Cette pionnière hors de l’ordinaire figure parmi les bâtisseurs de la région de l’Outaouais. Née en 1816, Mary fait partie des McConnell, une illustre famille qui œuvre à l’exploitation forestière et au développement agricole dans la région. En 1837, elle épouse Robert Conroy, un ambitieux marchand, avec qui elle a dix enfants. Le couple s’établit à Aylmer et y fait construire l’hôtel British.
Par la suite, les McConnell-Conroy investissent surtout dans le développement des services de transport, comme les glissoires à bois, les quais d’embarquement, le chemin macadamisé d’Aylmer, les ponts et les services de diligence.
En 1857, Mary achète la ferme des rapides Deschênes qui devient l’une des fermes laitières les plus prospères de l’Outaouais. À la mort de son mari, en 1868, elle prend les rênes des entreprises familiales et elle modernise leur scierie. Plus tard, elle construit une deuxième scierie et y conduit le rail. Ses scieries produisent jusqu’à 30 millions de pieds de planche en une saison et emploient 200 travailleurs. Cette effervescence économique permet d’établir les bases du village de Deschênes Mills, en bordure de la rivière des Outaouais.
Conroy Mills, View from the Island Juillet 1887 Studio Topley, Bibliothèque et archives Canada Mikan : 3422109
À sa retraite, elle lègue ses entreprises à ses enfants. Elle décède en 1887. À la suite, ses fils, Robert et William Conroy, construisent une centrale hydroélectrique sur les rapides Deschênes pour alimenter les quartiers environnants, les usines et le tramway reliant Hull et Ottawa à Aylmer. Les fondations du barrage hydroélectrique sont d’ailleurs encore visibles.
Le sens aigu des affaires de Mary McConnell-Conroy pourrait faire d’elle une baronne du bois, titre réservé aux hommes de l’époque.
Ruines des scieries, barrage et du glissoir des rapides Deschênes Ile Mary McConnell, 2019 L. Rodier
1. Rôle des pionnières dans le développement de l’Outaouais
Il est rare que l’histoire économique mentionne les efforts des femmes dans les entreprises familiales au 19e siècle. De plus, on accorde peu d’importance à l’esprit d’initiative d’une femme et de sa famille dans l’essor d’un village. L’histoire de l’Outaouais ne fait pas exception. « L’exploitation forestière est habituellement considérée comme ayant appartenu à un univers masculin, mais femmes et enfants y ont joué des rôles variés et importants, et ce, même dans les familles des principaux marchands[1]. » Dans le cas de la famille Conroy, il est difficile de cerner l’influence de Mary McConnell dans l’essor économique de la région et au sein des entreprises familiales à Aylmer. Son rôle est aussi sous-estimé dans l’établissement du village de Deschênes. « Et même si, dans les documents officiels, le crédit en est généralement attribué au chef de famille, il ne faut pas oublier que la réussite, dans le domaine de la terre et de la forêt, doit être attribuée à la famille tout entière[2]. »
a) Mary McConnell et son intérêt pour le lot 15-a
On attribue habituellement à Robert Conroy ou à ses fils l’essor des premières industries à Deschênes. Les terres près des rapides appartiennent néanmoins à Mary McConnell qui avait acheté pour cinq shillings le lot 15-a de 100 acres de son oncle James[3] avec la permission de son époux et la collaboration de son père, William[4], de son cousin Richard[5], de Charles Symmes et de Murdoch McGillivray[6]. La première scierie aurait été modernisée en 1869, un an après le décès de Robert Conroy, époux de Mary, suivie de la construction d’une deuxième scierie quelques années plus tard[7].
Dans les années 1870[8], les scieries produisent 6 millions de pieds de planches à Deschênes classant ainsi Mary McConnell comme la 8e plus grande productrice de bois de sciage en Outaouais québécois[9]. La ferme Conroy est aussi une des mieux connues de l’est du Canada[10]. Mary McConnell peut donc être considérée comme la bâtisseuse du village industriel aux rapides Deschênes. Ces manufactures et la grande ferme servent de noyau de croissance pour Deschênes[11] où le rail se rend « (…) jusqu’à proximité des moulins (qui) révèlent un volume de production important dans l’économie régionale. »[12] « On y trouvait aussi un moulin à farine avec des auberges et de grandes étables pour y loger les nombreux cultivateurs et leurs attelages qui devaient souvent attendre une journée ou deux pour leur mouture[13]. » La diversité des industries reflète aussi l’importance qu’accorde Mary McConnell au développement de sa terre aux rapides Deschênes. Sa grande ferme loge une grande écurie[14], une des fermes laitières les plus prospères de la région et un élevage porcin. « Déjà en 1894, il y avait suffisamment d’achalandage au village pour y établir un bureau de poste, sous le nom de « Deschênes Mills » [15]». À cette époque, Deschênes Mills fait partie de la municipalité de Hull-Sud (South-Hull).
[Conroy Lumber Mills] BAC-MIKAN 3371909
2. Regard sur l’évolution du droit civil au 19e siècle
a) La dualité du droit civil au Bas-Canada
La propriété de Mary McConnell aux rapides Deschênes est un observatoire privilégié pour suivre l’évolution du droit civil chez les femmes de l’élite bourgeoise au Bas-Canada. « Depuis la publication de L’histoire des femmes au Québec, peu d’historiens se sont penchés sur les droits civils et politiques des femmes dans la province[16]. » Il est alors intéressant de prendre connaissance des actions de Mrs Robert Conroy dans l’appropriation d’une terre tenue en franc et commun soccage (Common Law) issu de l’héritage McConnell en 1857. « La femme mariée anglaise n’avait aucun droit aux biens accumulés pendant le mariage, même pas s’ils provenaient en tout ou en partie des fruits des biens qu’elle avait apportés au mariage[17]. »
En suivant de plus près la tenure de la propriété avec l’acte de vente et le transfert du lot 15-a de William McConnell à Mary McConnell, les documents notariés démontrent de l’usage du « droit civil à la française » par le fait qu’ils soient signés devant notaire et non d’un avocat faisant usage du « droit civil à l’anglaise »[18]. Les cantons ont un statut particulier au Bas-Canada et sont normalement soumis à la Common Law et non à la Coutume de Paris comme c’était le cas pour les anciennes terres concédées à l’époque de la Nouvelle-France. Mary McConnell est née au Bas-Canada avant 1841, alors elle a toujours la possibilité de se pourvoir du droit de douaire coutumier qui « (…) consistait à retirer l’usufruit (…) de la moitié des biens immeubles possédés par le mari lors du mariage et de ceux qu’elle recevait en héritage de ses père et mère et autres ascendants durant le mariage (art. 1434)[19].
b) La Loi sur l’enregistrement foncier obligatoire de 1841
La Loi sur l’enregistrement foncier obligatoire de 1841 transforme les formalités du droit de douaire requérant de l’inscrire, de le contractualiser et de le formaliser. « Par le droit douaire, une femme et ses enfants peuvent conserver, après la mort du mari propriétaire, la jouissance de certains biens, même s’ils ont déjà été vendus ou hypothéqués[20]. » Cette loi transforme les moyens par lesquels l’épouse peut disposer de ses biens fonciers ou de les protéger des créanciers. « Le privilège du douaire primait sur les droits des autres créanciers[21]. » La loi de 1841 permet alors aux femmes de vendre leur propriété garantie par leur droit de douaire délaissant ainsi ce droit sur l’héritage des enfants et sur la protection des biens immobiliers des créanciers de l’époux à son décès.
Dès 1857, toutes les femmes du Canada-Est peuvent se prévaloir officiellement du droit civil au lieu de la Common Law dans la gestion de leurs biens fonciers[22]. Il demeure que ce ne sont pas toutes les femmes et encore moins leurs enfants qui peuvent facilement se prévaloir du droit de douaire après 1841. « Les femmes doivent désormais renoncer pour elle et leurs enfants à l’ancienne protection matérielle du droit douaire, libérant ainsi les titres de propriété de leurs maris[23]. » En somme, la loi sur l’enregistrement foncier oblige à enregistrer le douaire sur les biens immobiliers. « L’instauration de bureau d’enregistrement, en 1841, ne fait que renforcer pour les femmes l’obligation de renoncer au douaire[24]. » La correspondance légale et financière dans le fonds d’archives de la famille Conroy nous renseigne sur les moyens que prend Mary McConnell pour mettre en valeur le lot 15, rang 1, canton de Hull, entre 1857-1887.
c) Les transactions foncières du village Deschênes
La transformation des lots agricoles en parcelles villageoises demeure mystérieuse, à défaut de réaliser une étude complète de la chaîne de titres fonciers. « De plus, l’arpentage du canton de 1806, ne contenait pas les subdivisions subséquentes[25]. » Les listes d’enregistrement renseignent sur les conditions de vente et les transferts des biens immobiliers. La correspondance légale nous informe sur les biens bénéficiant du droit de douaire sur les biens immobiliers de la famille Conroy. La partie est du village de Deschênes revient d’abord à Ithamar Day en 1831. Ce marchand confie l’autorité de la concession à son fils, Charles Dewey Day, pour les procédures de la demande de la lettre patente avant de quitter définitivement la région pour les États-Unis. « En outre, les colons devaient subir tellement de tracasseries administratives pour obtenir la moindre parcelle de terre de la Couronne ou du clergé que nombreux étaient ceux qui abandonnaient tout projet d’établissement agricole[26]. » Ensuite, au départ de Charles Dewey Day pour Montréal, s’amorce simultanément les procédures de transfert des titres de propriété des lots 15-a et 15-b[27]. En 1857, l’acte de vente et la succession sont finalisés l’année où se retire Charles Dewey Day des affaires entourant le lot 15-b[28] et où Mary McConnell, fille de l’associé William, accède aux titres de propriété du lot 15-a[29]. Cette même année, les formalités juridiques mènent à l’enregistrement et à la publication de la lettre patente de Charles Dewey Day par la Commission des terres de la province du Canada.
