie du bois de la région est indéniable malgré qu’il possède peu de titres de concession. Cette notice publiée dans le Aylmer Times, le 22 août 1856 prouve en partie de l’influence de Robert Conroy dans l’industrie forestière de la région de l’Outaouais:

Ran Away (Aylmer Times, 22 August 1856)

Public Notice is hereby given, that Francis Hilaire, Joseph Perrin, Noah Fortier, and M.A Fortier, have absconded from my employment, while the term for which they were engaged, is yet inexpired. Any person HIRING or EMPLOYING THESE MEN, will be prosecuted by the Subscriber.

Robert Conroy[38]

Le développement des réseaux de communication et de transport

Les entreprises Philemon Wright et fils investissent dans la construction de la première route reliant l’est à l’ouest du canton. « En 1818, Wright fit construire une route de Hull à Aylmer, à laquelle il donna le nom de chemin Britannia, sans doute pour affirmer son loyalisme que certains pouvaient peut-être suspecter[39] ». Le décès de Philemon Wright fils en 1821 arrête subitement les investissements à l’ouest du canton de Hull. Cette situation vient aussi bouleverser l’idée de la petite colonie reconnue pour la coopération des associés dans l’établissement du Great Township of Hull au début du 19e siècle. La majorité des Associés sont établis le long des premiers et deuxième rangs à l’ouest des établissement de Philemon Wright. Se plaignant du pauvre état des routes permettant de se déplacer, les concessionnaires de l’ouest du canton s’organisent et ils fondent la société par actions The Bytown & Aylmer Union Turnpike Company [40]. Cette société dont fait aussi partie John Egan, Joseph Aumond, Richard McConnell et Robert Conroy, achève la construction du chemin Britannia (chemin d’Aylmer) menant vers l’ouest du canton de Hull au lac Deschênes en 1850[41].Cette entreprise de voirie relie le débarquement des chutes des Chaudières près du nouveau pont d’Union au village d’Aylmer. Les actionnaires font installer deux postes de péage pour financer les frais de construction et d’entretien de cette route macadamisée et de gravier.

Les routes transversales au chemin Britannia

Les frères McConnell qui s’amènent de Québec avec le groupe d’associés de Wright prennent possession de plusieurs lots sur les rangs 1 et 2. Ils tracent le premier chemin permettant de contourner les trois portages des Chaudières. Ayant plus l’allure d’un sentier, le McConnell Lane[42] traverse les fermes de William McConnell sur le lot 14, rang 1 à l’est pour atteindre la ferme de son frère James McConnell à la limite ouest du lot 15 aux rapides de Deschênes. Ce sentier offre accès au magasin de William McConnell sur le lot 14, rang 1 qui sert surtout aux voyageurs et aux résidents.[43]

Joseph Bouchette écrit au sujet des activités de développement entrepris par les frères McConnell sur le premier rang du canton de Hull dans le dictionnaire topographique du Bas-Canada en 1832 : « lot 14 in the range also affords an advantageous site for a village, which might be built at the junction of two roads, near which there is a saw-mill and also a tolerably well-cultivated farm[44] ». Ainsi, le fils de James McConnell, Richard voyant les limites du réseau de transport à l’ouest des chutes Chaudières, s’associe rapidement au projet de la construction de la route macadamisée.

Jusqu’en 1831, la ferme voisine est développée par Ithamar Day installé sur le lot 15 aux rapides Deschênes. Cette ferme sur le rang 1 est traversée par une route transversale au chemin Britannia tracé à la limite des premier et deuxième rangs du canton de Hull. « Son intersection avec le chemin d’Aylmer formait un carrefour achalandé qui était considéré comme le cœur de la municipalité[45] ». Cette route nommée le chemin Deschênes (Vanier) mène à la scierie et au poste de traite de ce marchand indépendant et ancien négociant de fourrure de la Compagnie du Nord-Ouest.
Le chemin Deschênes partage alors le lot 15, rang 1 en deux à partir des rapides, Il remonte vers le chemin Britannia au nord jusqu’aux pieds des collines de la Gatineau au chemin de la Montagne.

L’intersection des chemins Deschênes et Britannia (Vanier) connaît une affluence qui est d’abord conditionnée par le mouvement migratoire et le déplacement de la main d’œuvre dans le canton de Hull. L’industrie du bois attire plus de 25 0000 à 30 0000 hommes dus à l’accroissement de la demande pour cette matière ligneuse[46]. Louis Taché ajoute que « le premier mouvement de colonisation et d’exploitation forestière se fit dans la direction tant de la ville d’Aylmer que du chemin de la Montagne[47] ». Le chemin Deschênes débutant sur le lot 15, rang 1 du canton de Hull devient alors un lieu marquant l’essor de la colonisation, des voies de transport, du commerce et des premières industries sur la rivière des Outaouais.

Le souci du développement du réseau de communication vise à rentabiliser le transport des matériaux et les provisions nécessaires à la construction et à l’exploitation des ressources (traite de fourrures, industrie du bois, agriculture)[49]. « Parmi ces dirigeants locaux se trouvent également les gros exploitants qui s’engagent à fournir, chaque année, des quantités déterminées de bois d’œuvre et de douves pour les trains de bois en direction de Québec[50] ». Robert Conroy joue aussi un rôle important dans le recrutement de la main-d’œuvre et dans l’établissement des colons sur les deux rives de la rivière des Outaouais[51]. Il est de ces bâtisseurs voulant rendre la région plus attrayante afin de rentabiliser ses divers investissements.

Les mystères du pont de Deschênes

Menacé par le chemin de fer qui s’amène à Bytown par la rive sud de la rivière des Outaouais, Conroy acquiert l’ensemble du lot 15 et le lot 16 sur le rang 1 du canton de Hull et le lot 26, rang 1 du canton de Carleton à Nepean sur la rive sud de la rivière des Outaouais en prévision d’un pont probable aux rapides de Deschênes où il pourrait retirer un revenu des frais de péage en plus de mettre en valeur ses propres industries sur le lot 15 [51,a] . Ces nouvelles acquisitions immobilières de Robert Conroy se trouvent au centre des discussions d’un tracé de chemin de fer sur la rive nord de la rivière des Outaouais. 

« Le 24 octobre 1853, John Egan lance l’idée d’un chemin de fer entre Montréal et Aylmer et adresse une circulaire à cet effet aux intéressés de son comté[52] ». Le chemin de fer permettrait de maintenir le rôle central d’Aylmer en tant que lieu de transit entre l’est et l’ouest canadien en plus d’éloigner les marchands des Chaudières de leur emprise sur le transport du bois. Le chemin de fer ouvrirait ainsi les entreprises des marchands d’Aylmer aux marchés extérieurs. Les marchands ayant collaboré à la construction du chemin macadamisé d’Aylmer reviennent en force avec le projet ferroviaire.

En 1853, une compagnie à charte Montreal & Bytown Railway est formée par des marchands de Montréal dont la majorité est francophone a déjà l’appui de la ville de Montréal, de Terrebonne et du comté du Lac-des-Deux-Montagnes[53]. Leurs efforts sont soutenus par les marchands de bois de la région de l’Outaouais comprenant entre autres Thomas McKay, Nicholas Sparks, Joseph Aumond, John Egan, Charles Symmes et Robert Conroy[54] de Nepean et d’Aylmer.

Le tracé de cette compagnie ferroviaire propose de joindre Montréal à Bytown en passant sur la rive nord de l’Outaouais pour ensuite traverser la rivière près des rapides Deschênes et rejoindre Nepean, ensuite Richmond, Perth et Kingston au Canada-Ouest. À ce point, il y a même des rumeurs qui vantent l’hypothèse que cette ligne pourrait rejoindre l’est et l’ouest du Canada.

Malheureusement, la malchance et les difficultés financières de la compagnie à charte conduisent à l’abandon de la construction de cette ligne de chemin de fer qui n’a réussi qu’à bâtir le tronçon reliant Carillon à Grenville à la fin des années 1850.  Ainsi, l’idée d’un pont entre les cantons de Hull et de Carleton à Nepean ne s’est pas concrétisée. Il demeure que plusieurs tracés de chemin de fer suivent et c’est en 1879 que la compagnie Quebec, Montreal, Ottawa et Occidental Railway est terminée jusqu’à Aylmer[55]. Il se rend aux usines de la famille Conroy installées sur le lot 15-a aux rapides de Deschênes.

Le Pontiac, Pacific Junction Railway (PPJR) prend le relais d’Aylmer jusqu’au comté du Pontiac. « Quelques années plus tard, la vente d’une partie du terrain à la Compagnie de Chemin de fer de Pontiac and Pacific (plus tard la Compagnie Canadien Pacific) et l’établissement de voies ferrées jusqu’à proximité des moulins révèlent un volume de production important dans l’économie régionale ». La PPJR propose de nouveau l’idée d’un pont interprovincial à Deschênes où « il lui sera loisible d’imposer et de recevoir des droits, péages et loyers pour l’usage du pont[56] ». Ce projet de construction propose encore d’unir ainsi le village Deschênes à Nepean à l’ouest d’Ottawa. Il n’y aura aucun pont reliant les deux communautés à Deschênes malgré les nombreuses études et propositions à ce sujet jusqu’en 1980.

Conclusion

À son décès le 5 avril 1868 en tant que maire du village d’Aylmer[57], Robert Conroy est un propriétaire d’hôtels, un négociant de bois, un marchand important en plus d’avoir des parts importantes dans l’établissement du réseau de transport et des meuneries à farine et des scieries aux rapides Deschênes et à Aylmer[58].  À son époque, Robert Conroy est un des hommes des plus influents en Outaouais, il décède la même année que deux autres associés et bâtisseurs d’Aylmer : Charles Symmes et Peter Aylen[59]. Robert Conroy meurt au début de son 2e mandat en tant que maire d’Aylmer en 1868. Cette époque annonce alors une période de profondes transformations dans l’usage des biens fonciers de la famille Conroy et dans la vocation industrielle du village d’Aylmer.


[1] J.M. Gourlay, History of The Ottawa Valley (1896, 2008), new index by Mary Bole (2010), image reprint CD, (Milton, Ontario: Global Heritage Press, 2010), p. 172.

[2] Ibid. ; Je n’ai pu trouver le sens de cette affirmation.