Les transferts fonciers se finalisent après le décès de James McConnell en 1851[30]. William devient le propriétaire d’office du lot 15-a, selon divers témoignages, et il transfère à sa fille, Mary, la propriété pour une somme symbolique en 1857. Avec le temps, la légitimité du transfert est contestée ou revendiquée et les difficultés juridiques et légales s’accroissent pour Mary McConnell à Deschênes. Son cousin, Renaldo, conteste la validité de l’entente prise entre Charles Dewey Day et son père, James[31]. Dans sa lettre, il soulève le contexte litigieux dont il a été témoin, car il a accompagné dans cette démarche son père qui avait des difficultés auditives et qui éprouvait toujours du regret quant à la mort de son fils, aussi nommé James, en 1847[32]. Il ne faut pas oublier le témoignage tardif de Murdoch McGillivray qui confirme le transfert de propriété à William McConnell[33]. Sa fille, Mary, fait aussi appel à des politiciens de l’élite conservatrice[34] de la province du Canada. Elle demande à des députés[35] de présenter sa cause devant le parlement du Canada-Uni. Les difficultés légales persistent avec l’accroissement des hypothèques sur les propriétés riveraines des Conroy. À deux reprises, les Conroy doivent comparaître devant la Cour supérieure pour défendre leurs intérêts entourant leurs industries aux rapides Deschênes. On constate alors que la famille Conroy détient un large réseau d’influence politique et économique dans la province du Canada.
3. La veuve, Mrs Robert Conroy
Au décès de Robert Conroy, en 1868, Mary McConnell et son fils aîné James deviennent tutrice et cotuteur des enfants mineurs : Robert Hugues, Charlotte Ann, William Jackson, Mary et Ida[36]. « Seulement après le décès de son mari, comme veuve, pourrait-elle devenir tutrice, et cela, uniquement pour ses propres enfants ?[37] » Dans le testament daté du 13 avril 1868, Mary McConnell est chargée de l’administration de l’ensemble des biens qui reviennent aux héritiers après son décès[38]. Cette administration des biens est la demande privilégiée de la majorité des époux au 19e siècle[39]. Cette situation empêche cependant Mary McConnell de disposer du patrimoine familial, car cette autorité revient à l’ensemble des héritiers après son décès[40]. Ces derniers sont autorisés à vendre leur part d’héritage à leurs frères et à leurs sœurs, une fois qu’ils sont majeurs[41].
Conroy, R. Mrs.- BACe010953798-v8, MIKAN#3451003
a) Le tuteur et l’exécuteur testamentaire
Le fils aîné de la famille, James Conroy, est aussi nommé exécuteur testamentaire. Le testament prévoit une compensation pour sa charge familiale lui léguant une subdivision de 7 acres au sud du lot 15, rang 2, sur lequel se trouve aussi l’église presbytérienne à l’angle des chemins de Deschênes et d’Aylmer[42]. James quitte Aylmer pour s’établir à Fort Collins au Colorado avec sa famille après 1870[43]. Il vend le lot 15, rang 2, à Robert Stuart en 1872[44]. De plus, en 1876, James Conroy cède son autorité et l’entière administration des propriétés foncières à sa mère. Ainsi, Mary McConnell est libre de subdiviser ou de vendre ses parts de propriété de l’héritage Conroy. Elle vend d’ailleurs un droit de passage de 4 acres à la compagnie de chemin de fer quelques mois plus tard. James et son épouse, Emily McConnell, maintiennent cependant un rôle central quant à la perpétuation du droit de douaire des Conroy sur le lot 15-a. Emily McConnell est la seule personne ayant acquis un droit de douaire légitime sur cette propriété[45]. Elle est la fille de Richard McConnell et la petite-fille de l’associé, James McConnell[46].
Pendant ce temps, Mary McConnell concentre ses énergies à rentabiliser sa ferme sur le lot 15-a, rang 1 du canton de Hull et à moderniser les infrastructures industrielles qui font naître un village aux abords des rapides Deschênes à partir de 1869. « Du pouvoir économique détenu par les marchands découle leur influence sociale[47]. » Dame Mary McConnell[48] ou la veuve Mrs Robert Conroy est une de ces femmes pionnières qui a amené le rail[49] vers sa grande ferme laitière, ses hôtels, ses scieries et ses industries et, par ses héritiers, l’hydroélectricité aux rapides Deschênes. La famille Conroy sait composer avec le risque du démarrage et de l’expansion des entreprises en Outaouais. Cette femme assure la position socioéconomique privilégiée de la famille Conroy parmi l’élite régionale à la suite du décès de son époux.
En 1880, Mary McConnell est condamnée par la Cour supérieure à verser 246 217 $ à la Banque de Québec[50]. Elle transfère alors une part de ses propriétés à ses fils, Robert Hughes et William Jackson[51]. Devant cette situation trouble, la famille Conroy réorganise ses actifs afin de protéger ses intérêts. Les problèmes légaux de Mary McConnell expliquent probablement le dépôt de l’inventaire après décès de Robert Conroy douze ans après sa mort[52]. Cet inventaire résume l’ensemble des biens immobiliers accumulés par les époux en communauté de biens. « La communauté de biens, automatique en l’absence d’un contrat de mariage, mettait en commun les biens (meubles et immeubles) acquis durant le mariage, les revenus produits durant cette période ainsi que les biens et meubles possédés par les conjoints au moment de l’union[53]. » Il n’y a aucune mention des effets personnels du défunt comme il est souvent la coutume dans de tels inventaires. « Suivant le temps écoulé entre le moment du décès et la rédaction de l’inventaire, le contenu de l’acte est plus ou moins susceptible de rendre fidèlement l’ensemble des biens d’une personne ou de sa communauté[54]. »
Les couples d’origine britannique contractaient majoritairement en séparation de biens vu que la communauté de biens est étrangère au droit anglais au 19e siècle[55]. Ainsi, cette situation contraire aux coutumes britanniques par le choix de ce régime matrimonial laisse peu de doute sur le fait que Mary McConnell précise son régime matrimonial en communauté de biens[56]. « La communauté des biens était assez favorable, d’un point de vue économique, si le couple prospérait et pouvait acquérir des terres ou d’autres immeubles, car l’épouse était propriétaire de la moitié de ces avoirs[57]. » L’usage du « droit civil à la française » dans la gestion de la moitié de ses biens laisse la possibilité à la veuve et tutrice de contracter des hypothèques sur sa part des biens sans pour autant nuire aux parts de ses enfants. La communauté de biens laisse ainsi le droit à la famille à un douaire[58]. Cet inventaire laisse entendre que la famille Conroy formalise de façon définitive le droit de douaire sur leurs propriétés foncières au début des années 1880[59].
4. Protection des biens fonciers de la succession en terre de colonisation
L’inventaire après décès de Robert Conroy introduit le terme Homestead pour décrire certaines propriétés, soit le Homestead Symmes Landing et le R & W Conroy’s Homestead. Cette expression décrit la partie de la propriété où sont surtout installées les industries et les installations de la ferme d’en arrière. Mary McConnell a transformé les terres d’un vieux poste de traite en grande ferme où se multiplient les industries. Elle entreprend les travaux de construction d’au moins une scierie et elle modernise le moulin à farine à grande production. Ces industries mènent Deschênes à son âge d’or entre 1870 et 1920. Cette dame d’affaires d’Aylmer lègue aussi à ses enfants une grande ferme laitière prospère et moderne à une distance de marche des industries.
Le lot 15 est une source importante de revenus de la famille Conroy au 19e siècle. En plus d’être bâtisseuse en région de colonisation, Mary McConnell vit avec les transformations législatives affectant le droit de douaire des femmes au 19e siècle. C’est alors en tant que veuve qu’elle entreprend les démarches nécessaires pour se prévaloir du « droit à la française » dans les documents légaux. Cette procédure est nécessaire pour garantir le droit de douaire. « Ainsi, le nouveau Code civil adopté en 1866 exige que le douaire coutumier, qui avait été épargné par les modifications apportées dans les années 1840, soit désormais soumis lui aussi à la procédure d’enregistrement. » Il y a aussi certaines circonstances qui peuvent faire de leur condition financière une réalité assez fragile[2] surtout dans les domaines du bois et du transport.
P154,S1,D29, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Mary McConnell, Centre des archives de l’Outaouais, Fonds Famille Conroy, Photographie Notman.
Ensuite, Mary McConnell affirme son statut matrimonial en communauté de biens[1] et, dans les documents légaux successifs, il y a des traces de plus en plus évidentes qui laissent entendre que les héritiers de la famille Conroy se prévalent du droit de douaire à la période où s’amène le rail à Deschênes. Les fils, Robert Hugues et William Jackson, se lancent alors en affaire sous le nom de R & W Conroy. Ils protègent ainsi les propriétés de la famille Conroy de leurs créanciers. Ils séparent leur entreprise des terres sur lesquels se situent leurs industries. Ils peuvent ainsi financer le risque de leurs entreprises à Deschênes sans perdre la part de l’héritage qui leur revient à l’ensemble des héritiers et des héritières de la famille Conroy à la fin du 19e siècle.
C’est en 1902 que les héritiers et les héritières commencent à vendre leurs biens immobiliers à la suite des problèmes financiers des entreprises R & W Conroy. Cette période correspond à la vente de certaines parcelles du lot 15-a à la Commission des terres de la Couronne. Par contre, les entreprises démarrées par la famille Conroy poursuivent leurs opérations et elles conservent leurs droits de passage sur les terres de la Couronne. La Compagnie du Canadien Pacifique et la raffinerie de nickel s’installent sur une bonne partie du lot 15-a au début du 20e siècle. Aujourd’hui, une grande partie de ces terres appartiennent à la Commission de la capitale nationale du Canada (CCN).
Ce parc riverain témoigne toujours de la prise de possession de ce bien foncier par une femme d’affaires qui a su préserver les dernières traces du droit de douaire et les transformations du statut juridique des femmes et des droits de la famille dans un canton du Bas-Canada au 19e siècle.
Notes de bas de page
[1] Bradbury explique : « These particuliar legal identities of wifes mattered. When married women interacted with the business world, they were identified not just as wives but as wife common to their goods, wives separate as to their goods, or wives married in exclusion of community » dans Bradbury, Wife to widow, p. 85. Dans le cas particulier de Mary McConnell, ce n’est que lorsqu’elle est veuve que son régime matrimonial se définit. Étant née au Bas-Canada et en absence d’un contrat de mariage, ce statut légal est la norme pour les femmes de cette époque.
[3] BAnQ, P 154, D7, Transfert des propriétés de l’inventaire Mary McConnell à Robert H. et W. J. Conroy, 27 septembre 1880, Lib. B, Vol. 24, Part. 780, No 665.
[4] BAnQ, P 154, S3, D1 / 1, Déposition de l’Affidavit de Murdoch McGillivray faite par Charles Symmes, à Aylmer, 1er juin 1857.
[5] Richard McConnell est le fils de l’associé James McConnell. Sa fille, Emily, épouse James Conroy, le fils de Mary et Robert Conroy en 1864. Voir – Parish register for Saint James’s Church, Hull, Quebec, covering the years 1868-1886, Parish Register 447, page 12. BAnQ, P154, D7, Deed of sale, Maria Jane Conroy, John Nelson, Mary Conroy, John S. Dennis jr., James Conroy, Eleanor Conroy, Alfred Driscoll and Ida H. L. Conroy to Robert Hugues Conroy & W. J. Conroy, registered in the County of Ottawa, Vol. 9, A, 7th day of May 1887. C’est dans cet acte de vente qu’Emily McConnell fait reconnaître son droit douaire sur le lot 15-a. Le mot « DOWER » y est clairement énoncé. Cet acte de vente démontre aussi le pouvoir légal des femmes de la famille Conroy à transiger leur bien foncier. Elles ont autant d’autorité dans les transactions immobilières que leurs époux. Aussi, cet acte demeure vague quant aux titres fonciers des Conroy.
[6] BAnQ, P154, D1 D1 / 1, Déposition de l’Affidavit de Murdoch McGillivray faite par Charles Symmes, à Aylmer, 1 juin 1857.
[13] Jacques Séguin, « Un peu d’histoire… », Une communauté chrétienne vivante, Saint-Médard d’Aylmer, 1923-1998, Paroisse de Saint-Médard, 1998, p. 21 et Brault, Aylmer d’hier, p. 233.
[14] LabMIT, Le quartier Deschênes, p. 25 ; BAnQ, P154, D6, Liste d’inventaire après décès de Robert Conroy, 1879. La liste d’inventaire spécifie qu’il y a 80 vaches, 20 vieux chevaux et 12 poulains de moins de trois ans.
[17] Evelyn Kolish, « Depuis la Conquête : les Canadiens devant deux droits familiaux », Cap-aux-Diamants : la revue d’histoire du Québec, n° 39, 1994, p. 17.
[18] Les actes notariés sont permis dans les townships à partir de 1826. Ces actes démontrent aussi les pratiques subordonnées à la « loi française ». Les documents se conformant à la Coutume de Paris sont habituellement écrits par un notaire. Voir Bradbury, Wife to Widow, p. 153.
[25] Guitard, Quartier de Deschênes, p. 18. Guitard ajoute : « De plus, le village de Deschênes a son premier plan cadastral en 1884, et il est modifié en 1887. »
[26] Gérald Bernier, et D. Salée, « Appropriation foncière et bourgeoisie marchande : éléments pour une analyse de l’économie marchande du Bas-Canada avant 1846 », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 36, n° 2, 1982,
185.
[27] James McConnell, frère de William McConnell, meurt en 1851. Quant à Charles Dewey Day, le fils d’Ithamar, il vend vraisemblablement le moulin à scie lors de la vente du lot 15-b à Louis Maurille Coutlée le 16 août 1850 selon Guitard, Quartier de Deschênes, p. 17. Guitard ajoute : « Coutlée avait emprunté l’argent pour l’achat de cette propriété à 2250 £ à quelques voisins (Stewart, Foran, Tufts, Bourgeau, Montmarquet). Les sommes dues passèrent d’un créancier à l’autre et par la Cour Supérieure. » Ibid. p. 17-18.
[28] Il vend le lot 15-b, rang 1 et les améliorations apportées par son père, Ithamar, avant son départ en 1831.
[29] BAnQ, P 154, D1, Acte de vente et de transfert des titres de propriété, 30 mai 1857.
[30] Elaine Howes, The Descendants of Robert McConnell & Eleanor McDonald, The Island Register, http://www.islandregister.com/mcconnell1.html (Consulté le 19 novembre 2013). Voir aussi l’annexe 3, Arbre généalogique, aux pages 92, 93 et 94.
[31] BAnQ, P154, S3, D1/1, Lettre de Renaldo McConnell : « That he is acquainted with the sale his father made of half of lot no 15 in the first range of Hull to Mr Day but he, Ithmar noting of any arbitration having to them place between his late father and Mr Day relating to the said lot no 15 on the first range aforesaid and does not believed that any such arbitration ever took place. ».
[33] BAnQ, P 154, D1, Acte de vente et de transfert des titres de propriété, 30 mai 1857.
[34] Il y a peu de preuve du réseau d’influence politique des Conroy parmi l’élite conservatrice de la province du Canada. En fait, la famille Conroy est proche de cette élite grâce à son luxueux hôtel British. D’ailleurs, le prince de Galle est venu assister à un bal à l’occasion de son passage à Aylmer en 1860 (Bégin, Auberge Conroy, p. 39). Selon les rumeurs, l’assassin de Thomas D’Arcy McGee s’est brièvement présenté aux funérailles de Robert Conroy, décédé le 8 avril 1868, le lendemain du meurtre (Ibid. p.41). John A. McDonald (Ibid. p. 44) était aussi familier avec ce fameux hôtel d’Aylmer, toujours selon les rumeurs, et Louis Cyr est aussi de la liste des invités de passage en 1898 (Ibid. p.46). Enfin, en 1895, il s’y tient une réunion entre Mackenzie Bowell (premier ministre du Canada), Sir Charles Tupper (son successeurs quelques mois plus tard), Adolphe Caron (ministre des postes) et Julius G. Lay du consul général des États-Unis au Canada. Ces hommes séjournent pendant la même période où se discute la questions des problèmes scolaires au Manitoba (Ibid. p. 30).
[35] BAnQ, P 154, D2/1. Lettre au député Thomas Lewis Drummond. La lettre est d’un auteur inconnu. « Thomas Lewis Drummond, the Irish born lawyer and politician who had studied with Charles Dewey Day and also defended Patriots following the Rebellions, described the Registry Ordinance as « a law that would never have been passed by a free legislature » Note chap.-4.65 dans Bradbury, Wife to Widow, p. 135. Cette citation démontre les changements importants au droit civil du Bas-Canada à la veille de l’Union des deux Canadas. Il est aussi intéressant de voir que Mary McConnell ou tout autre auteur de cette correspondance de la famille Conroy fait appel à un collègue de Charles Dewey Day pour introduire devant le parlement du Canada-Uni cette « affaire » en lien avec le transfert des titres de propriété du lot 15-a.
[36] BAnQ, P154, S3, D1/1, Liste des documents concernant la propriété du lot 15, rang 1, et une partie du lot 15, rang 2, du Canton de Hull entre 1850 et 1887. « Liste enregistrée au Bureau d’enregistrement du Canton de Hull, signée par Louis Duhamel, protonotaire du Bureau d’enregistrement » et dans Guitard, Michelle, Secteur Deschênes, p. 18.
[37] Kolish, Depuis la Conquête : les Canadiens devant deux droits familiaux, p.16.
[38] Traduction libre de : « By which he bequeathed the usufruct of his moveable & unmovable property to Mary McConnell during her lifetime and after her death the full and absolute property to be divided among his children. » BAnQ, P154, D1, Enregistrement du testament de Robert Conroy, 11 avril 1868, « Liste d’enregistrement foncier, 1850-1887, Comté d’Ottawa, Province du Québec, signée devant le registraire, Louis Duhamel.
[40] BAnQ, P154, D1, Enregistrement du testament de Robert Conroy, 11 avril 1868, « Liste d’enregistrement foncier, 1850-1887, Comté d’Ottawa, Province du Québec, Signée devant le registraire, Louis Duhamel ». Dans la marge de cette liste, il est indiqué « With reserves however & with ».
[41] BAnQ, P154, D7, Acte de vente et transfert de l’héritage de Charlotte Conroy, 5 mai 1881, pres. B, vol 25, no 528, 455. ; BAnQ, P154, D7, Deed of sale, Maria Jane Conroy, John Nelson, Mary Conroy, John S. Dennis jr., James Conroy, Eleanor Conroy, Alfred Driscoll and Ida H. L. Conroy to Robert Hugues Conroy & W. J. Conroy, registered in the County of Ottawa, Vol. 9, A, 7th day of May 1887.
[42] Ibid. et dans Aldred, Chemin d’Aylmer, p. 179.
[43] James Conroy fait baptiser son fils à Aylmer en 1870. Parish Register 434, Parish Register for Christ Church, Aylmer, Quebec, covering the years 1866-1886, folio 15. Il est noté que James Conroy est marié à Emily McConnell. Elle est la fille de Richard (fils de James McConnell) et alors, la cousine de James McConnell.
[44] BAnQ, P 154, D1, Enregistrement de la vente du lot 15, rang 2 de James Conroy à Robert Stuart, testament de Robert Conroy, « Liste d’enregistrement foncier, 1850-1887, Comté d’Ottawa, Province de Québec, signée devant le registraire, Louis Duhamel ».
[45]L’acte notarié de Charlotte offre un regard détaillé sur la redistribution du patrimoine entre les héritiers Conroy à la suite du décès de leur sœur en 1881. Il décrit en détail le bien foncier des héritiers Conroy et il mentionne le droit douaire dont bénéficie Emily McConnell sur le lot 15-a dans BAnQ, P154, D7, Acte de vente et transfert de l’héritage de Charlotte Conroy, 5 mai 1881, pres. B, vol 25, no 528, 455. De nouveau, le droit douaire est mentionné dans l’acte de vente suivant : BAnQ, P154, D7, Deed of sale, Maria Jane Conroy, John Nelson, Mary Conroy, John S. Dennis jr., James Conroy, Eleanor Conroy, Alfred Driscoll and Ida H. L. Conroy to Robert Hugues Conroy & W. J. Conroy, registered in the County of Ottawa, Vol. 9, A, 7th day of May 1887.
[46] Acte de mariage entre James Conroy et Emily McConnell. Parish Register 447, Saint James Church, Hull, Quebec, covering the years 1868-1886, page 12.