[3] Richard Bégin, L’hôtel British d’Aylmer : au cœur de l’histoire de la Vallée de l’Outaouais », Histoire Québec, Novembre 2004, Volume 10, Numéro 2.

[4] Michael Newton, « Some notes on Bytown and the fur trade », p. 16-17. Michael Newton note que « The McConnell family of Hull withdrew from the fur trade in 1846-1847, so that the HBC now had well-financed « regular opposition », but « petty » traders continued to abound ».

[5] Chad Gaffield, L’histoire de l’Outaouais, Les régions du Québec ; 6, Institut québécois de recherche sur la culture, 1994,  Québec, p.146.

[6] Rivalités politiques et économiques locales : Bytown (Ottawa, Ontario), Nepean (Ontario) sont des villes qui soumettent leur candidatures pour devenir la capitale du siège législatif permanent de la Province du Canada (Canada-Uni). Hull, Buckingham et Ottawa sont ses rivales économiques dans l’industrie du bois. Le complexe des chutes de la chaudière Chaudière entre Ottawa et Hull rivalise avec les entreprises hydroélectriques aux rapides Deschênes.

[7] Ibid.

[8] Louis Taché, Le Nord de l’Outaouais, p. 203.

[9] Manon Leroux,  L’Autre Outaouais, p. 97.

[10] Bouchette, Joseph, Dictionnaire topographique de la province du Bas-Canada, Suvervor-general of Lower-Canada OF THE LIT. AND HIST. SOC. OF QUEBEC, AND CORRESPONDING MEMBER OF THE SOC. OF ARTS AND SCIENCES, LONDON. (LONDON) , Longman, Rees, Orme, Brown, Green, and Paternoster-Row, 1832.

[11] Manon Leroux,  L’Autre Outaouais, p. 97.

[12] Patricia Drew Pommainville, « Les bateaux à vapeur d’Aylmer », Les grands moments d’Aylmer’s Great past times, 150 ans d’histoire à Aylmer Québec 1847-1997, p.30.

[13] Ibid. p. 204. – Aussi voir – 4° — En 1818, l’ancien Ktiné, qui s’appelait Hyatt’s Mill depuis 25 ans, ne mérite plus de porter le nom du fondateur loyaliste Gilbert Hyatt : les notables du hameau, en tête William Bowman Felton, intercèdent auprès du gouverneur du temps pour qu’on rebaptise l’endroit d’un nom qui sonne vraiment londonien, et Lord Sherbrooke condescend à donner son nom à la future métropole des Eastern Townships.5                   Cette simple con- version d’une appellation porte tout un sens. La mode se propage, et plusieurs localités naissantes gagnent aussi de s’orner d’une désignation qui les apparente à la cour royale: Drummondville (en l’honneur du gouverneur Sir Gordon Drummond), Lennox- ville et Richmond (en l’honneur de Charles Lennox, due de Richmond, gouverneur), Charleston (en l’honneur du Prince Régent Charles), Aylmer (en l’honneur du gouverneur Lord Matthew Aylmer), Victoria (en l’honneur de la grande reine), Georgeville (en l’honneur du roi George). Dans – p.236 – « The Eastern Townships Contemplated as a British Stronghold » dans Maurice O’Bready Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 15, n° 2, 1961, p. 230-255.

[14] Gaffield, Chad et al., L’histoire de l’Outaouais, Les régions du Québec ; 6, Institut québécois de recherche sur la culture, 1994,  Québec, p. 110. Robert Conroy est un des premiers investisseurs dans le développement de la compagnie de bateaux vapeurs sur l’Outaouais supérieur connu sous le nom Upper Ottawa Steamboat Company. P154, D6, Fonds de la Famille Conroy, Inventaire après décès de Robert Conroy, 21 juillet 1879, Aylmer, Centre d’archives de l’Outouais, BAnQ.

[15] Robert Conroy détient toujours des parts dans cette compagnie à son décès en 1868. P 154 D6, « Fonds de la famille Conroy, Inventaire après décès de Robert Conroy », Aylmer, 21 juillet 1879, Centre d’archives de l’Outaouais, BAnQ.

[16] Richard Bégin, De l’Auberge Conroy à l’hôtel British, p. 9.

[17] Diane Aldred, Le Chemin d’Aylmer, p. 25.

[18] Richard Bégin, De l’Auberge Conroy à l’hôtel British, p. 25.

[19] Taché, Louis & al. Le Nord de l’Outaouais. Manuel-Répertoire d’Histoire et de Géographie régionales, Le Droit, Ottawa, 1938, p. 206-207.

[20] Lucien Brault, Aylmer d’hier/ Aylmer of Yesterday, Institut d’histoire de l’Outaouais, Aylmer (Québec), 1981, page 26. L’auteur affirme que ces données sont tirées du recensement de 1841.

[21] Richard Bégin, De l’Auberge Conroy à l’hôtel British, p. 24.

[22] P 154 D6, « Fonds de la famille Conroy, Inventaire après décès de Robert Conroy », Aylmer, 21 juillet 1879, Centre d’archives de l’Outaouais, BAnQ.

[23] P 154 D6, « Fonds de la famille Conroy, Inventaire après décès de Robert Conroy », Aylmer, 21 juillet 1879, Centre d’archives de l’Outaouais, BAnQ.

[24] Une publicité dans le journal Bytown Gazette annonce que le Aylmer Hotel (Auberge Symmes) est le village le plus agréable du Bas-Canada le 6 septembre 1837.

[25] Gary Blair, Villes et villages de la région de la Capitale nationale, La Commission de la Capitale nationale, Ottawa, 1975, p. 56.

[26] Richard Bégin, De l’Auberge Conroy à l’hôtel British, p. 24

[27] Parish register for Saint James’s Church, Hull, Lower Canada, covering the years 1831-1853, Parish Register 429, p. 176.

[28] P 154 D6, « Fonds de la famille Conroy, Inventaire après décès de Robert Conroy », Aylmer, 21 juillet 1879, Centre d’archives de l’Outaouais, BAnQ.

[29] La famille Conroy vend leurs établissements hôteliers en 1902. IDENTIFIER DOCUMENT

[30] Traduction libre de cette citation : « Some, such as Robert Conroy, held no limits, but continued to bring rafts to market throughout the 1840s and early 1850s » (Reid, 1990 :lxvi).

[31] Robert Conroy est qualifié de Lumberer dans le registre paroissial de l’Église Saint-James. Parish register for Saint James’s Church, Hull, Lower Canada, covering the years 1831-1853 [Parish Register 429], p. 129.

[32] Richard M. Reid, « Introduction, C. From Timber to lumber », p. 168.

[33] Au baptême de sa fille Charlotte Anne, la mention Tavern Keeper est raillée dans le registre paroissial de l’église Saint James dans Parish register for Saint James’s Church, Hull, Lower Canada, covering the years 1831-1853, Parish Register 429, p. 129.

[34] Pierre-Louis Lapointe, « L’évolution spatiale de la ville d’Aylmer : 1801-1983 », Les grands moments d’Aylmer’s Great past times, 150 ans d’histoire à Aylmer Québec 1847-1997, Musée d’Aylmer et Société d’histoire de l’Outaouais, Hull (Québec), 1997, page 23.

[35] Brault, Lucien, Aylmer d’hier/ Aylmer of Yesterday, Institut d’histoire de l’Outaouais, Aylmer (Québec), 1981, p. 241.

[36] Diane Aldred, Aylmer Québec, Its heritage, son patrimoine, Association du patrimoine d’Aylmer,  Aylmer (Québec), 1989, p. 56.

[37] Guitard, Michelle, Quartier de Deschênes, p. 20.

[38] Richard M. Reid, « Introduction, C. From Timber to lumber », p.172.

[39] Louis Taché, Nord de l’Outaouais, p. 136.

[40] Le 15 novembre 1849, John Egan, Joseph Aumond, Robert Conroy, Richard McConnell s’assemblent à l’hôtel British d’Aylmer et décidèrent de former « The Bytown and Aylmer Union Turnpike Company’ dans l’intention de construire une route macadamisée et de gravier, du pont suspendu Union au quai d’Aylmer » dans Ville d’Aylmer, Symmes Landing, Recherche historique et Évaluation patrimoniale du site de Symmes Landing situé dans la ville d’Aylmer, comté de Hull. Direction du patrimoine du Ministère des Affaires culturelles (Québec) et la division des Affaires publiques de la Commission de la Capitale nationale (Ottawa), 1983, p. 15.

[41] Ville d’Aylmer, Symmes Landing, p. 15

[42] Ibid. p. 54.

[43] Diane Aldred, Le Chemin d’Aylmer, p. 28.

[44] Joseph Bouchette, Dictionnaire topographique de la province du Bas-Canada.

[45] Diane Aldred Le Chemin d’Aylmer, p. 178.

[46] Données tirées du Ottawa Citizen, c. 68 An Appeal to Emigrants, 6 September 1851dans Richard M. Reid, « Introduction, C. From Timber to lumber », The Upper Ottawa Valley to 1855, The Champlain Society in Cooperation With The Ontario Heritage Foundation, Carleton University Press, Ottawa, 1990, p. 167.

[47] Louis Taché, Le Nord de l’Outaouais, p. 203.

[48] Diane Aldred Le Chemin d’Aylmer, p. 178.

[49] Ville d’Aylmer, Symmes Landing, Recherche historique et Évaluation patrimoniale du site de Symmes Landing situé dans la ville d’Aylmer, comté de Hull. Direction du patrimoine du Ministère des Affaires culturelles (Québec) et la division des Affaires publiques de la Commission de la Capitale nationale, 1983, p.12.

[50] Gaffield, Chad et al., L’histoire de l’Outaouais, Les régions du Québec ; 6, Institut québécois de recherche sur la culture, 1994,  Québec, p. p.134.

[51] Richard M. Reid, « Introduction, C. From Timber to lumber », The Upper Ottawa Valley to 1855, The Champlain Society in Cooperation With The Ontario Heritage Foundation, Carleton University Press, Ottawa, 1990, p. 168. Journal Ottawa Citizen ,1851  Annonce retenue par Richard M. Reid démontre « The following gentlemen, resident in the neighbourhood will furnish on application all needful advice and information ; and they have undertaken to give the fullest direction to Emigrants, whether their subject be labour or settlement ; – Joseph Aumond, Esq. Bytown ; Messrs, C & R McDonnel, do ; John Egan & Co., Aylmer ; John Foran, Esq., Robert Conroy, Esq., do ; (…)

[51,a] P 154 D6, « Fonds de la famille Conroy, Inventaire après décès de Robert Conroy », Aylmer, 21 juillet 1879, Centre d’archives de l’Outaouais, BAnQ.