[47] Lise St-Georges, « Commerce, crédit et transactions foncières : pratiques de la communauté marchande du bourg de l’Assomption, 1748-1791 », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 39, n° 3, 1986, p. 343.
[48] D’un air très sérieux, la photographie, de Dame Mary McConnell, montre la veuve dans ses habits de veuvage typique des femmes affirmant leur autorité dans la gestion du patrimoine familial au 19e siècle. BAnQ, P154, S1, D29, Fonds de la famille Conroy, « Photographie, Mary McConnell », Studio Notman (Ottawa). Ce portrait rappelle que Mary McConnell peut négocier ses hypothèques et à gérer ses biens fonciers. Elle montre par ses habits son statut social de veuve. À ce sujet, voir Bradbury, Wife to Widow, p. 207-209.
[49] Le nom de Mrs Mary Conroy paraît sur le plan du tracé du chemin de fer menant à Aylmer dans BAnQ, E25, S105, SS4, D878, Fonds du Ministère des Travaux publics et de l’Approvisionnement, W. Dale Harris, Plan du tracé du Pontiac and Pacific Junction Railway, – 400 pieds : 1 po. – 23 avril 1888, Québec.
[50] BAnQ, P154, D1, Enregistrement du jugement de la cour supérieure du district d’Ottawa, 18 septembre 1880,
no 598. Les documents légaux du fonds de la famille Conroy n’offrent aucune explication à ce sujet.
[53] Thierry Nootens, « Des privations ne peuvent pas constituer une fortune : les droits financiers des femmes mariées de la bourgeoisie québécoise face au marché, 1900-1930 », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 65, no 1, 2011, p. 62.
[54] Yvan Morin, « La représentativité de l’inventaire après décès : l’étude d’un cas : Québec au début du XIXe siècle», Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 34, n° 4, 1981, p. 521.
[55] Bradbury, Wife to Widow, p. 78-79 ; Kolish, Depuis la Conquête, p. 17.
[56] « May by the death of the said Robert Conroy and the said Mary McConnell as having bien communal en biens (communal et biens soulignés dans le texte) with the said late Robert Conroy, seized and rested with the one undivided half of the said real estate here therefore described which was all acquired during the existence of the said community ». BAnQ, Fonds Conroy, P 154, D7, Fonds de la famille Conroy, Inventaire après décès de Robert Conroy, Aylmer, 11 novembre 1880, Centre d’archives de l’Outaouais.
[57] Bradbury, « Devenir majeure : la lente conquête des droits », Cap-aux-Diamants : la revue d’histoire du Québec, n° 21, 1990, p. 36.
[59] Jeune avocat en droit civil, Robert Hughes Conroy, écrit lui-même l’inventaire après décès de son père de la famille selon la copie de 1879.
[1] L’acte après décès (1880) mentionne : « (…) with the store cottage, known as the homestead. » BAnQ, P154, D7, Fonds de la famille Conroy, Acte après décès de Robert Conroy (1880).
[2] Nootens, « Des privations ne peuvent pas constituer une fortune », p. 61.
L’histoire de l’Outaouais maintient précieusement plusieurs énigmes bien cachées dans nos centres d’archives en région. Par ma recherche au sujet de la famille Conroy d’Aylmer, j’ai découvert des pistes intéressantes sur la transformation du commerce, du transport, de l’agriculture et du droit civil en Outaouais au 19e siècle. Plusieurs questions de recherche n’ont toujours pas trouvé de réponse. Par exemple, la maison grise est toujours à vendre, et elle est maintenant de couleur beige. Je ne sais toujours pas qui est le bâtisseur de ce bâtiment historique dans le secteur Deschênes à Gatineau, et elle ne bénéficie pas d’une reconnaissance pour sa valeur patrimoniale. Aussi, je n’ai pu m’attarder au rôle politique de la famille Conroy et à leurs liens d’affaires avec les familles McGillivray, des marchands de fourrure de l’ancienne Compagnie du Nord-Ouest et de Charles Dewey Day, un juge et un politicien ayant transformé le droit civil et l’instruction publique au Québec.
Toutefois, mes recherches m’ont conduite vers différentes histoires inusitées de la région. En étudiant le lot sur lequel est construite la maison grise, les titres de propriété m’ont obligée à faire un retour sur l’histoire du Code civil du Bas-Canada, car une femme, Mary McConnell, en est propriétaire en 1857. Mary McConnell est une femme d’affaires et l’épouse de Robert Conroy.Elle acquiert la propriété riveraine aux pieds des rapides Deschênes de son père, William, dans un contexte litigieux. William McConnell et son frère, James, sont des marchands de fourrure et de bois, redoutés de la Compagnie de la Baie d’Hudson, et s’étant installés dans la région avec le groupe d’associés de Philemon Wright. La famille McConnell a aussi plusieurs grandes fermes dans le canton de Hull. Étant bien établies, la famille McConnell et ensuite, la famille Conroy voient aux activités de transbordement sur le lac Deschênes avant que la marchandise ne se rende en aval aux chutes des Chaudières.
À travers les traces laissées dans les divers documents de la famille Conroy au Centre de recherche des archives de l’Outaouais (CRAO), nous voyons à l’histoire du mode d’établissement dans la région et à l’essor de l’agriculture, du transport, du commerce, de l’industrialisation et de l’hydroélectricité sur la rivière des Outaouais. Ainsi, à travers les traces du patrimoine de la famille Conroy d’Aylmer, il nous est permis de voir à une autre histoire des bâtisseurs de l’Outaouais. Cette recherche se révèle aussi un bel observatoire de l’histoire des femmes au Québec, car, une fois veuve, Mary McConnell sait faire usage du droit civil pour réussir à fonder Deschènes Mills qui devient au 20e siècle le village de Deschênes.La famille Conroy d’Aylmer ouvre alors vers plusieurs pistes de découvertes par les traces de leur patrimoine qui conduisent à des histoires méconnues de la région de l’Outaouais.
Ce blogue n’est qu’une continuité de mes recherches en histoire qui en somme, ont soulevé tellement de questions méritant l’attention d’un plus grand public et des historienNEs qu’elles seront reprises au fil de mes écrits. Il y a toujours de nombreuses pistes de découvertes à ces histoires. J’admire la force de caractère de la population de la région et le cours des événements qui ont façonné notre passé et qui ont toujours des répercussions sur notre présent. J’aimerais en arriver à faire valoir cette histoire auprès des jeunes en particulier pour qu’ils y trouvent un intérêt pour le passé. Il faut bien admettre que plus l’histoire se rapproche de soi, plus elle nous pousse à la questionner et à en être curieux …
Par ailleurs, j’ai le plaisir de vous annoncer que mon premier article écrit conjointement avec Sophie Tremblay est retenu par l’équipe de la revue, Hier encore, du Centre de recherche des archives de l’Outaouais (CRAO). L’article, Les bâtisseurs de l’Outaouais : Robert Conroy, paraîtra en février 2015. Je souhaite personnellement qu’il soit aussi le premier d’une série au sujet des bâtisseurs de l’Outaouais. Ce dernier porte sur Robert Conroy d’Aylmer et de son rôle dans le développement économique de la région au 19e siècle. C’est aussi avec plaisir que je vous lance une invitation pour une causerie au sujet de la famille Conroy d’Aylmer que je prépare pour l’Association du patrimoine d’Aylmer (APA). C’est alors un rendez-vous, le 16 novembre 2014 à 14 heures au musée d’Aylmer situé au 495, chemin d’Aylmer à l’angle du chemin du Golf. Vous pouvez réserver pour cette activité en appelant à l’APA au 819-684-6809.
L’histoire du secteur Deschênes à Gatineau est intimement liée à la rivière des Outaouais. Elle remonte au moment où le site est un lieu de passage imposant, Deschênes étant le dernier des trois portages des Chaudières exigeant de débarquer des embarcations, de charger la marchandise et de marcher sur les sentiers étroits longeant la rivière des Outaouais. Les débarquements se font habituellement de la rive nord de l’Outaouais, car elle est avantagée par la direction des vents dominants et le courant de la rivière. En remontant la rivière, les trois portages sont le « Portage du bas » à la chute des Chaudières, le « Portage du milieu » qui est surtout le sentier escarpé longeant les rapides de la petite Chaudière et le « Portage du haut» aboutissant au léger promontoire au-dessus des rapides Deschênes. Le sentier du « Portage du haut » exige des voyageurs de contourner les rapides Deschênes en ligne droite sur une distance d’environ 200 pas[1]. « Ils s’arrêteront au pied ou à la tête de sentiers de portage ou, plus tard, dans les postes de traite qui sont généralement situés près d’embouchures de rivières ou de sentiers de portage[2]. »
2. LA PÉRIODE DU SYLVICOLE
À la fin de la période sylvicole, le site du « Portage du haut » est aussi favorable à l’occupation des regroupements familiaux durant la saison estivale. Il y a sûrement plusieurs familles des nations algonquines qui s’y arrêtent pendant la période de grands rassemblements et de commerce. Le « Portage du haut » est connu de tous les voyageurs naviguant sur la rivière des Outaouais. La difficulté de ce portage amène le voyageur à prendre un moment de répit, avant ou après le portage, car les efforts exigent de surmonter des obstacles naturels dressés en aval ou d’entreprendre les 95 kilomètres en amont sur les eaux calmes de la rivière des Outaouais jusqu’aux rapides des Chats[3]. En plus du commerce, la population amérindienne établie sur les lieux pratique l’agriculture derrière une mince bande marécageuse se mettant ainsi à l’abri des passants sur la rivière[4].