[52] Lucien Brault,  « Aylmer d’hier / of yesterday », 1981, p. 140-141

[53] Jacques Lacoursière, Histoire populaire du Québec, Volume 3, ‪Les éditions du Septentrion, Sillery (Québec), 1996, p. 127 ; Richard M. Reid, « Introduction, C. From Timber to lumber », The Upper Ottawa Valley to 1855, p. lxxxvii-lxviii.

[54] Ibid, tiré du « Ottawa Citizen, 5 apr. 1851 » par Richard M. Reid.

[55] Lucien Brault, Aylmer d’hier, p. 141 ; Chad Gaffield, Histoire de l’Outaouais, p.112.

[56] Lucien Brault, Aylmer d’hier, p.142.

[57] Les témoins de l’acte de décès : Alfred Driscoll, (gendre et époux d’Eleanor Conroy, fille de Mary McConnell et Robert Conroy) et Robert Hugues Conroy, avocat et négociant de bois à Aylmer (fils de Mary McConnell et Robert Conroy). Parish register for Christ Church, Aylmer, Canada West, covering the years 1864-1869 [Parish Register 432].

[58] Anson Gard, Pioneers of the Upper Ottawa and Humors of the Valley – With new Introduction by Ryan Taylor (1999), image reprint CD (Milton, Ontario: Global Heritage Press, 1999, 2009),  page  88.

[59] Robert Conroy, Charles Symmes et Peter Aylen sont aussi enterrés au cimetière de l’Ouest situé sur le chemin Britannia (Aylmer). Dans « 1868 A NOTABLE YEAR », Anson Gard, Pioneers of the Upper Ottawa and Humors of the Valley – With new Introduction by Ryan Taylor (1999), image reprint CD (Milton, Ontario: Global Heritage Press, 1999, 2009), p. 124. Le cimetière de l’Ouest devient la propriété de Mary McConnell dès * . VOIR – Inventaire après décès Mary McConnell.

Sur les traces des cartes anciennes pour percer les mystères de la “Maison Grise” à Deschênes

Sur les traces des cartes anciennes pour percer les mystères de la “Maison Grise” à Deschênes

La plus vieille maison du secteur Deschênes se trouve au 84, chemin Vanier, Gatineau. L’emplacement de la maison est difficile à retracer à partir de son numéro actuel de cadastre 3115286 sur le Registre foncier du Québec en ligne(1). Habituellement, c’est à partir de ce numéro que l’on peut retracer l’historique des propriétaires et des occupants d’un bien immobilier. « Selon le système de la publicité foncière, toute transaction immobilière devient publique par son inscription dans le Registre foncier du Québec »(2). Il demeure que le registre foncier arrête les inscriptions de la propriété du 84 Vanier sur le lot 15-a en 1901. Les traces du bâtiment ne sont pas perceptibles, et il n’y a aucune référence nous laissant croire que la maison grise existe cette année-là. D’autant plus, les numéros de cadastre ne réfèrent pas au 84, chemin Vanier. Il reste aussi de voir  à trouver le lot 15-a, rang 1 sur une carte du canton de Hull pour en apprendre à son sujet.

Mystérieuse maison à la porte d’entrée d’un ancien village industriel à Gatineau

Ces mystères sur les listes d’enregistrement foncier conduisent à poursuivre les recherches sur les origines de ce vieux bâtiment. Les débuts du lot 15 soulèvent à son tour de nombreux litiges dû au système d’enregistrement foncier du 19e siècle. Il faut admettre que la recherche des titres fonciers de la maison suit des pistes d’investigation très intéressantes mais n’offre jamais de réponse concrète sur les premiers propriétaires de cette maison mystère à la porte de l’ancien village de Deschênes à Gatineau. Les titres d’enregistrement nous amène au lot surnommé le R & W Conroy Homestead à l’ouest des rapides Deschênes et il est occupée par des industries et au nord, il y a la ferme laitière prospère de Mary Conroy. Le lot 15-a sur lequel est construit la maison grise selon le registre foncier fait alors partie de l’héritage immobilier des Conroy d’Aylmer.

La 1re génération McConnell à l’ouest de la Chaudière

L’historique du lot 15, rang 1 du canton de Hull retourne aux marchands de fourrure et à l’établissement des associés dans le canton de Hull en 1802. James McConnell obtient un bail de concession sur ce lot de 200 acres au 1er rang lorsqu’il s’associe à Philemon Wright. L’histoire de la première génération McConnell à Deschênes et les mystères de la maison au 84, chemin Vanier demandent de faire un grand usage des cartes et des plans anciens du 19e siècle. Le lot 15 est situé au bas de la carte sur la rive nord de l’Outaouais. Le rectangle l’identifiant porte une couleur grise.

Les cantons sur la
BAnQ,
A Plan of the New Townships on the Grand or Ottawa River, Joseph Bouchette, 1815, Numéro d’identification : 2663014, cartothèque, Centre d’archives de Montréal.

Origines des lots 15-a et 15-b

C’est en voyant à retracer l’historique de ce vieux bâtiment longtemps teint en gris d’où son surnom maison grise que les intrigues à son sujet se multiplient. Cette propriété foncière nous plonge dans une quête pour trouver des preuves écrites relatant sur les origines du bâtiment. L’enquête oblige à observer minutieusement un grand nombre de cartes pour suivre l’évolution des subdivisions du lot 15 au 19e siècle et les numéros de cadastre au 20e siècle.

Maison grise avant les rénovations de 2010-2012, Collection Lisa Mibach, Association des résidents de Deschênes, Gatineau.
Maison grise avant les rénovations de 2010-2012,
Collection Lisa Mibach,
Association des résidents de Deschênes, Gatineau.

 

La première subdivision d’une terre du clergé au rapide Deschênes

L’histoire de la maison grise relate l’histoire d’un bien foncier inscrit de façon obscure dans l’Inventaire après décès de Robert Conroy et de Mary McConnell. Le lot 15, rang 1 se trouve à la limite sud du canton au rapide Deschênes. Il est entrecoupé des chemins Vanier et Aylmer. Le chemin Vanier mène à cette pointe de terre bien discrète entre Aylmer et Hull au rapide Deschênes. Le chemin Vanier relie aussi les collines de la Gatineau au nord à la rivière des Outaouais au sud du rang 1 sur le lot 15. Ce chemin vient aussi qu’à partager le lot 15-a du lot 15-b. Quant au rapide, il lie physiquement le canton de Nepean et à celui de Hull. Le lot est alors sur la frontière politico-économique des Canadas du 19e siècle. Il est aussi une terre du clergé selon les plans de Joseph Bouchette (ci-dessus) et de Theodore Davies (ci-dessous). La carte de Davies témoigne que le lot est partagé en deux. La subdivision est soulignée en jaune sur cette copie de la BAnQ. William McConnell vend le lot 15-a à sa fille Mary et à son époux à peu de frais(3).

Établissement du canton de Hull
BAnQ,
Plan of part of the Township of Hull situated on the northerly side of the Ottawa River in the Province of Lower Canada.
Théodore Davis – 1802
Fonds Ministère des Terres et Forêts;
Cote: E21,S555,SS1,SSS1,PH.17A,
Cartothèque,
Centre d’archives de Montréal.

Les cadastres, les lots et l’enregistrement foncier au Québec

Les cadastres posent problème pour retracer l’historique de la maison grise. Son numéro de cadastre nous amène au lot 15-a, rang 1 du canton de Hull et dans la réalité, il se découvre que le 84, chemin Vanier est réellement sur le lot 15-b. Ainsi le registre foncier du Québec ne retrace pas les premiers propriétaires du 84, chemin Vanier. D’autant plus, la liste d’enregistrement foncier obtenu à la Commission de la capitale nationale (CCN) indique que le 84, Vanier est enregistré originalement aux lots 15-a (James McConnell) et 15-b (Charles Dewey Day).

Au fil du temps, le bâtiment en arrive à être situé sur le  lot 15-b-142.  « Les Conroy vendirent les premiers lots du village au cours des années 1880"(4). Il y a des traces montrant que le lot 15-b est subdivisé en premier et s’introduisent alors les cadastres 74 et 42 entre 1884 et1887(4). Alors, l’origine exacte de cette maison ne peut toujours pas être confirmée. Il n’y a pas de plans cadastraux appropriés pour définir davantage le lot 15-b 142 selon l’énoncé historique de Michelle Guitard (5).

Témoignage de Mrs Guy Routliffe sur le Bâtisseur de la maison, 1973

Cependant, il y a le témoignage de Madame Guy Routliffe qui parle des origines de la maison grise. Ce témoignage en dit long sur les difficultés d’identification des bâtiments sur leur lot à Deschênes.

« In October, 1926, I went to live with my husband and his mother at 29 Main Street, Deschênes (aujourd’hui le 84, chemin Vanier). The houses in the village had been numbered by an Ottawa department store for the convenience of their delivery men. Before we left in 1949, a more systematic numbering system was set up, and I believe the number is now 77 ».

« We lived with Mrs Valentine Routliffe until her death in 1935, and continued to live in the house until the end of 1949. A year later, Guy (Routliffe Sr) sold the house to Mr. Seguin from Hull».

« Guy’s father, Valentine Routliffe built the house about 1881. It was of excellent workmanship and material, massive, straight, and strong, with large rooms. It must be one of the oldest buildings in the village. Mr. Seguin converted it to a duplex, dividing the rooms and removing the veranda: it looks quite different now, inside and out ».

Communauté chrétienne Saint-Médard, 50, Programme Souvenir 1923-1973, Dimanche le 10 juin, 1973, Deschênes (Québec), page 20.

Énigmes derrière un numéro de cadastre : Authentification de 1903

En 1901, le lot 15-a fait partie d’un litige juridique et financier. Le 84, chemin Vanier est alors de l’inventaire immobilier de la famille Conroy à Deschênes. Une grande part du lot 15-a est vendue à Louis Simpson de la Bank of Ottawa, mais il n’y a aucune trace qui nous permet de confirmer le propriétaire du lot 142 sur le 15-b. On peut percevoir le nom Routliffe dans l’enchaînement des transactions. Le suivi de ces transactions foncières et les actes notariés gagnent en authenticité lorsqu’on regarde attentivement le plan d’assurance-incendie Goad de 1903 où la présence du bâtiment historique se prouve sur Hull & Vicinitiesfeuille 200, village Deschènes. La présence est authentifiée, mais il n’y a aucune trace nous permettant d’identifier son lot avec certitude à cette date.

Deschènes Quebec, Feuille 200, Hull & Vicinity, Que Plan d'assurance-incendie Goad 1903-1908 Bibliothèque et Archives Canada, No MIKAN 3823774
Deschènes Quebec, Feuille 200,
Hull & Vicinity, Que
Plan d’assurance-incendie Goad 1903-1908
Bibliothèque et Archives Canada,
No MIKAN 3823774

De plus, malgré cette présence sur la carte de 1903, une autre carte tracée en 1904 pour le rôle d’évaluation municipale ne montre pas notre maison mystère. Cette absence pose alors un autre problème d’authentification du numéro de cadastre du lot sur lequel est construite la maison.  Il est difficile d’affirmer qui sont les occupants de la maison à la fin du 19e siècle et au début du 20e, car sans le numéro de cadastre de l’époque, il n’est pas possible d’utiliser le registre d’évaluation municipale. Ce registre dresse la liste des occupants et des propriétaires des lots de la municipalité. Cette information n’est pas accessible sans avoir le numéro de cadastre de la maison grise au début du 20e siècle. Est-il alors possible que cette maison est exemptée des taxes municipales ? Rappelons que  le rôle d’évaluation sert à fixer le montant des taxes à payer pour la propriété.

Que dire d’une source de revenu supplémentaire sur un lot industrialisé ?

Divers documents légaux trouvés dans le Fonds P154 de la famille Conroy décrivent vaguement le lot 142 près des rails de la Hull Electric Company et de la Canadien Pacifique. Le vocabulaire est vague, et il porte à confusion dans les différents documents écrits. Les bâtiments sont sommairement décrits par des qualitatifs qui ajoutent à la confusion. Les mots  Store et Garden posent d’ailleurs des problèmes d’identification des bâtiments dans les différents documents légaux de la famille Conroy. Ces mots sont nombreuses fois utilisés avec des descriptions variées d’un document à l’autre.

Le Store est une des raisons des premiers litiges sur le lot 15. Il mène originalement à une discorde  entre les associés McConnell du canton de Hull et le marchand de fourrure Ithamar Day, anciennement de la Compagnie du Nord-Ouest. Le partenaire de ce dernier, Murdoch McGillivray, témoigne que le Store est le magasin McGillivray & Day depuis 1821. Le Store était à une certaine époque un poste de traite. Ce bâtiment est identifié près des rapides sur une carte ancienne tracée en 1821. McGillivray est l’ancien partenaire d’affaire d’Ithamar Day, et il vit à Nepean sur la rive sud de l’Outaouais. Il a toujours des intérêts qui lui reviennent pour son partenariat avec Ithamar Day. McGillivray change son témoignage dans la pétition de 1857 qui l’oppose aux McConnell-Conroy (7). Il revendique ses droits sur le Store. Cet établissement commercial est aussi mentionné dans l’inventaire après décès de Robert Conroy (8).  Cependant dans l’inventaire après décès de Mrs Robert Conroy, le Store se trouve subitement sur le lot 14.

Garden est un autre mot qui alimente les mystères de la maison grise. Il est répété à plusieurs reprises dans les inventaires après décès de Robert Conroy et Mary McConnell ainsi que dans l’acte notarié de l’affaire de faillite des entreprises R&W Conroy en 1901. Le terme Garden est couramment utilisé par la bourgeoisie marchande dans les actes notariés du 19e siècle. Ce mot est fréquemment utilisé pour décrire une terre spéculative. Dans l’inventaire après décès de Robert Conroy, le Garden comprend un vaste espace de 200 acres situé près des rapides de Deschênes. Le 200 acres est souligné malgré qu’en 1857, l’acte notarié mentionne que le lot 15-a est de 89 acres. Le Garden représente-t-il alors les terres industrielles de cette famille bourgeoise d’Aylmer. En 1901, le notaire des entreprises R & W Conroy localise le Garden à la limite d’une clôture sur une terre cédée au Canadien Pacifique près de la maison sur le Homestead (9). L’acte notarié explique que le Garden est une terre compromise et à risque. On demande à plusieurs reprises de voir et de maintenir ses droits de propriété des Gardens dans les actes notariés des Conroy. Ce terme est aussi à la source de divers malentendus du patrimoine immobilier sur le R&W Conroy Homestead (10). Au début du 20e siècle, le Garden se limite au sud des voies ferrées.

La quête pour l’identification d’un simple numéro de cadastre témoigne heureusement d’un grand pan de l’histoire de Gatineau. Les nombreuses cartes, les actes notariées, les listes d’enregistrement fonciers et les rôles d’évaluation municipaux ne nous permettent toujours pas d’authentifier les premiers propriétaires de la maison grise. Sans cette connaissance, le 84, chemin Vanier ne peut avoir un nom qui immortalise son passé dans le village de Deschênes et qui détermine avec certitude ses origines.

Les grands pins disparus de la pointe Deschênes,Collection Lisa Mibach, octobre 2012
Les grands pins disparus de la pointe Deschênes,
Collection Lisa Mibach, octobre 2012

Mémoire immatérielle et le patrimoine immobilier caché à la maison au 84, Vanier

Alors, résumons l’histoire cachée sous le bâtiment historique au 84, chemin Vanier.

Originalement, le lot 15, rang 1 du canton de Hull est une terre concédée à James McConnell. Il la loue à sous-bail à Ithamar Day, un marchand de fourrure indépendant de l’ancienne Compagnie du Nord-Ouest (CNO). Un litige s’amorce avec une pétition pour une demande de concession des terres. Ces pétitions sont une série de documents composés de témoignages et de plans d’arpentage. Elles permettent de voir aux étapes et aux démarches nécessaires à l’obtention des lettres patentes qui est en soi un acte de concession à un individu émis par la Commission des terres de la Couronne. dans le cas de la terre du clergé au rapide Deschênes, le lot 15 est subdivisé en deux. La Couronne cède les droit à chacun des pétitionnaires. Pour arriver à faire valoir leur droit de propriété, ils déposent une pétition témoignant de leurs démarches de la mise en valeur et démontrant qu’ils occupent les lieux.  Il demeure que malgré la lettre patente émise en 1836, le litige du lot 15 revient à chaque génération de la famille McConnell-Conroy au 19e siècle comme le prouve les documents écrits du Fonds P 154 de la famille Conroy.

À l’émission de la lettre patente, il est spécifié que le lot 15-a (partie est) revient à James McConnell et que le lot 15-b (partie ouest) appartient à Charles Dewey Day dont son père Ithamar a mis valeur et développé au début du 19e siècle. Les lettres patentes pour les lots 15- et 15-b sont obtenus en 1836 au creux de la Guerre des Shiners et au début des troubles du Bas-Canada. La lettre patente de Charles Dewey Day est signée par le  le Gouverneur Gosford. Celle de James McConnell est signée par le Commissaire des terres du clergé et aucune copie signée du gouverneur n’a encore été trouvée.

Des origines du lot 15, il peut se comprendre que McConnell est aussi un marchand de fourrure indépendant anciennement de la CNO (Newton, 1991 :22-23). Il revendique l’occupation d’Ithamar Day sur son lot disant qu’il n’a jamais eu sa permission de le développer. Il y a aussi Ithamar Day revendiquant l’établissement d’un poste de traite, d’une ferme, des scieries et d’un moulin à foulon au rapide de Deschênes. Le magasin McGillivray & Day est sur ce lot. Ithamar Day quitte la région en 1832, laissant à son fils Charles Dewey le soin de poursuivre le long processus de concession des terres.

Ce processus se complexifie quand Mary McConnell (Madame Robert Conroy) achète de son père William le lot 15-a pour 5 shillings. La famille McConnell-Conroy d’Aylmer vient qu’à obtenir les droits de propriété sur le lot 15-a en 1857 malgré que l’achat date de 1851. Ce lot devient le côté industriel de Deschênes.  Leur principal témoin des McConnell est Charles Symmes, fondateur d’Aylmer et marchand-fournisseur pour la Compagnie de la Baie d’Hudson sur l’Outaouais supérieur. Ce couple vient qu’à acquérir le lot 15-b qui longe le côté ouest de la rue Principale (chemin Vanier). C’est de ce côté que viennent s’installer un grand nombre d’ouvrier travaillant aux Deschênes Mills. Au décès de son époux en 1868, Mary Conroy gère le bien foncier familial avec son fils aîné, James qui vient qu’à s’installer au Manitoba et plus tard au Colorado avec son épouse Emily McConnell. Ses fils Robert Hughes et William Jackson moderniseront les industries de Deschênes et introduiront l’hydroélectricité en Outaouais en plus des tramways de la Hull Electric Company.

Mrs Robert Conroy devient propriétaire des deux lots 15 en plus du lot 14 et 16. Les droits sur McGillivray & Day Store reviennent aussi la hanter et d’autres cas litigieux qui l’amènent à écrire des lettres personnels à différents députés à l’Assemblée nationale et à la Chambre des communes. Il se perçoit alors que cette propriété comporte toujours certains litiges. De plus, elle fait de nouveau affaire avec cet ancien marchand de fourrure comme le témoignent les Inventaires après décès de Monsieur et Madame Conroy. Il demeure que sur le tracé du chemin de fer de la Pontiac & Pacific Junction Railway Company de 1888, c’est le nom Mrs Robert Conroy qui paraît sur l’ensemble des lots sur lesquels s’élèvent à Deschènes Mills sur le R&W Conroy’s Homestead près des rapides. Son fils, Robert Hugues Conroy, maintient son barreau malgré qu’il ne pratique pas le droit depuis sa graduation de McGill. Il défend une cause litigieuse entourant les biens fonciers des Conroy jusqu’à sa mort au début du 20e siècle.