3. LE TOPONYME « DESCHÊNES »
À la période des contacts avec les Européens, le site du village de Deschênes est toujours un lieu d’arrêt imposé par la géographie de la rivière des Outaouais. « Lieu de portage millénaire de la rivière des Outaouais, sis sur l’axe de circulation principal des explorations de l’Amérique du Nord et du commerce des fourrures, le portage de Deschênes est inscrit dans la topographie du Canada depuis 400 ans[5]. » L’histoire attribue au chevalier de Troyes l’origine du toponyme « Deschênes » lors de son passage aux rapides en 1686. Ce commandant de l’expédition d’Iberville remarque la qualité des chênes de l’endroit[6] et il nomme alors le lieu « portage des Chênes »[7]. Contrairement au toponyme « des Cèdres », la graphie Deschênes sera modifiée pour se conformer à un patronyme longtemps associé aux pelleteries[8] et à la présence de la famille Miville-Deschênes dans le secteur depuis le 17e siècle[9]. Ces derniers sont toujours des commerçants dans la région au 19e siècle[10]. Le nom « Deschênes » n’est jamais traduit par le mot Oak de langue anglaise depuis le début de la colonisation britannique en Outaouais[11]. Enfin, « la Commission de la toponymie n’a pas diffusé de renseignements sur l’origine du nom, sa signification ou sur la raison pour laquelle on a attribué le nom « Deschênes » au lieu, soit parce qu’elle n’a pas l’information en main, soit parce que son programme de diffusion ne lui a pas encore permis de le faire[12]. » Les deux origines possibles et homophones du toponyme (couverture forestière et patronyme) confirment l’importance du lieu comme point de transit sur la route du commerce des pelleteries sur la rivière des Outaouais.
4. LA FOURRURE, LE BOIS, L’HYDROÉLECTRICITÉ
a) Le poste de Deschênes
C’est à travers le Fonds de la famille Conroy qu’on constate qu’au début du 19e siècle, le commerce des fourrures demeure l’activité économique principale profitant de la présence amérindienne dès le printemps[13]. En fait, « en 1802, les premiers explorateurs, des missionnaires et des commerçants de fourrures, s’installent dans la région[14]. » Aussi, il y a la confirmation de plusieurs magasins ou d’entrepôts, en plus du poste de traite en activité près des rapides Deschênes depuis 1821[15]. À la fusion des deux grandes compagnies de fourrure, la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) et la Compagnie du Nord-Ouest (CNO), le commerce des pelleteries délaisse ses opérations de Montréal pour les postes de traite de la baie d’Hudson. Désormais ouverts aux traiteurs indépendants du Bas‐Canada[16], les environs de la chute des Chaudières voient alors l’arrivée de nombreux marchands. À cet effet, nous pouvons lire ce passage dans History of Old Bytown : « We shall endeavour to mention some of the old stock of British extraction, that were among the first pioneers old Norwester Cork, and Mr. Conroy, of old Bytown, these two came here in 1826. E. (Edward) McGillivray and his brother (Murdoch) came in 1835[17]. » Il est aussi à l’avantage des traiteurs indépendants de maintenir la présence amérindienne sur un site d’échange et de commerce[18]. Les marchands veillent ainsi à entretenir leurs relations commerciales avec les trappeurs et les chasseurs des environs.
La période 1830-1850 est peu documentée. Nous pouvons cependant confirmer que le territoire est en transformation par son développement économique dans la région de l’Outaouais. « La compétition intensive des marchands indépendants dura une dizaine d’années jusqu’à ce que la CBH jugea préférable de réorienter l’administration et l’exportation des fourrures à Montréal, d’où son entrepôt et le bureau‐chef et la résidence du gouverneur de la Compagnie, George Simpson, à Lachine en 1830[19]. » Au poste de Deschênes, la présence du marchand indépendant, Ithamar Day, un ancien de la CNO, indique déjà une occupation aux rapides Deschênes en 1821. Selon les sources, nous savons qu’il y a eu à Deschênes, entre 1830 et 1850, au moins une ferme, une scierie, une filature, un magasin et un canal[20].
b) L’essor du commerce du bois
À partir de 1850, les activités de l’industrie du bois s’organisent dans la région. « Le commerce des fourrures, qui connaît son apogée sur l’Outaouais vers 1850, disparaît peu à peu, ruiné par la montée du mouvement de colonisation et le développement de l’industrie du bois[21]. » Aux rapides Deschênes, la première scierie est modernisée et une deuxième se spécialise en bois de sciage dès 1869[22]. Le site du village est alors mieux connu sous le nom de Deschênes Mills[23]. La modernisation de l’agriculture et des scieries contribue à l’essor des Conroy à Deschênes. Cependant, le feu emporte les scieries et les premiers moulins dans les années 1890[24]. Le journal local mentionne la présence de 200 ouvriers qui, pour plusieurs, habitent dans le village avec leur famille[25]. Par la suite, la relance des installations contribue à accélérer la croissance de Deschênes Mills. Les ouvriers et les artisans s’installent sur le côté ouest de la rue Principale, encouragés par les activités industrielles.
c) L’or bleu aux rapides Deschênes
À la fin du 19e siècle,l’instabilité du marché du bois n’encourage pas à réinvestir dans la construction des scieries. Il s’y élève plutôt deux centrales hydro-électriques : la Deschenes Electric Company et la Hull Electric Company. « Initialement produite à partir de charbon, l’électricité trouvait en la force hydraulique une source d’énergie primaire à très bon marché qui allait progressivement lui permettre de remplacer la machine à vapeur au sein du système productif [26].» La Deschênes Electric Company produit l’électricité nécessaire à l’éclairage des rues d’Aylmer et de divers bâtiments de la région. Une deuxième centrale, la Hull Electric Company, est construite dans le but d’alimenter le réseau des tramways électriques. La production étant accélérée, le chemin de fer et les tramways électriques de la Hull Electric Company facilitent le transport des biens et des personnes vers les usines près des rapides Deschênes.
d) La raffinerie de nickel
Le site du village de Deschênes devient le deuxième lieu d’importance industriel dans le canton de Hull[27] à la suite de l’ouverture de la British American Nickel Corporation en 1916, construite au coût de plus d’un million de dollars[28]. « C’est au cours de la Première Guerre mondiale que Deschênes connaît une explosion démographique avec l’implantation d’une usine de raffinage de nickel qui attire des centaines d’ouvriers[29]. » À la fin de la Grande Guerre, Mackenzie King[30] ordonne la fermeture définitive et le démantèlement de l’usine[31]. Jusqu’à maintenant, nul ne connait les raisons qui ont motivé le premier ministre à ordonner directement la démolition de cette usine moderne qui était bien en vue à l’époque : « The production of refined metal from the completed plant on a scale hitherto unknown to Canada[32]. » Les ruines de l’usine sont apparentes jusqu’en 1985, compromettant l’usage de ces terrains et leur développement[33]. Un quartier résidentiel est maintenant construit sur ce site.
CONCLUSION
Enfin, l’ancien village de Deschênes s’incorpore en 1920 et en 1922[34]. La fermeture définitive de l’usine contribue à la disparition graduelle de ce milieu industriel jadis prospère. « En face de cette démolition inutile d’une usine en bon état, le conseil municipal entreprend des démarches pour conserver la cheminée et la partie principale des bâtiments qui pourrait attirer et servir à une autre industrie[35]. » De plus, la paroisse catholique Saint-Médard est promulguée en 1923. « Pour aider la paroisse naissante et pour lui économiser le coût de la construction d’une église, par l’entremise de son surintendant, Bob Adams, la compagnie British North American Nickel, qui venait de cesser ses opérations de raffinerie, cède une maisonnette désaffectée, recouverte de papier goudronné, qui avait servi de bureau à ses employés[36]. » Le village se transforme alors en milieu de villégiature pour ensuite s’intégrer de façon définitive à la banlieue à la suite de la Deuxième Guerre mondiale. Finalement, Deschênes est fusionné à la Ville d’Aylmer en 1975[37] et l’ancien village est maintenant un quartier de la Ville de Gatineau depuis la fusion municipale de 2002.
Bibliographie
[1] T.W. Edwin Sowter, «La Grande Route de l’Outaouais», Asticou, Revue d’histoire de l’Outaouais, cahier no 34, Juillet 1986, p. 10. Traduction de l’article de Sowther par Ephrem Boudreau, «The Highway of the Ottawa», Paper and Records of the Ontario Historical Society, Griffin & Richmond Co. Ltd, Pinter, Hamilton (Canada), 1915.
[2] Ville d’Aylmer. Symmes Landing, Recherche historique et évaluation patrimoniale du site de Symmes Landing situé dans la ville d’Aylmer, comté de Hull. Direction du patrimoine du ministère des Affaires culturelles (Québec) et la division des Affaires publiques de la Commission de la Capitale nationale (Ottawa), 1983, p. 4.
[3] Ibid.
[4] Pendant l’été 2013, des tessons de poterie amérindienne ont été trouvés lors des fouilles archéologiques sur le site du Portage du haut à Deschênes. Ces tessons prouvent que les environs des rapides Deschênes comptaient une population semi-sédentaire.
[6] Lucien Brault nomme le territoire Des-Chênes et il explique que le nom des rapides Deschênes « vient du fait que de nombreux chênes y poussent sous le régime français selon le chevalier de Troyes en 1686 » et il ajoute que les Algonquins nomment l’endroit « Miciminj » qui veut dire « là où pousse le chêne ». Lucien Brault, Aylmer d’hier / of Yesterday, Institut d’histoire de l’Outaouais, Aylmer, Québec, page 233. Chad Gaffield utilise aussi cette source pour confirmer le nom des rapides. Tous les historiens subséquents persistent à utiliser la référence de Louis Taché. Gaffield, L’histoire de l’Outaouais, p. 97. Par ailleurs, Michelle Guitard spécifie la source de ce récit : Pierre de Troyes, dit chevalier, Journal de l’expédition du chevalier de Troyes à la Baie d’Hudson en 1868, Édition et introduction de Ivanhoe Caron, Beauceville, 1918, p. 32. Guitard, Quartier de Deschênes, p. 15. L’ensemble de ces sources réfère à la description de Louis Taché dans le Nord de l’Outaouais, page 205. Il y a cette impression que ce fait est acquis et qu’il ne fait pas objet de contestations ou de revendications depuis 1938.
[8] Il y a des Miville-Deschênes qui vivent à Deschenes Mills à la fin du 19e siècle. De plus, la famille Miville-Deschênes est active dans la traite des fourrures en Outaouais au début du 19e siècle. Voici ce que nous explique Michael Newton à ce sujet : « Les frères Miville connaissaient bien ce genre de commerce. Avant son arrivée à la Petite-Nation en 1820, Joseph Miville avait dirigé un hôtel-pension situé au 3, rue des Jardins à Québec, où il était connu comme «cantinier»! (…) Joseph Miville avait protégé son investissement en exploitant des tavernes ou cantines des deux côtés de la rivière, à Bytown et à Hull. » Dans Newton, La maison Charron, p. 12-14.