Mystères du 84, chemin Vanier

De retour à la maison au 84, chemin Vanier, il est étonnant qu’elles soulèvent autant de questions sans pour autant être en moyen d’y répondre. Les mystères soulèvent de nombreuses pistes d’investigation au sujet de ce vieux bâtiment.

  • Premièrement, est-elle cet ancien magasin McGillivray & Day Store à la limite du chemin Vanier comme l’affirme Murdoch McGillivray dans son témoignage en 1857 l’opposant à la famille Conroy ?
  • La maison grise est-elle construite en prévision de l’arrivée du chemin de fer en 1879 ou des tramways en 1896?
  • Alors son bâtisseur ne serait-il pas tout autre que Monsieur Routliffe d’Aylmer, mais qui en serait le propriétaire ?
  • Et si elle est construite en 1878 comme l’affirme la ville de Gatineau, serait-elle intégrée au bien immobilier des industries se préparant aussi à accueillir le chemin de fer près à leurs usines en 1879 ?
  • Est-elle construite comme siège social de la Hull Electric Company à Deschênes ?
  • Et quelles sont les relations entre les femmes et les biens fonciers en territoire de colonisation au 19e siècle ? Il est fascinant de découvrir les liens que peuvent entretenir Marie McConnell (15-a) et Charles Dewey Day (15-b) dans cette affaire d’enregistrement foncier entre 1850-1857. Rappelons que Charles Dewey Day est un acteur important dans la mise en place de la législation sur l’enregistrement foncier en 1841, et qu’il est l’unique codificateur du droit de commerce du Code civil du Bas-Canada de 1866.

Le patrimoine immobilier de Gatineau et le 84, chemin Vanier

Toujours est-il, que cette maison n’est pas citée et elle ne fait pas partie du patrimoine immobilier de Gatineau. Elle n’a aucune protection. Pourtant, les recherches en cours démontrent que la maison remonte à une autre histoire des débuts de Gatineau au rang 1 du canton de Hull.

À son sujet, Manon Leroux explique que « (…) au no 84, chemin Vanier, une vieille maison de bois sur laquelle des recherches sont en cours. Elle daterait peut-être de 1860 (et serait la plus ancienne du secteur) et pourrait être liée aux Conroy. Les dernières rénovations ont altéré son aspect historique »

Source : Manon Leroux, L’Autre Outaouais, Guide de découverte du patrimoine, Société Pièce sur Pièce, Gatineau (Québec),2012, p. 122.

Plus de 200 ans d’histoire au pied de la maison du 84, chemin Vanier

  • Retenu comme bâtiment historique (1975, Parc Canada) et (1982, CCN)
  • Traite des fourrures et les marchands de l’Outaouais
  • L’établissement du canton de Hull sur le premier rang
  • Histoire des premiers associés du canton de Hull (Famille McConnell)
  • Essor industriel à Gatineau (Deschênes est le deuxième lieu industriel en importance dans le canton de Hull en 1903)
  • Essor du réseau de transport en Outaouais, première route nord-sud de l’Outaouais, les Entreprises Conroy et le R & W Conroy Homestead
  • Histoire du droit foncier au Québec en Charles Dewey Day et Mary McConnell-Conroy
  • Histoire des femmes pionnières en Outaouais en Mary McConnell-Conroy
  • Les premières familles du village de Deschênes

Alors, continuons à partager sur ce vieux bâtiment qui est inscrit sur la liste des bâtiments historiques inventoriés par Parc Canada et de la Commission de la capitale nationale du Canada. Il ne reste qu’à faire valoir sa teneur dans l’histoire du Québec et l’histoire de la ville de Gatineau afin qu’elle soit protégée et qu’elle fasse partie du patrimoine immobilier de la région. Cette maison risque de disparaître ainsi que la mémoire immatérielle qui maintient vivante son histoire…

Ainsi, l’étude des cartes anciennes et d’actes notariés a été essentielle pour dresser un historique d’un vieux bâtiment litigieux dont on ne veut pas trop révéler de son histoire… Toutes les pistes ont été revues à plusieurs reprises. Il manque toujours ce document mystère qui pourrait confirmer avec exactitude sa valeur patrimoniale et surtout, son premier propriétaire. La maison grise demeure toujours une énigme à résoudre aujourd’hui. Une étude archéologique des lieux pourrait aussi confirmer la valeur patrimoniale de ce vieux bâtiment qui perd peu à peu ses airs anciens…

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La maison au 84, chemin Vanier à Gatineau, hiver 2000,
Gatineau, Association des résidents de Deschênes,
Collection Lisa Mibach, 2000.
Le patrimoine des cartes anciennes : cette pointe de terre au sud du canton de Hull

Le patrimoine des cartes anciennes : cette pointe de terre au sud du canton de Hull

Les débuts de l’Outaouais et la carte des cantons au nord de la « Grand River » en 1802

L’arrivée de Philemon Wright sur l’Outaouais marque les débuts du développement du Canton de Hull. Il est le leader du canton et il entreprend un projet de colonisation à l’Ouest de Montréal. L’histoire de ce projet de colonisation nous provient principalement des récits et des mémoires de Philemon Wright.  Il est possible de vous familiariser avec ce récit des débuts de la colonisation sur l’Outaouais dans le cahier numéro 5 de la Revue Asticou sur les publication en ligne du Réseau du patrimoine de Gatineau. L’ article « LES ORIGINES DU CANTON DE HULL D’APRÈS PHILÉMON WRIGHT » éclaire aussi sur la vision de ce leader de canton et de ses projets de colonisation au chute des Chaudières.

La lecture de ce texte nous permet de faire quelques constats intéressants sur la vision de la nouvelle colonie imaginée par Philemon Wright. Il y a alors lieu de croire que Philemon Wright cherche à établir une colonie autonome et autosuffisante. La priorité réside dans le développement des grandes fermes le long de l’Outaouais. La préoccupation de l’autosuffisance de la colonie l’empresse à installer des industries qui fournissent l’essentiel des produits nécessaires à la jeune colonie. L’industrie du bois demeure une préoccupation secondaire selon le récit de Wright. Ce récit fait peu référence à la présence autochtone sur le territoire. Il demeure que ce mémoire rédigé originalement par Philemon Wright soit une des sources les plus utilisées pour relater les débuts de l’histoire en Outaouais.

Il demeure qu’en dehors de ce récit, l’histoire se fait parcimonieuse. Il est  difficile de dépeindre un portrait précis de la contribution des Associates et des enjeux litigieux dans le développement du canton de Hull. Il devient encore moins évident lorsqu’un litige entre les Associates et le Leader survient dans le processus de l’appropriation des titres de propriété dans le canton. Un des litiges concerne l’attribution des titres du lot 15 sur le rang I du canton de Hull. Ce lot renferme de nombreux avantages géographiques et économiques. L’histoire de ce litige devient de plus en plus compliquée, car elle se situe pendant une grande période de transformation dans le système d’enregistrement des titres fonciers.

L’Outaouais est un territoire menant vers l’ouest et le nord par cette grande route commerciale déjà en usage dès le début du régime français. Le tracé des éléments géographiques paraissent sur la carte de Samuel de Champlain dès 1613. Les chutes Chaudière, les rapides et le lac de Deschênes sont déjà des éléments représentés sur les cartes dessinées pendant le régime français. La perte de l’emprise territoriale des Algonquins sur la rivière figure aussi sur ces cartes. Les terres se morcellent et les réserves des terres Jésuites sont déjà identifiées sur les rives de l’Outaouais dès le début du 18e siècle. Il se dessine les terres seigneuriales qui leur sont attribuées. La seigneurie Papineau est d’ailleurs  originalement une de ces terres seigneuriales acquise sous le régime britannique par le parlementaire Joseph Papineau, père de Louis-Joseph.

Dès 1791, il s’installe un nombre croissant de postes de traite sur les rives de l’Outaouais. La Compagnie du Nord Ouest prend charge des anciens permis de traite du régime français. L’occupation revient aux détenteurs de permis de traite de fourrure de cette nouvelle compagnie de fourrure sous le régime britannique. Michel Filion nous informe sur le processus du passage de la dominance britannique dans la traite de fourrure. Il nous explique que l’attribution de ces permis va au plus offrant. Cette situation vient qu’à voir le voyageur canadien perdre peu à peu son emprise sur le commerce de fourrure avec l’arrivée des Américains après 1783.

Plusieurs des négociants de permis deviennent des marchands prospères de Montréal. Un de ces marchands vient qu’à s’établir sur le lot 15 du rang I du canton de Hull en 1821. Le marchand originaire du Vermont, Ithmar Day opère le poste de traite Day & McGillivray aux rapides et au portage de Deschênes selon Michael Newton. Ithmar Day y construit aussi un magasin et une scierie selon les témoignage de Murdoch McGillivray dans le litige sur le lot 15 de 1824. Il relate que son partenaire a installé un magasin et une scierie aux rapides. Il se révèle alors une possibilité que la maison au 84, chemin Vanier soit le magasin de Ithmar Day. Ainsi, ce litige sur le lot 15 nous amène à examiner de plus près les premiers plans du canton de Hull afin de comprendre l’issu du mystère sur le lot 15 du rang I du canton de Hull.

Au-delà de la traite, il faut attendre le 19e siècle avant que les terres de l’Outaouais se développent. Cette période voit aussi des changements profond en cartographie. Le régime britannique impose son propre système d’arpentage et son mode de distribution des titres de propriété. Il réserve des terres pour le clergé britannique. Ce n’est qu’en 1802 que les cantons au nord de la rivière des Outaouais soient arpentés, recensés et dessinés sur un plan. Ce plan rend officiel l’appartenance du canton de Hull au Bas-Canada. C’est aussi sur cette carte que paraît le nom de Philemon Wright sur une carte d’enregistrement foncier officiel dans le Bas-Canada.

Les cantons sur la "Grand River" en 1802

A Plan of the new townships on the Grand or Ottawa River, 1813 (1)

Le plan de Joseph Bouchette 

Le plan de Joseph Bouchette situe les cantons sur la rive nord de la « Grand River » en 1802. Il indique clairement l’appropriation de Philemon Wright du Canton de Hull. Son nom y est inscrit au nord des chutes Chaudières. Le plan nous familiarise aussi avec la géographie et le partage des lots dans le canton de Hull.  Il se remarque que le canton se situe à l’extrémité sud de la rive nord de l’Outaouais. Le rang un est celui le plus au sud du canton. Il est aussi remarqué que l’établissement de Philemon Wright est à la hauteur du troisième rang. Elle nous permet de repérer pour la première fois le lot 15 qui est grisonné au sud ouest des chutes Chaudière. Vous n’avez qu’à « cliquer » sur l’image ci-dessus pour voir ces détails inscrits sur cette carte révélatrice des débuts du peuplement sur l’Outaouais en 1802.