[9] À ce sujet, nous pouvons retenir les traces de Jacques Miville-Deschênes, négociant de pelleteries et seigneur du fief des Chesnes à La Pocatière au 17e siècle. « Jacques Miville, qui pour la première fois utilise le titre de sieur Deschênes, on ne sait pourquoi (…)» est le deuxième fils de Pierre Miville dit le Suisse, un négociant canadien fort connu dans les cercles du commerce des fourrures. Raymond Ouimet, Pierre Miville – Un ancêtre exceptionnel, Les Éditions du Septentrion, 1989. Cet auteur ajoute : « Jacques Miville, sieur Deschênes, utilise « sieur Deschênes » pour la première fois dans le contrat de mariage avec Catherine de Baillon qui est « Issue d’une famille noble – ce qui pouvait renforcer le statut des Miville en Nouvelle-France. » Dans Ouimet, Pierre Miville, p. 85-87. De plus, vu que les marchands de fourrure laissent peu de traces de leurs affaires commerciales, nous ne pouvons qu’en déduire que ces marchands négocient à des endroits spécifiques où il leur est facile d’intercepter le transport fluvial. Dans Michel Filion, « La traite des fourrures au XVIIIe siècle : essai d’analyse statistique et d’interprétation d’un processus », Histoire sociale/Social History, vol. 20, no 40 (novembre 1987).
[10] Michael Newton. Some notes on Bytown and the fur trade, The Historical Society of Ottawa. Bytown Pamphlet Series. No 5, 1991, p. 7. Michael Newton. « La maison Charron: Symbole d’une vision contrariée ». Outaouais, Le Hull disparu, Institut d’histoire régionale de l’Outaouais, 1982, p. 12.
[11] Si l’hypothèse « des Chênes » était retenue, il aurait alors été étonnant de le voir se perpétuer dans son usage au début du 19e siècle. Le mot chênes aurait alors eu l’avantage d’être traduit à « Oak » comme ce fut le cas de « Oak Bay » en Gaspésie. Bien que l’orthographe du mot cause des problèmes orthographiques au début du 19e siècle, l’ensemble des textes de langue anglaise consultés le maintient en un mot « Deschênes ».
[13] La déposition de Murdoch McGillivray en 1857, mentionne la présence amérindienne sur les dites terres de la partie ouest du lot 15. BAnQ, P 154, D1, Déposition de Murdoch McGillivray signée en 1857. Gard écrit : « All along this part of Lake Deschenes is full of indications of the early people who lived here, possibly ages before the first white man saw these beautiful waters. Aylmer’s noted scientist, Mr. T. W. Edwin Somer, has given years of study to the Lake, with the result that he has made it famous throughout the scientific world, for the many relics he has discovered or encouraged others to hunt out. He has written largely of these relics « Archaeology of Lake Deschenes, » being the most important as bearing upon this particular locality » dans Gard, Pioneers of the Upper Ottawa, 1909.
[14] Pierre Malo, « Aylmer, une ville jalouse de sa beauté », Continuité, no 69, 1996, p. 36.
[15] Archives de l’Ontario, Plan of R 1, c-IV, Nepean, lot 30, con 1 (of), tiré de Elliot, The CityBeyond, p. 11 ; BAnQ, P154, D1, Déposition de Murdoch McGillivray signée en 1857; Newton, Some notes on Bytown and the fur trader, p. 9 ; Guitard, Quartier de Deschênes, p. 16. Au sujet du plan du canton de Nepean, Elliot commente : « Captain Andrew Wilson, an eccentric naval officer, drew this map to illustrate a land petition in 1831. Note – « The Chaudiere development at « Nepean Point » to the left and, to the right, Le Breton Mill and residence at Britannia. Across the river is Day and McGillivray’s store and fur post at Deschênes Rapids ». Il reste toujours à trouver les traces ou les écrits au sujet du poste de traite aux rapides Deschênes.
[18] BAnQ, P 154, S3, D1/1, Déposition faites par Charles Symmes et par Murdoch McGillivray, à Aylmer, 1er juin 1857 ; Arthur Buies, L’Outaouais supérieur,Québec, 1889, pages 273-280 – Version numérique – BAnQ http://collections.banq.qc.ca/bitstream/52327/2022419/1/174229.pdf; Newton, « Some notes on Bytown and the fur trade », p. 8.
[19] Guitard, Quartier de Deschênes, p. 16.
[20] LabMIT, Le quartier Deschênes: une vision d’avenir enracinée dans son histoire et sa géographie, p. 25 ; Guitard, Quartier de Deschênes, p. 18 ; Miller, Day, Charles Dewey; Gaffield, Histoire de l’Outaouais, p. 221. Joseph Bouchette mentionne qu’il y a une scierie aux rapides Deschênes en 1832 dans Bouchette, Dictionnaire topographique de la province du Bas-Canada, 1832.
[21] Pierre-Louis Lapointe, « Géographie, histoire et définition d’une identité régionale : le cas de l’Outaouais », Histoire Québec, vol. 11, n° 2, 2005, p. 7.
[22] Guitard, Quartier de Deschênes, p. 20 et dans le Nord de l’Outaouais, Taché ajoute : « Quelques citoyens se souviennent encore sans doute du moulin Conroy à Deschênes construit en 1870, du moulin à farine situé au même endroit et dont il ne reste plus que quelques vestiges », p. 206-207.
[23] Deschênes Mills est inscrit de cette façon dans la liste des biens de R & W Conroy en 1883. BAnQ, P154, D8, Schedule and Evaluation of R & W Conroy’s Real Estate, Mill property and Timber Limits, 30th November 1883.
[24] Guitard, Quartier de Deschênes, p. 25.
[25] Guitard, Quartier de Deschênes, p. 25. Michelle Guitard ajoute dans les notes : «Deschênes sawmill burnt by lightning», dans le journal Equity. Elle explique que l’article est une reproduction d’un journal qui lui a été envoyé donnant la date suivante : July 13th, 1890. Madame Guitard ajoute au sujet de la date de l’incendie des scieries : « Ce n’est pas possible à cause du contenu qui fait référence à la ligne de la Hull Electric. Il faut donc que ce soit après 1896. La personne qui m’a envoyé cette référence est à l’extérieur du pays. Donc à vérifier plus tard. »
[26] Claude Bellavance, « L’État, la « houille blanche » et le grand capital. L’aliénation des ressources hydrauliques du domaine public québécois au début du XXe siècle », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 51, no 4, 1998, p. 495.
[30] Brault, Aylmer d’hier, p. 236. L’auteur écrit qu’en réaction à la volonté du conseil municipal de Deschênes de revitaliser l’usine en 1923, Mackenzie King s’y oppose et donne l’ordre : « Tear it down ». Madame Guitard suggère qu’une étude plus approfondie pourrait être pertinente quant à l’origine de la raffinerie et au contexte de la fermeture définitive de ce complexe moderne industriel par le Premier Ministre du Canada. Guitard, Quartier de Deschênes, p. 23. Il faudrait alors plonger dans le fonds William Mackenzie King, lequel comprend 316 mètres d’archives textuelles. Bibliothèque et archives du Canada, Fonds William Lyon Mackenzie King, 1815-1969, http://www.collectionscanada.gc.ca/pam_archives/public_mikan/index.php?fuseaction=genitem.displayItem&lang=fre&rec_nbr=98362
[31] Ibid.
[32] Ibid.
[33] Guitard, Quartier de Deschênes, p. 23.
[34] Ibid. De plus, Manon Leroux explique aussi que l’usine ferme ses portes l’année suivant la promulgation de la paroisse Saint-Médard en 1923. Selon ces propos, l’usine ferme de façon définitive en 1924.
[35] Brault, Aylmer d’hier, p. 236.
[36] Ibid. p. 238.
[37] Ville d’Aylmer, Aylmer, Un passé riche, Un avenir prometteur, Juin 1989, p. 13.
Le rapide de Deschênes fait courir sa renommée à l’ombre de la Chaudière depuis plus de deux siècles. La plus long sentier des trois portages aboutit ou débute à ce rapide. Ce toponyme paraît déjà sur une carte accompagnant une pétition du Haut-Canada au début du 19e siècle [1].
La localisation du rapide est assez simple. Il est situé sur une longue pointe de terre démarquant le point géographique le plus au sud de la rivière des Outaouais. L’origine du nom Deschênes demeure toujours du débat.
Samuel de Champlain décrit un des lieux de portage dans ses récits lors de son passage près de l’Asticou. Cette description correspond à la géographie près du rapide de Deschênes. Il peut alors se confirmer que le rapide fait partie du vocable pour décrire les difficultés du portage sur l’Outaouais depuis 400 ans.
« & aussi tost fallut embarquer, puis derechef mettre pied à terre pour passer par des taillis environ 300 pas, après se mettre en l’eau pour faire passe nos Canots par dessus les rochers aigus, avec autant de peine que l’on sçauroit s’imaginer. Je prins la hauteur du lieu & trouvay 45 degrés 38 minutes de latitude. Après midy, nous entrames dans le lac ayant 5 lieux de long, & 2 de large, où il y a de fort belles iles… »
(Champlain, 1613, vol.1 p. 449)
Certains historiens attribuent ce toponyme à la description vague laissée dans les écrits de Chevaliers de Troyes en 1686 qui rapporte la présence de nombreux chênes dans les environs[2]. «Les rapides de Deschênes commandaient le portage. Ils étaient explorateurs, marchands et engagés du commerce des fourrures, missionnaires, militaires, colons, tous se rendant pour la plupart aux grands Lacs en passant de l’Outaouais par la Matawa et la rivière des français avant t’atteindre le nord du Lac Huron, pays de la nation des Ottawa ou Outaouais, d’où le nom de la rivière à partir de la fin du XVIIe siècle».
La question demeure que le nom « des chênes » se traduit très bien en anglais[3] et que cette terminologie s’utiliserait facilement en cartographie au 19e siècle où toutes les cartes officielles sont de langue anglo-saxonne.
D’autant plus, en faisant un survol du toponyme Deschênes, il est remarqué qu’à la fin du 19e siècle, il s’écrivait Deschènes comme sur la feuille 200 de Hull & Vicinity du plan d’assurance-incendie Goad de 1903[4]. Il faut admettre que voir Deschènes sur une carte de 1903 apporte certaines contrariétés vu que le village n’est toujours pas incorporé et il n’a pas de paroisse à cette date[5].
Les anciens d’origine canadienne-française de ce petit établissement ont surnommé quant à eux l’endroit « les Chênes » et « aux chênes ». On dit même que « Il est regrettable, au point de vue historique, que le nom de ce petit village se soit mué en celui de DesChênes. Pourquoi ne dirait-on pas Village-des-Chênes, Lac-des-Chênes ?[6] »
Ainsi, la toponymie de cette pointe de terre se faisant discrète aux abords du rapide de Deschênes demeure toujours une énigme à élucider surtout sachant que la famille Miville-Deschênes de Québec et ses descendants de la Mauricie sont très actifs dans les environs avec la traite des fourrures qui tire graduellement à sa fin au début du 20e siècle dans la région métropolitaine de l’Outaouais[7]. « Le toponyme présente le cas intéressant d’une désignation inspirée par la végétation, mais les caprices de l’écriture et l’usage l’ont transformée en un appellation à saveur patronymique »[8]. Ainsi, le doute demeure sur les origines du nom de cet ancien village de Gatineau.
[1] Archives de l’Ontario, Plan of R 1, c-IV, Nepean, lot 30, con 1 (of), tiré du livre de Bruce Eliot, The City Beyond, p. 11. On voit aussi dans les écrits le nom « Chaudiere Lake » au début du 19e siècle.
[2] Lucien Brault nomme le territoire Des-Chênes et il explique que le nom des rapides Deschênes « vient du fait que de nombreux chênes y poussent sous le régime français selon le chevalier de Troyes en 1686 » et il ajoute que les Algonquins nomment l’endroit « Miciminj » qui veut dire « là où pousse le chêne ». Lucien Brault, Aylmer d’hier / of Yesterday, Institut d’histoire de l’Outaouais, Aylmer, Québec, page 233. Chad Garfield utilise aussi cette source pour confirmer le nom des rapides. Chad Gaffield et al. « La grande rivière des Algonquins : 1600-1650 », L’histoire de l’Outaouais, Les régions du Québec ; 6, Institut québécois de recherche sur la culture, 1994, Québec, p.
[4] Plan d’assurance incendie Goad, Hull & Vicinity, Que., January 1903, revised May 1908. Bibliothèque et Archives Canada : Cartes et plans, Online MIKAN no. 3823774
[5] Communauté chrétienne Saint-Médard, Programme souvenir, 1923-1973, Juin 1973, 71 pages, aussi dans Jacques Séguin, Une communauté chrétienne vivante, Saint-Médard d’Aylmer 1923-1998, 128 pages et dans Lucien Brault, « Lucerne (Hull-Sud) Deschênes », Aylmer d’hier/ Aylmer of Yesterday, Institut d’histoire de l’Outaouais, Aylmer (Québec), pages 235-236. Il n’y a pas de doute que cette description nous vient de Louis Taché, Le nord de l’Outaouais. Manuel-Répertoire d’Histoire et de Géographie régionales, Le Droit, Ottawa, 1938, qui a écrit à la page 205 (lien en PDF : http://www.reseaupatrimoine.ca/documents/Nord%20de%20lOutaouais%20p2%20s1%20c2.pdf
« Dès l’établissement des premiers colons sur la route d’Aylmer, une scierie fut construite à la tête du rapide Deschênes. Cette scierie rendit de grands services à tous ceux qui, alors, élirent domicile dans les environs. La rivière Outaouais était, en particulier à cet endroit, bordée de beaux chênes. C’est ainsi que les Canadiens français appelaient indistinctement le petit établissement, qui s’était formé autour du premier moulin’, les Chênes ou aux Chênes. Aujourd’hui même, on entend encore certains vieux citoyens se servir de la même appellation. Il est regrettable, au point de vue historique, que le nom de ce petit village se soit mué en celui de Deschênes. Pourquoi ne dirait-on pas Village-des-Chênes, Lac-des-Chênes ? »
[6] Communauté chrétienne Saint-Médard, Programme souvenir, 1923-1973, Juin 1973, page 16 et dans Jacques Séguin, Une communauté chrétienne vivante, Saint-Médard d’Aylmer 1923-1998, page 21.
[7] Michael Newton, « La maison Charron : Symbole d’une vision contrariée », Outaouais, Le Hull disparu, Institut d’histoire régionale de l’Outaouais, 1982, p. 12 et Michael Newton, Some notes on Bytown and the fur trade, The Historical Society of Ottawa, Bytown Pamphlet series. no 5, 1991, p. 3. Retrouver carte où on voit Miville Tavern à l’endroit où est situé le musée canadien des civilisations aujourd’hui à Gatineau. D’autant plus, il y a une peinture au Musée des Beaux-Arts du Canada montrant un groupe autochtone sur la rive nord de l’Outaouais en face du Parlement d’Ottawa.
[8] Noms et lieux du Québec, ouvrage de la Commission de toponymie, 1994 page 194 et Commission de toponymie du Québec, Lac Deschênes.
Je tiens à vous informer que j’en suis à construire le site Web Parcours du patrimoine. Ce site vise à amener l’utilisateur à identifier le bâtisseur et le premier propriétaire de la maison au 84, chemin Vanier. Ces connaissances permettent ensuite de voir aux usages de cet imposant bâtiment historique à la porte d’entrée de l’ancien village de Deschênes.
Voici le lien pour vous rendre au centre des mystères entourant les titres de propriété de la maison : Parcours du patrimoine
La maison grise au 84, chemin Vanier à Gatineau
Collection : Lisa Mibach, 2010
Des questions simples pour une démarche d’enquête en histoire sur le Web
Il demeure encore nombreuses questions que je tente de répondre. Le temps commence à presser pour ajouter les divers contenus que me révèlent les traces du patrimoine de cette maison. Ainsi au cours de la prochaine semaine, j’ajouterai les contenus qui me permettent d’expliquer l’histoire de cette maison à partir des traces du patrimoine qui la définissent jusqu’à présent. L’utilisateur du site est alors placé dans une démarche d’enquête semblable à celle que je vis présentement. Il a l’avantage de ne pas avoir à courir les différents centres d’archives et le centre des registres des propriétés fonciers.
Je tiens aussi à avertir l’utilisateur qu’au début mon intention était de dresser un bref portrait historique de ce bâtiment. Il s’est révélé de nombreux mystères qui font en sorte que les recherches se poursuivent toujours depuis un peu plus de six mois. Ce bâtiment figure sur la liste de l’inventaire du patrimoine bâti à la Commission de la capitale nationale du Canada (CCN). Cette liste est un inventaire des propriétés foncières à valeur historique dans la région environnante d’Ottawa. Il y a aussi listé le garage de wagon de tramway de la Hull Electric Railway Company, le bâtiment face à la maison du 84, chemin Vanier.
La liste des bâtiments historiques de la CCN
Le registre de la propriété de la CCN liste les titres d’enregistrement et les subdivisions du lot 15 a). Cette liste offre un regard neuf pour lire les rôles d’évaluation municipaux et la valeur des biens fonciers. Il permet même de déterminer la date d’acquisition des différentes propriétés où se développe le village de Deschênes depuis 1938. Il est aussi intéressant que cette liste identifie la parcelle ouest du lot 15. Les titres de cette parcelle réfère à la lettre patente foncière de Chs. C. Day en 1836.
L’énigme du lot 15 se pose de nouveau et elle s’élargit en apprenant à connaître différents contextes de ce litige entre les familles Day, McConnell et Conroy à cette époque. L’énigme du lot 15 élargit notre perspective de l’histoire sur le lot 15 en 1836. À titre d’exemple, il est intéressant de noter que Charles Dewey Day « avait commencé sa carrière politique en avril 1834 en protestant publiquement contre l’appui accordé par la chambre d’Assemblée aux Quatre-vingt-douze Résolutions de Louis-Joseph Papineau »(Miller, Encyclopédie biographique du Canada). Il est aussi à rappeler que le lot 15 convoité est une terre du clergé protestant et britannique. Elle est aussi un lieu de portage et d’arrêt sur la route de la traite des fourrures. Ithmar Day, son père, opère un magasin général, une scierie et un poste de traite aux rapides Deschênes. Il est aussi intéressant à noter qu’Ithmar Day, cède ses droits de traite à James McConnell en 1836 selon Michael Newton.
Le passage du commerce des fourrures à l’industrie du bois
J’ai pu obtenir une copie des recherches de Michael Newton sur la traite des fourrures dans la région de Gatineau-Ottawa de la CCN. Cette recherche éclaire sur le commerce des fourrures sur l’Outaouais et son bassin versant. Il se trouve des cartes qui nous démontre le réseau hydrographique servant au transport de la fourrure. Il est alors facile à comprendre le maintien des activités de la fourrure et de son influence sur l’essor de l’industrie du bois en Outaouais. Newton nous informe sur les liens étroits entre le commerce des fourrures et les barons du bois. Un ne va pas sans l’autre nous spécifie-t-il. Cet article nous informe clairement les litiges de 1821-1836 sur le lot 15. En 1836, Ithmar Day quitte la région et il va vivre dans l’ouest. Charles Dewey Day obtient alors les titres sur la parcelle ouest du lot 15. James McConnell obtient comme mentionné plus tôt les droits sur la traite des fourrures et Robert Conroy exploite alors les scieries obtenu dans l’héritage de son épouse Mary McConnell. Ainsi, fidèle à lui-même, chaque pas entrepris pour percer l’énigme du lot 15 nous conduit vers des pistes riches en histoire peu connu à une période même où se construit un nouveau portrait des deux Canadas. L’ouvrage de Newton adresse aussi la présence amérindienne sur les terres près du poste de traite aux rapides de Deschênes. Il est intéressant d’apprendre de nouveau sur leur présence près de la rivière des Outaouais. J’avais déjà dénoté leur présence dans le rôle d’évaluation de 1904.