Le développement du canton de Hull

Le plan des cantons sur l’Outaouais affirme que Philemon Wright prend possession du canton de Hull en 1802. Il est le leader et il recrute les Associates qui entreprennent avec lui l’établissement et le développement du Canton de Hull. Philemon Wright est fortuné et originaire de Wilborn Massachusetts. Il n’a pas le portrait d’un loyaliste fuyant les représailles des révolutionnaires lors de la guerre de l’indépendance américaine en 1776. Il est plutôt un des révolutionnaires combattant l’armée britannique pendant cette guerre. Son récit nous révèle aussi sa préférence à recruter des Canadiens pour travailler dans ses entreprises.

Le plan de la « Grand River » montre le lot 15 sur le rang I du canton de Hull. Il l’identifie par la zone colorée en vert. Ces zones identifient les terres réservées au clergé protestant de langue anglaise. C’est cependant dans la carte du Canton de Hull de Davis produite en 1801-1802 que se révèle d’autres mystères sur cette ancienne terres du clergé. Le lot 15 porte un numéro d’enregistrement. Il y a alors un détenteur de titre sur cette propriété à l’extrémité sud du canton. Il est aussi à remarquer que cette terre est toujours une terre du clergé et que la moitié du lot est colorié en jaune.

Établissement du canton de Hull

Établissement du canton de Hull

Plan d’une partie du canton de Hull, Théodore Davis, 1802 (2)

Cette carte nous apprend  au sujet des personnes qui s’associent à Philemon Wright. Le nom de James McConnell est présent à plusieurs endroits sur le plan. Les noms Wright sont aussi très présents. Ce plan nous permet de voir le nom des différents Associates qui prennent possession des terres du canton de Hull. Certains associés ne développe pas leurs terres et les vendent plutôt au plus offrant. C’est le cas de Charles Symmes qui acquière un peu plus tard les titres de la propriété à l’ouest du rang II. Cette terre conduit aussi à l’extrémité ouest du lac Deschênes. Il y fait construire un lieu d’embarquement qui marque les débuts de la vapeur sur l’Outaouais. Il demeure que Charles Symmes, malgré qu’il soit un neveu par alliance de Philemon Wright, devient un acteur important tenant tête au leader du canton. Ce litige nous ramène encore au lot 15  en 1836. Charles Symmes témoigne que William McConnell, le fils de James, a acheté des titres de la propriété pour cinq shillings et qu’il y exploite un scierie jusqu’à sa mort. C’est ainsi que Mary McConnell obtient la moitié du lot 15. Charles Dewey Day obtient une lettre patente de son lot 15 b) . Il faut aussi comprendre que le poste de traite demeure sur la propriété de Day malgré qu’il ne l’opère pas personnellement.  Il devient un avocat bien en vue dans le comté de l’Ottawa et un juge à la cour supérieure du Bas-Canada.

Cadastres dans le comté de Hull en 1928

Le partage du lot 15 rend difficile à identifier la localisation de la maison au 84, chemin Vanier. C’est avec la carte du comté de Hull de 1928 qu’il est possible de déterminer l’emplacement cadastral des lots 15 a) et 15 b) sur le rang I.  C’est aussi avec cette carte que j’ai pu déterminer l’emplacement de la maison du 84, chemin Vanier. Elle n’est pas sur le lot 15 a) comme le sous-entende les fonds d’archives et les titres de propriété trouvés au registre foncier. Il demeure que cette carte est essentielle pour revenir aux rôles d’évaluation de la municipalité de Deschênes et pour situer les propriétaires des titres fonciers à Deschênes avant 1920.

Carte de comté du Québec à l’échelle de 1:63 360 . Hull ,  Carte du comté de Hull et Gatineau (Source : Collection numérique de la BAnQ, Cartes et plans, Numéro d’identification : 2669884_01)

Carte de comté du Québec à l’échelle de 1:63 360 (3)

Ainsi, les faits commencent à se mettre en place pour le parcours du patrimoine. Il demeure que le propriétaire et les usages de la maison au 84, chemin Vanier sont encore inconnus. Il reste encore les plans du tracé de la ligne de chemin de fer de la Pontiac Pacific Junction Railway Company à venir. Ces plans révèlent les lots, les titres des propriétaires et les bâtiments sur le tracé de la ligne de chemin de fer. Il ne reste qu’à souhaiter que la maison soit sur ces plans et que son propriétaire soit identifié. Si c’est le cas, nous pourrions savoir si la maison du 84, Vanier est ce magasin construit à l’époque de Ithmar Day ou bien, si elle est construite pour les fins du chemin de fer vers 1878. J’attends les images numérisées cette semaine.

Si ces plans ne peuvent pas révéler le mystère, il ne reste alors à exploiter les fonds d’archives de la Compagnie de la Baie d’Hudson, ceux des cartes de l’Outaouais sous le régime français et ceux du Compagnie du canadien pacifique. Ainsi, l’histoire de l’énigme du lot 15 nous amène à découvrir l’histoire du peuplement depuis l’établissement des postes de traite à l’ouest de Montréal jusqu’au début des réseaux de transport sur la rive nord de l’Outaouais.

Sources des cartes et plans

(1) Collection « cartes et plans » de la bibliothèque et archives nationale du Québec, Joseph Bouchette, A Plan of the new townships on the Grand or Ottawa River, 1813, Bibliothèque et Archives nationale du Québec, Numéro d’identification : 2663014

(2) Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Fond : E21,S555,SS1,SSS1,PH.17, A Plan of part of the Township of Hull situated on the northerly side of the Ottawa River in the Province of Lower Canada. = 5B04-3-14 / Théodore Davis . – 40 chaînes : 1 po, 1802, Centre des archives de Québec.

(3)  Collection « cartes et plans » de la bibliothèque et archives nationale du Québec, Hull , Carte du comté de Hull et Gatineau, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Centre d’archive de Montréal, Numéro d’identification : 2669884_01

Vers les origines du village de Deschênes à Gatineau

Les débuts de l’occupation du canton de Hull

Mes recherches se sont prouvées fructueuses et riches cette semaine. J’ai d’abord vu au développement du canton de Hull et à l’attribution des terres dans le système de Leader & Associates au début du XIXe siècle. J’ai appris énormément sur les débuts du canton de Hull et sur la vision coloniale de Philemon Wright, le leader du canton et un homme ayant été un révolutionnaire originaire du Massachusetts lors de la guerre de l’Indépendance américaine .

Philemon Wright établit ses entreprises coloniales à la chute des Chaudières en 1800. Il a la vision d’une colonie autosuffisante à une distance navigable des grands centres du Bas-Canada. Le développement agricole est la première préoccupation de Philemon Wright. Il  développe les premières industries qui assurent l’autonomie de la jeune colonie. Il implante à sa façon le modèle de développement du système colonial américain sur l’Outaouais. Il n’est pas seul dans cette entreprise coloniale. Il amène plusieurs colons et il recrute des ouvriers pour défricher et construire les bâtiments de sa nouvelle colonie. Il encourage l’établissement de grandes fermes le long de l’Ottawa. L’industrie du bois est une activité secondaire dans la nouvelle colonie de Wright. Cette activité occupe les ouvriers en hiver et les garde dans la région pendant cette lente saison froide.

L’histoire des débuts du canton de Hull permet de comprendre l’ampleur de l’octroi des terres en Outaouais. Le système des associates alloue des lots de 200 à 100 acres selon certaines conditions d’achat à ceux qui veulent établir et exploiter une grande ferme. Les premiers à obtenir ces privilèges sont les membres de la famille s’associant à Wright. En 1826, les travaux de construction du canal Rideau attirent un très grand nombre d’immigrants irlandais. Dans le canton de Hull, plusieurs des Irlandais protestants choisissent de démarrer leurs entreprises le long du premier et deuxième rang menant vers le nouveau village d’Aylmer.

En échange des titres de propriété, l’associate doit développer ses terres et en exploiter les ressources naturelles. C’est le moyen de conserver ses droits de propriété et son enregistrement des biens fonciers. Il n’est pas tenu de faire lui-même tous les durs travaux, il peut engager les ouvriers s’il en a les moyens. C’est de ce processus qu’est né le village de Deschênes sur le lot 15 du rang un dans le canton de Hull.

Mystères révélés dans le fond P154 Conroy

Le processus d’acquisition des terres aux pieds des rapides de Deschênes se trouve dans les registres des droits fonciers du fond Conroy. Ces registres renseignent entre autre sur cette famille influente de la région. Les techniques développées par les généalogistes d’origine britannique m’ont permise d’explorer le système d’enregistrement foncier pour retracer l’historique des lots. Les généalogistes anglophones utilisent beaucoup les registres fonciers pour construire les arbres généalogiques. Ils n’ont pas le privilège des registres paroissiaux pour effectuer leurs recherches.

De ces connaissances, il m’est maintenant possible de lire les cartes du canton de Hull. Il est aussi plus simple de dépouiller les archives contenues dans le fond Conroy qui racontent l’histoire de cette famille d’Aylmer. Le fond P 154 Conroy détient plusieurs des originaux des enregistrement fonciers sur ce lot. Ces enregistrements nous permettent aussi de suivre l’évolution du lot 15 où se développe le village de Deschênes.

Vers les origines du village des Deschênes

L’historique du lot 15 du rang un dans le canton de Hull est clairement exposé dans le fond P154 de la famille Conroy au centre des archives de l’Outaouais. Il contient une longue série de titres de propriété sur le lot 15. Il est possible d’y relever des faits sur l’historique du lot. Il permet de valider que la moitié du village de Deschênes est sur les lots de la famille Conroy.

Une partie du lot 15 offre l’accès aux terres menant aux rapides de Deschênes. Les rapides sont sur des terres de clergé selon la carte présentée à la page 346 de l’article de Bruce Elliot. Les titres du lot reviennent à James McConnell qui est un grand fermier d’origine irlandaise et de religion protestante. James McConnell est bien établi dans la région. Ces titres sont officiellement enregistrés sur le plan du canton de Hull. James McConnell y développe une scierie selon les témoignages de Charles Symmes. L’autre propriétaire est Ithamar Day, un marchand de fourrure pour la Compagnie du Nord Ouest et un révolutionnaire américain aussi bien établi dans la région. Ses titres ne sont pas écrits sur la carte du canton selon les références consultées.

Le fond révèle que Charles Symmes, le fondateur du village d’Aylmer et le neveu de Philemon Wright, témoigne des avoirs de James McConnell dans la cause litigieuse entre Ithamar Day et Mary McConnell, la fille et une des héritières des terres de son père. Le litige concerne les titres de propriété sur le lot 15. Charles Symmes favorise McConnell en spécifiant les intérêts, les avoirs et le montant de cinq shillings (un dollar aujourd’hui) payé pour les terres.  Il confirme ainsi les titres de propriété de Mary McConnell aux rapides de Deschênes.

L’emplacement du lot a aussi des avantages géographiques intéressants. Les rapides sont suivis de la partie est du lac Deschênes sur la rivière des Outaouais. Il faut rappeler qu’en 1831, le bateau vapeur est utilisé sur le lac Deschênes. Ainsi, l’extrémité sud du lot 15 conduit aux derniers rapides d’une longue série de portages. Il est aussi l’aboutissement d’un sentier de portage partant de la chute Chaudière à Hull. Ce sentier devient aussi la première route difficilement carrossable pour atteindre la voie navigable vers l’ouest sur l’Outaouais. L’intérêt pour la navigation sur l’Outaouais diminue qu’en 1848.

Les ruines de la centrale hydroélectrique aux rapides de Deschênes, Québec vers 2010

Source : Collection Lisa Mibach

Village aux pieds du Lac Deschênes

Source :  Collection Lisa Mibach

Le calme du lac Deschênes sur la rivière des Outaouais

Source : Collection Lisa Mibach

L’essor du village d’Aylmer

À l’ouest du lac Deschênes, il y a le Symmes Landind, des services de bateau vapeur et les hôtels à l’extrémité ouest du rang un. Charles Symmes y achète 200 acres sur les rives ayant une vue prenante sur l’Outaouais supérieure. En 1821, Symmes fonde le premier village du canton de Hull qu’il nomme Aylmer en l’honneur du Gouverneur général du Bas-Canada. Il forme aussi une compagnie de transport avec différents partenaires locaux pour financer l’achat du Lady Colborne, le premier bateau vapeur à naviguer sur l’Outaouais supérieure. « Symmes’ Landing devient bientôt un point de départ pour l’approvisionnement des postes de la compagnie de la Baie d’Hudson en Outaouais »(CRAO, Charles Symmes). Symmes fait aussi construire des hôtels pour les voyageurs.

Robert Conroy, ce patriarche d’origine irlandaise et de religion protestante opère le premier hôtel d’Aylmer appartenant à Charles Symmes. Robert Conroy construit plus tard son luxueux Hotel British qui devient rapidement un lieu très fréquenté des voyageurs vers l’ouest. Robert Conroy marie Mary McConnell, l’héritière du lot 15 sur le rang un du Canton de Hull. Il hérite ainsi des Deschenes Mills et de la scierie du beau-père. Il est à se demander si Charles Symmes a aussi tout intérêt à ne pas voir se développer la navigation à partir des rapides de Deschênes à quelques kilomètres en amont du Symmes Landing.

L’énigme du poste de traite

Le litige sur les droits de propriété de Mary Conroy, née McConnell nous mène à Ithamar Day à la mort de James McConnell. C’est lors du passage des titres de propriété que le lot 15 est partagé en deux. Il y a dès lors le lot 15 a) et le lot 15 b)  séparés par la rue Principale de Deschênes (aujourd’hui le chemin Vanier). Ithamar Day cherche à garantir ses droits de propriété. Une carte démontre l’emplacement des deux nouveaux lots. Il obtient gain de cause comme le témoigne les titres des propriétés et le plan de lot 15.

Le titre de propriété d’Ithamar Day révèle aussi une autre histoire intéressante en elle-même. Ce personnage nous pousse d’abord à vouloir connaître davantage le propriétaire peu connu du lot 15 b). Dans le texte de Hanson Guard, Pionners of Upper Ottawa écrit en 1905, nous apprenons que Day est un marchand de fourrure pour la Compagnie du Nord-Ouest. Il est aussi le père de Charles Dewey Day, juge à la cour supérieure du Bas-Canada.  La concession de Day, père, est aussi signée par le Gouverneur Gosford et Charles Dewey Day. L’Encyclopédie biographique du Canada nous renseigne ensuite que le gouverneur Gosford et le juge Charles Dewey Day entretiennent certains liens. Charles Dewey Day est aussi étroitement lié à la rébellion de 1837-1838 et au jugement de la pendaison des patriotes.

Ithamar Day vient qu’à repartir dans l’ouest. Il me reste à voir à son rôle dans la traite des fourrures dans Deschênes. Je sais qu’il fait construire un poste de traite et un magasin général, mais pour le reste, c’est toujours nébuleux. Il y a même certains indices qu’il est le responsable du développement de la scierie. Il y a une référence à un bâtiment Day & McGillivray aux rapides Deschênes en 1831 dans le livre de Bruce Elliot « Nepean, « The City Beyond». La vocation de ce bâtiment n’est toujours pas connu. Nous savons toutefois que Day prend régulièrement son canot et il va voir son partenaire de l’autre côté du lac Deschênes à Nepean. Il faut aussi ajouter que les terres de Day sont celles où se construisent les premières habitations , les premiers commerces, l’église et l’école du village de Deschênes.

Village de Deschênes en 1927

Photographie aérienne du village de Deschênes, 3 juin 1927, Photo no 30, Crown Copyright, NAPL, photo HA277-77, Fonds du secteur territoire de la Ville d’Aylmer-Urbanisme, Ville de Gatineau  A012

Cette image offre une vue sur la rue principale de Deschênes en 1927. Cette rue traverse le village jusqu’aux rapides. Il est à remarquer que les installations industrielles sont sur la partie est du village sur les anciennes terres de James McConnell. Les commerces et les habitations sont sur le quadrilatère à l’ouest de la rue principale sur le lot 15 b), anciennement les terres de Ithamar Day. 

Ainsi commence une autre quête pour retracer les intérêts de Day sur le lot 15 b). Bruce Elliot m’a aussi mise sur une piste intéressante au sujet de la traite des fourrures sur les lots des environs. Il y a aussi beaucoup de témoignages de la présence des autochtones autour du village jusqu’à la Deuxième guerre. Il est mention de leur présence dans les rôles d’évaluation de 1917. La traite de fourrures mérite alors notre attention. Il y a des recherches plus approfondies dans les ouvrages de Michael Newton de la Commission de la capitale nationale à Ottawa (CCN). Cette piste est très intéressante à explorer. Je souhaite que le temps me permettra d’aller y jeter un coup d’oeil.

Les héritières

En ce qui a trait à James McConnell, le Fond Conroy nous explique l’appropriation des titres de propriété par l’héritière Mary Conroy. Elle hérite des rapides, de la scierie et de l’inventaire du bois scié de son père. Deschênes connaît alors une courte croissance de population entre 1820-1830. Nul ne sait pourquoi cette activité est freinée. Hanson Guard soulève aussi cette question lors de son passage à Deschênes vers 1905. Il explique que nul des premiers habitants ne sont présents pour témoigner du premier essor industriel aux rapides de Deschênes. Cependant, le développement industriel croit rapidement avec les entreprises de Robert H et William Conroy près des rapides à la fin du XIXe siècle.

Ce sont aussi les actes notariés qui me permettent de mieux saisir l’histoire industrielle du village. Ces actes permettent de voir aux différentes installations dans le village au XIXe siècle et au début du XXe. L’affaire de la faillite des frères Robert Hughes et William Conroy contribue d’ailleurs à faire l’inventaire de leurs titres et de leurs entreprises à Deschênes en 1901. J’ai réussi à trouver des cartes qui me permettent d’ailleurs à délimiter le R&W Homestead et les lots du village de Deschênes.

Il demeure que Mary Conroy, née McConnell est responsable du maintient des titres sur la propriété du lot 15 du rang un à la mort de son mari. Elle voit à assurer la prospérité et à garantir les biens fonciers de la famille.  Ce qui m’amène à la plus belle trouvaille qui est le rôle de toutes les femmes Conroy dans les entreprises et le maintien du patrimoine familial .

Ces femmes sont au coeur des affaires familiales. Elles garantissent les droits de propriété quand les entreprises sont troubles. Il faut dire que les grands barons du bois connaissent des hauts et des bas dans l’industrie. Les femmes Conroy assument aussi les risques financiers dans les aventures en hydroélectricités des frères Robert Hugues et William Conroy. Les femmes Conroy deviennent alors les principales actionnaires dans les entreprises de leurs frères. Ces entreprises viennent qu’à prendre plusieurs noms tels que la Deschenes Electric Company, la Capital Power Company et la Hull Electric Company. Ainsi, les femmes Conroy assurent une certaine pérennité des entreprises et des propriétés familiales. Je n’ai toujours pas trouvé de traces des Conroy et leur implication dans la Pontiac & Pacific Railway( PPR), la Canadian Pacific Railway (CPR) et la Hull Electric Railway(HER). Il est important de suivre aussi cette piste, car  c’est sur le lot 15 a) que s’installe la gare, la première jonction de la PPR et le garage de wagons de tramway de la HER.

Le garage à wagon de la Hull Electric Railway au début du XXe siècle. 

Droits d’utilisation et d’auteur inconnu. 

Le garage de wagon de tramway de HER permet de situer le voisin de face de la maison sur le homestead du lot 15 à l’entrée de la rue Principale de Deschênes vers 1900. L’image numérisée m’a été remise par une amie. Je cherche présentement les droits d’utilisation pour cette photographie. 

Les rôles d’évaluation fonciers du village de Deschênes

Il me reste à voir aux rôles d’évaluation fonciers du village de Deschênes aux archives de la ville de Gatineau. Ils sont peu nombreux, mais maintenant, je suis prête à les interpréter. Ces rôles d’évaluation sont une source primaire importante. Les données offrent un bel éclairage sur la composition de la population du village et sur les différentes entreprises qui s’y trouvent.