Le magasin Day & McGillivray en 1821
L’ouvrage de Newton m’a été suggérée par Bruce Elliot qui a lui-même effectué des recherches sur la localité de Nepean qui est sur la rive sud de l’Outaouais juste en face de l’ancien village de Deschênes. Nepean est aussi à l’ombre de sa voisine imposante, Ottawa selon le titre de son livre : The city beyond, History of Nepean, birthplace of Canadian Capital, 1792-1990. J’ai obtenu une copie de ce livre livre cette semaine. Mon intérêt réside dans la mention d’une carte situant un bâtiment commercial Day & McGillivray à Deschênes en 1831 à la page 11. McGillivray réside à Nepean et il entretient des liens étroits avec Ithmar Day. Il s’établit même un rituel où les deux hommes se visitent un et l’autre régulièrement en traversant la rivière en canot. C’est McGillivray qui sera le témoin de Day dans le litige du lot 15 commençant en 1821. Il est aussi à noter que la carte certifie alors la présence d’un grand bâtiment et de Day à Deschênes en 1831. Le bâtiment serait-il la maison du 84, chemin Vanier ? Malheureusement, il n’y a toujours aucune trace de ce bâtiment dans les différentes sources consulté dans les différents fonds d’archives.
La Deschênes Electric Company
Le livre City Beyond nous informe aussi sur les activités de la Deschenes Electric Company et sur la transmission de l’hydroélectricité à la fin du 19e siècle. Il s’établit une ligne de transmission entre Nepean et Deschênes. Ce projet est vertement contesté par la Ottawa Electric Company qui en arrive à force de revendication et en arrive à une interdiction de l’importation de l’hydroélectricité des barages situés au nord de l’Outaouais. Cette situation est fâcheuse d’autant plus que la Ottawa Electric Company fournit l’électricité sur l’île de Hull à la même époque. Ce litige est peut-être une raison qui explique en partie, les difficultés financières de la Deschênes Electric Company. J’ai cependant eu la merveilleuse surprise que la Deschênes Electric Company à survécu aux nombreuses intempéries qui ont veillé à la presque la voir disparaître au main de spéculateurs. Il est rassurant de voir que les femmes Conroy maintienne ardemment les titres sur les entreprises hydroélectriques de leurs frères aux rapides de Deschênes. Il y a aussi une preuve dans la liste des terrains de cédés et acquis du lot 15 à la CCN. La Deschênes Electric Company est toujours présente à Deschênes en 1950 selon la liste des bâtiments historiques du lot 15 préparée par Carmen Robitaille à la CCN. Ainsi, continue la quête pour connaître l’origine de la maison. Il est facile de constater l’ampleur des faits qu’elle permet de révéler et de toute l’histoire qui s’en dégage dans cette chasse des preuves nécessaires à l’identifier.
Heureusement, la liste des bâtiments historiques de Carmen Robitaille offre aussi un outil utile pour lire les rôles d’évaluation foncier de la municipalité à la ville de Gatineau. Elle fournit une liste des subdivisions du lot 15 a) nous informe sur l’évolution de la partie est du village Deschênes. Il y a une liste des numéros d’enregistrement et des cadastres de résultant des subdivisions. Il est ainsi plus facile de connaître l’évolution démographique du village. nous permettent de cerner davantage les cédants et les acquéreurs des propriété. Il ne fait pas mention du lot 142 sur lequel la maison est située en 1901. Ainsi malgré que ce registre éclaire sur divers éléments se trouvant à Deschênes, sur les différents acquéreurs des propriétés foncières et sur les transferts des titres de propriété suite à la dissolution de la Hull Electric Company. L’énigme nous conduit alors vers d’autres sources qui nous permettent de creuser davantage dans l’histoire de la région. Après plus de six mois de recherche, cette maison demeure énigmatique et fragilisée dans l’absence de ces titres.
Les mystères enfouis dans l’énigme d’une maison révélatrice d’histoire
Et dire, que cette maison n’était qu’un petit élément pour faire le portrait de la porte d’entrée du village de Deschênes. Je voulais en connaître davantage sur ce bâtiment à risque de disparaître du patrimoine bâti de Gatineau. J’ai considéré qu’elle mérite l’attention de la recherche en histoire, car elle est une composante importante du patrimoine de l’ancien village. Le 84, Vanier s’est cependant révélée être une maison aux nombreux mystères qui se sont vécus dans le village. Ses énigmes nous conduisent vers des détails qui déroute la chercheure. Ils présentent cependant les différents enjeux qui se sont vécus aux abords des rapides de Deschênes. Ainsi, ce parcours du patrimoine expose l’ensemble de cette démarche qui m’amène au coeur de nombreuses histoires peu connues pendant la période que se construit le Canada.
Je suis en ce moment à préciser le sujet de mon travail de session pour mon cours « activité pratique » en histoire sur l’ancien village de Deschênes. Je souhaite créer un parcours du patrimoine pour faire d’abord connaître le Homestead des frères Conroy et ensuite, l’usine de Nickel de Deschênes. L’exploration de ces deux aspects du village comporte plusieurs histoires inusitées sur le Québec. J’ai retenu l’idée d’une exposition virtuelle pour créer ce parcours du patrimoine. Il vise surtout à faire valoir l’unicité de l’histoire de cet ancien village maintenant intégrer à la ville de Gatineau. Ce village habité par les ouvriers passe maintenant souvent inaperçu dans le paysage urbain. Il maintient pourtant plusieurs traces de son passé qui révèlent souvent des aspects peu attirants pour la population ne connaissant pas son histoire. Il préserve ainsi les traces dans son patrimoine bâti et naturel. Les maisons allumettes et les anciens chalets bordant les environs du lac et des rapides Deschênes sur la rivière des Outaouais attirent aussi peu le regard des passants sur la piste cyclable liant Gatineau et à Ottawa. Il demeure que plusieurs cyclistes s’arrêtent pour regarder les ruines de l’ancienne centrale hydroélectrique près des rapides. Ces ruines nous rappellent pourtant brièvement le passé industriel des lieux.
Le village de Deschênes attire aussi peu l’attention des historiens et des associations du patrimoine de la région, car les habitants n’ont pas la stature des « grands personnages » retenus dans l’histoire de l’Outaouais. De plus, le bâti reflète surtout le milieu populaire où les lieux de travail ont progressivement disparu du paysage. Les ouvrages sur l’histoire de la région négligent aussi grandement l’apport de Deschênes sur le passé économique, social et culturel en Outaouais. Le peu d’intérêt pour le village a toutefois joué un rôle d’importance dans la conservation de son patrimoine. Plusieurs bâtiments relatant les débuts de Deschênes sont toujours présents dans le secteur. Il y a eu peu de développement résidentiel substantiel depuis une cinquantaine d’années pour transformer le visage de cet ancien village. Deschênes nous offre alors un environnement privilégié où le patrimoine retient des histoires qui ne se définissent que par ces choses anciennes.
L’intention du parcours est de mettre en valeur le patrimoine bâti et naturel par des sources primaires. L’idée est de concevoir un lieu d’enquête pour en révéler la richesse du passé de ce village ouvrier et industriel au début du 20e siècle. Cette enquête en histoire nous transportera vers le développement industriel, hydroélectrique et ferroviaire au Québec. L’enquête à partir du patrimoine de Deschênes nous amène vers des hommes et des femmes exceptionnels qui ont bâti et qui ont vu évoluer la région.
La création de ce parcours du patrimoine m’amène alors à faire ma propre enquête pour trouver les sources primaires qui révèlent la richesse des traces du passé toujours présentes dans l’ancien village de Deschênes. J’explore le fond Conroy la semaine prochaine. Ainsi, la mise en valeur des sources primaires trouvées dans les archives de la région ne peut que révéler des pans intéressants de notre histoire. N’étant qu’à l’étape préliminaire de ma recherche, il se perçoit cependant plusieurs contraintes à la mise en œuvre de ce projet. Il se révèle peu de connaissances sur les lieux de travail des premiers colonisateurs anglophones en Outaouais. Il est aussi difficile de voir ces acteurs dans leur milieu de travail et de connaître leur rôle dans le développement économique de la région. Les études sur le phénomène de l’urbanité dans les régions et les villages ouvriers sont aussi que très parcellaires au Québec. Il s’agit alors de voir à caractériser un village qui ne dépend pas d’une industrie unique à l’image de plusieurs villages industriels se développant à la même époque. Il est loin aussi de la notion du village rural québécois.
Ainsi, ce blogue conduit à faire connaître un objet de recherche inusité en histoire du Québec. Il se veut alors un lieu pour suivre ou pour participer à l’évolution de cette recherche en histoire. Le blogue devient ainsi un outil intéressant pour voir à l’évolution de cette recherche d’autant plus, qu’il s’avère un outil indispensable très intéressant pour la supervision de mes travaux en cours produit à distance. Le blogue est aussi utile pour faire connaître l’objet de cette recherche qui touche des aspects peu connus de l’histoire du Québec. Les personnes s’y intéressant peuvent laisser leurs commentaires afin de faire évoluer la recherche en histoire.
Enfin, le parcours du patrimoine est aussi le début de la création d’une exposition virtuelle du village de Deschênes relatant son histoire entre 1900 et 1940. Ainsi, l’exposition met en valeur les caractéristiques qui attirent les migrants vers le village au début du 20e siècle et les facteurs qui les amènent à s’y établir. J’explore alors les possibilités du Web pour mettre en œuvre cette activité. Je songe sérieusement à Google Sites qui est un outil de développement Web convivial et simple. Cependant il comporte certaines limites qui seront traitées davantage lorsque mon choix sera arrêté. Je regarde aussi à l’installation de Omerka sur mon Mac. Ce n’est pas par un simple clic qu’apparaissent les outils pour travailler avec ce logiciel sur Mac. Cependant, le logiciel gratuit semble aussi à mon avis très intéressant pour ce genre de production virtuelle. Alors, je vois ainsi à l’explorer davantage pour d’abord le faire fonctionner et pour ensuite l’analyser selon les besoins qui se soulèvent dans cette production. Je regarde aussi plusieurs blogues depuis une semaine pour voir à présenter le patrimoine par des expositions virtuelles. Alors, continuons à explorer des logiciels afin de choisir l’outil de communication convivial pour cette personne détenant peu de connaissances en programmation et qui pousse aussi vers une recherche en histoire qui mène à une enquête sur le passé de ce village méconnu.