Je souhaite de voir comment s’est développé le village sur les terres de McConnell et de Day. Les rôles d’évaluation me permettent aussi de voir à ce qui advient des terres de Day et qui portent plus tard le nom de village de Deschênes bien avant son incorporation en 1923.  Ainsi, je serai prête à lire les minutes qui amènent le village à s’incorporer à cette même date. Ces textes sont tous en anglais m’a expliqué monsieur Raymond Ouimet que je rencontre fréquemment au centre des archives de l’Outaouais.

Roland Tremblay et un inconnu sur le lot 15b dans le village de Deschênes vers 1930.

Source : Josée Paquin, Photo de la famille Miville-Deschênes et Tremblay de Deschênes, Québec

Les mystères de la maison sur le Homestead du lot 15 a)

La seule déception réside dans mes recherches sur la maison du Homestead que j’ai faites à la dernière session. La maison demeure un flou historique, car elle n’est pas sur les terres Conroy selon les sources consultées aux archives. Cette maison conserve trop bien ses secrets. Le registre des biens fonciers me réfère à cette propriété sur le lot 15 a) du rang un à South Hull en 1901.

Il demeure que la maison sur le homestead est sur le lot 15 b) en face du garage de wagon de la Hull Electric Railway. Elle est sur le côté ouest de la rue Principale (maintenant Chemin Vanier). C’est le garage qui se trouve en face sur le homestead R&W Conroy’s. Le village est alors connu sous le nom de Deschenes Mills. Les mystères de Day pourraient-ils révéler ceux du lot 15 b) et ceux des titres de propriété de la maison sur le homestead à la porte d’entrée du village de Deschênes ?

À partir des plans de la ville, la maison est alors sur le mauvais côté du chemin Vanier. Elle n’appartient pas à R & W Conroy selon les traces dans le fond Conroy. Est-elle plutôt la maison sur le homestead de Ithamar Day ? Il est certain qu’elle n’est pas sur les anciennes terres du clergé. La maison de style western qui paraît dans les prises de vue aérienne du village en 1928 nous amène aussi à vouloir percer les mystères derrière la maison sur le homestead du lot 15 b) sur la rue principale de Deschênes (chemin Vanier aujourd’hui). Sur cette photo, il est possible de voir face au garage de wagon à tramway, la maison sur le homestead sur le lot 15 b). Sa voisine de droite maintenant disparue est d’une style farwest aussi présent sur d’autres habitations dans le village de Deschênes.

Le registre foncier du Québec me pointe vers cette maison sur le lot 15 a). Elle m’en cause des problèmes cette maison. Il demeure qu’elle permet de pousser l’enquête davantage, et cette maison contribue à enrichir la quête du patrimoine sur le parcours que je souhaite réaliser. J’ai relevé des faits très intéressants, mais plus on en apprend à son sujet, plus la maison du Homestead sur le lot 15 pose problème. Elle a même tendance à paraître et à disparaître sur les différents plans du village.

Photographie aérienne du village de Deschênes, 21 mai 1928
Photographie aérienne du village de Deschênes, 21 mai 1928

La maison sur le homestead du lot 15b) lors des inondations à Deschênes en 1928

Photographie aérienne du village de Deschênes, 21 mai 1928
Photo no 33, Crown Copyright, NAPL, photo HA30-26
Fonds du Secteur territoire de la ville d’Aylmer -Urbanisme
Ville de Gatineau
A012

Sur la photographie, la maison sur le homestead est isolée du village de Deschênes avec le débordement du ruisseau juste à sa gauche en 1928. 


Vue de derrière de la maison sur le homestead durant les rénovations en 2010-2011

Source : Collection de Lisa Mibach

Il a été impossible d’obtenir une copie des documents brochés sur la maison du homestead lors des travaux de rénovation. Le présent propriétaire a aussi refusé tout accès à sa propriété lors des rénovations en 2010-2011. La maison rénovée est présentement à vendre. Elle a une valeur marchande de 750 000$ sur la marché immobilier présentement. La maison n’est pas dans l’inventaire du patrimoine de la Ville de Gatineau. Elle n’y a alors aucune garantie que cette maison fasse partie de l’inventaire des biens immobiliers de la ville malgré qu’elle a été construite depuis au moins 1878. Ces documents disparus seraient-ils les titres de la propriété pouvant nous référer au propriétaire original de la maison ?

La suite de la quête de la maison sur le Homestead R & W Conroy

Il demeure qu’en voulant connaître l’origine de la maison sur le Homestead, l’enquête s’approfondit sur les entreprises Conroy à Deschênes. Mon amie Lisa Mibach a pris contact avec des gens intéressés aux origines et au patrimoine industriel de Deschênes. Ils l’ont référé vers des sources intéressantes au Musée canadien des sciences et technologies à Ottawa. Il s’y trouve de l’information sur les premières industries à Deschênes.

Au souhait que je puisse trouver plus d’information sur la Capital Power Company, la Hull Electric Company, la Deschênes Electric Company et la Hull Electric Railway à leur bibliothèque. J’ai cependant un plan intéressant de la turbine utilisée dans la centrale hydroélectrique des frères Conroy. Elle provient de la Suède et plusieurs compagnies aident les Conroy à distribuer l’électricité vers le premier moulin de pâte et papier EB Eddy à Hull. Le fond Conroy contient même une des premières feuilles de papier produite chez EB Eddy Mills à Hull.

Il y a alors lieu de croire à une grande innovation technologique pour l’époque. Ces entreprises hydroélectriques opèrent à Deschênes pendant la première partie du XXe siècle. Elle fournit aussi l’électricité pour le réseau de tramway de la Hull Electric Company. Les opérations les plus remarquables sur les plans de Deschênes sont celles de la CPR et de la Capital Power Company en 1907. Cette compagnie hydroélectrique distribue de l’électricité à différentes grandes entreprises de la région dès 1895. Je ne connais pas encore l’ampleur des ressources disponibles au musée des sciences et technologies, mais Lisa enquête présentement à ce sujet pour moi. Il s’agit ici de se documenter davantage sur les opérations industrielles et ferroviaires sur le lot 15 a).

Il  s’y trouve aussi peut-être des informations au sujet de la batteuse-moissonneuse innovatrice de R & W Conroy dont le prototype a été construit et essayé avec succès à Deschênes. Cette invention brevetée a beaucoup d’influence dans le développement du chemin de fer sur la rive nord de l’Outaouais à l’ouest de Hull. Une chance, j’ai obtenu les droits d’utilisation d’une photographie de cette moissonneuse à Deschênes.

Ainsi, les mystères de la maison sur le Homestead continuent à me faire explorer un fond riche qui me permet de mieux connaître  le village de Deschênes et l’histoire du développement industriel du canton de Hull au XIXe siècle.

La quête de support visuel

Cette recherche est tellement stimulante, car les péripéties sont nombreuses et riches d’histoire. Elle me permet de développer une expertise dans l’histoire du 19e et du début du 20e siècle en Outaouais. J’achève l’exploration du Fond Conroy. J’ai toutes les photocopies nécessaires pour revenir sur les faits. J’ai aussi toute la liste des notaires ayant traité les affaires McConnell et Conroy. J’ai les droits d’utilisation des photographies des Conroy et de quelques activités sur le lot 15.

Les photographies révèlent très peu des entreprises Conroy à Deschênes. En fait, c’est ce qui me reste vraiment à trouver pour illustrer le parcours du patrimoine que j’entrevois pour cette activité pratique. Je communique avec l’Association du patrimoine d’Aylmer, car j’ai des images dans certains documents, mais je ne connais pas leur source et leurs droits d’utilisation. Il y a cependant une image que je veux vraiment qui est la photographie de Robert H Conroy devant sa centrale électrique aux rapides de Deschênes. Il se trouve aussi sur cette photographie une cinquantaine d’ouvriers de différents groupes d’âge. L’association du patrimoine d’Aylmer en a version en grand format dans son hall d’entrée. J’en suis à voir à l’obtention les droits d’utilisation.

Mon cheminement de recherche

Alors, mon cheminement semble aller bon train. Les aspects que j’ai prévus pour le parcours du patrimoine se solidifient. Il me reste quelques données à trouver, mais elles ne m’empêchent pas de progresser dans ma démarche. Mon plan commence à prendre forme de façon concrète. La richesse de l’information m’épate. Il ne reste qu’à la circonscrire.

Mon cheminement dans la production Web pour les élèves et la diffusion de l’histoire

Enfin, je change de sujet quelques minutes. Je participe à une recherche en évaluation des apprentissages. J’ai appris à développer des grilles de consignation des apprentissages.  À mes collègues qui travaillent sur des SAE, je vous suggère de travailler sur l’évaluation des apprentissages avant d’élaborer vos projets. De cette façon, il est plus simple de voir à vos attentes et aux contenus d’apprentissage. Il est plus simple alors de voir aux ressources nécessaires pour la réalisation d’un projet en histoire.

Dans mon cas, je suis partie des opérations intellectuelles pour définir mes critères d’observation et d’évaluation. Voici les résultats de ma grille d’évaluation (Lien externe) que vous pouvez consulter en ligne sur HEC Économie et développement (Lien externe).  Si vous avez des questions, c’est avec plaisir que je vous répondrai. J’ai trouvé cette grille fort intéressante pour évaluer le processus et les apprentissages en histoire, même après la correction de plus de 150 travaux ! Elle permet de voir aux forces et aux défis à surmonter dans l’apprentissage à interpréter l’histoire à partir de sources variées choisies par l’élève.

Les médias et la production du projet de session

Sur ce, j’explore beaucoup Google Sites pour intégrer les TIC en classe d’histoire. C’est avec cette plateforme que j’ai décidé de développer le parcours du patrimoine dans le cadre de cette activité pratique. Je prends de l’expérience et je teste avec les élèves mes réalisations au fur et à mesure qu’elles se construisent… Ainsi, je me familiarise avec cet outil, car il me permet de développer le Web. Sa convivialité me permet d’apprendre à créer et à gérer sur le Web, et ce, malgré mon peu de connaissance technique dans le domaine. J’en reconnais les limites, mais sa convivialité me permet de réaliser des productions Web.

Bonne semaine…